Changements de la productivité BIOlogique et leurs impacts sur le cycle du CarbOne au cours des Déglaciations passées – BIOCOD
BIOCOD: Changements de la productivité BIOlogique et leurs impacts sur le cycle du CarbOne au cours des Déglaciations passées
L’étude de la productivité biologique océanique et continentale pendant les transitions glaciaires-interglaciaires nous permettra de tester les principales hypothèses faisant le lien entre les variations de la concentration en dioxyde de carbone atmosphérique et la biosphère. Les mécanismes sous-jacents seront également explorés via l’utilisation de modèles du climat et du cycle du carbone.
Vers une meilleure compréhension des stocks et flux de C associés à la productivité biologique et leurs impacts sur la pCO2 atmosphérique au cours des déglaciations des derniers 800 000 ans
Au cours de chacune des neuf transitions glaciaires-interglaciaires des 800 000 dernières années (800 ka), aussi appelées « terminaisons glaciaires », les concentrations atmosphériques en dioxyde de carbone (pCO2) ont augmenté de 50 à 100 ppm en quelques milliers d'années. Malgré le rôle central joué par le CO2 lors de ces transitions climatiques mais aussi dans le réchauffement climatique actuel (GIEC, 2022), les mécanismes synergiques conduisant à ces transitions restent mal connus. Alors que le réservoir océanique profond et le pergélisol sont soupçonnés d'avoir libéré de grandes quantités carbone (C) reminéralisé dans l'atmosphère, très peu d’études se concentrent sur les estimations quantitatives des stocks et flux régionaux et globaux de C associés à la productivité biologique c.à.d. aux organismes photosynthétiques qui convertissent le CO2 du système océan-atmosphère en matière organique, et favorisent sa séquestration dans le réservoir océanique profond et la lithosphère. <br /><br />Les simulations numériques et les reconstructions paléoclimatiques suggèrent que la diminution de la productivité marine dans la zone subantarctique (SAZ) en lien avec la migration vers le sud du système de fronts polaires et la diminution de la fertilisation des eaux océaniques de surface par les poussières riches en fer, aurait contribué à libérer du CO2 depuis le réservoir océanique profond vers l'atmosphère en diminuant la force de la pompe des tissus mous c.à.d., la production et l’export de C organique vers les profondeurs. Cependant, ces études négligent généralement la force de la contre-pompe des carbonates, c'est-à-dire la production en surface, et l’exportation vers les profondeurs, de C inorganique (CaCO3) planctonique qui augmente la concentration en CO2 des eaux océaniques de surface et par inférence de l’atmosphère, et contribue, avec la pompe à tissus mous, à la pompe biologique à C de l'océan. Parallèlement, il a récemment été démontré que la biosphère terrestre aurait également pu jouer un rôle clé dans la régulation de la pCO2 lors des terminaisons glaciaires. L'augmentation de la productivité terrestre et du stockage du C sur les continents aurait pu conduire à une diminution de la pCO2, contrecarrant ainsi partiellement la libération de C depuis le réservoir océanique profond.<br /><br />L’objectif de ce projet est de quantifier les changements multi-centenaires à multi-millénaires de la productivité biologique marine et terrestre et leurs impacts sur les variations de pCO2 au cours des terminaisons des derniers 800 ka via une approche modèles-données. Une attention particulière est portée aux terminaisons TVII (620 ka), TV (430 ka) et TIII (250 ka) qui marquent l’installation progressive des cycles glaciaires-interglaciaires à 100 000 ans à la fin de la transition mi-Pléistocène (1 200-600 ka) et la mise en place des variations de pCO2 de grande amplitude à partir de l’évènement Mi-Brunhes (430 ka).
BIOCOD est la conséquence rationnelle des collaborations existantes entre GEOPS (partenaire 1), le LSCE (partenaire 2), EPOC (partenaire 3) et l'IGE (partenaire 4) via des projets inter-laboratoires portant sur l'évolution passée du cycle du C global. Il s'inscrit également dans des collaborations internationales bien établies, portant sur l'océan austral et ses impacts sur le cycle global du C, ainsi que sur des projets d'inter-comparaison de modèles au sein de PMIP4.
