Nanocristaux ferroélectriques à conversion ascendante de photon pour la détection optique de potentiel électrique dans les systèmes biologiques – UFO
La plupart des cellules vivantes présente une différence de potentiel électrique de part et d’autre de leur membrane plasmique résultant de différences de concentration en ions maintenues par des canaux et pompes ioniques. La membrane d’un neurone peut être soudainement (˜1 ms) dépolarisée (son potentiel intracellulaire passant de -70 mV à +30 mV) par l’ouverture synchronisée de ces canaux, stimulée par d’autres neurones, engendrant alors un « potentiel d’action » qui se propage jusqu’aux autres cellules auxquelles ce neurone est connecté par des synapses. Le suivi de cette dépolarisation renseigne ainsi sur la transmission synaptique, essentielle aux processus cognitifs et neuromoteurs. L’approche classique consiste à mesurer l’activité électrophysiologique à l’aide de micropipettes sur quelques cellules à la fois (« patch-clamp »), ou avec un réseau de microélectrodes enregistrant alors les potentiels extracellulaires d’un ensemble de neurones.
Depuis quelques décennies, des méthodes de mesures optiques ont été introduites pour obtenir simultanément l’activité électrique d’un grand nombre de cellules simultanément avec une grande résolution. En dehors de quelques travaux exploitant la modulation d’effets électroplasmoniques de nanoparticules d’or ou de charges de nanocristaux semiconducteurs, ces méthodes présentent un certain nombre d’inconvénients (photoblanchiment, toxicité…) ou de limites quant à la mesure d’un signal électrophysiologique extracellulaire.
L’objectif de notre projet est de développer et valider biologiquement une nouvelle sonde photoluminescente du potentiel extracellulaire s’appuyant sur un mécanisme