Le programme de travail est divisé en quatre tâches organisées autour des objectifs et méthodes du projet. La tâche 1 est consacrée à la productivité marine et à l'efficacité de la pompe biologique à C et repose sur l’étude géochimique (COT, CaCO3, XRF, C/N, alcénones, stérols, n-alcanes, Cd-Sr-U-Ba/Ca sur foraminifères benthiques, d13Corg, d13Cforam, d18Oforam), micropaléontologique (coccolithes, foraminifères, diatomées) et sédimentologique (minéralogie des argiles et granulométrie) des carottes sédimentaires MD04-3728 et MD97-2115, respectivement prélevées dans les secteurs indien et pacifique de la zone subantarctique. La tâche 2 se focalise sur la productivité et les stocks de C terrestres pendant les terminaisons ciblées et s'appuie sur la compilation de données de pollens, COT et biomarqueurs de la littérature, ainsi que sur de nouvelles données polliniques obtenues sur les sites IODP U1385 (marge ibérique) et 1446 (Baie du Bengale). La tâche 3 vise à quantifier le flux global de productivité biologique et à contrôler les changements de pCO2 sur la base des mesures de la composition isotopique du CO2 et de l'O2 (D17O de O2, teneurs en CO2 et d13C de CO2) de l'air piégé dans les carottes de glace Epica Dome C et Beyond-Epica-Oldest Core, prélevées en Antarctique. Dans cette tâche, le projet BIOCOD vise également à finaliser le développement instrumental innovant de spectroscopie optique mené à l'IGE depuis 2021 et qui permettra la première acquisition rapide d'analyses conjointes de CO2 et de d13C de CO2 sur des échantillons de 20 g avec des incertitudes analytiques respectives de 0,04 ‰ et 1 ppm. La tâche 4 est dédiée aux modèles de productivité locaux/régionaux vs mondiaux et à leurs impacts sur les stocks et les flux de C au cours des terminaisons ciblées, en utilisant le modèle de complexité intermédiaire iLOVECLIM. Les implémentations récentes du d13C et du d18O de O2 ainsi que l'implémentation en cours du D17O de O2 dans le modèle, sont particulièrement utiles pour établir la relation existante entre la productivité biologique terrestre, marine et globale et le cycle du C. Les carottes de sédiments et de glace sélectionnées, ainsi que l’utilisation du modèle iLOVECLIM particulièrement adapté aux simulations sur plusieurs milliers d'années, permettent de travailler à des résolutions temporelles de 2-5ka sur les derniers 800 ka et de 0,3-0,5 ka au cours des terminaisons TVII, TV et TIII.
En progression
En progression
En progression
L’étude des transitions glaciaires-interglaciaires du Quaternaire est essentielle pour répondre aux défis liés aux changements climatiques actuels, car elles sont associées à des augmentations de 50-100 ppm de la concentration atmosphérique en CO2 (pCO2), en quelques milliers d'années. Cependant, interpréter quantitativement ces changements de pCO2 n’est pas encore possible car les stocks et flux de carbone associés aux principaux réservoirs du système climatique sont mal connus. En particulier, ceux impliquant la productivité biosphérique à l’interface entre atmosphère, hydrosphère et lithosphère, ont un rôle majeur sur ces changements de pCO2 atmosphérique. Dans ce cadre, BIOCOD vise à quantifier les changements de productivité biologique et leurs impacts sur les variations de pCO2 atmosphérique au cours des cycles glaciaires-interglaciaires des 800 000 dernières années, via l’étude multi-outils de carottes sédimentaires et de carottes de glaces, et via l’utilisation de modèles climatiques.
Coordinateur du projet
Madame Stéphanie DUCHAMP-ALPHONSE (Géosciences Paris-Saclay)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenaire
EPOC Ecole Pratique des Hautes Etudes Paris
IGE Institut des Géosciences de l'Environnement
GEOPS Géosciences Paris-Saclay
LSCE Centre national de la recherche scientifique
Aide de l'ANR 569 359 euros
Début et durée du projet scientifique :
décembre 2022
- 48 Mois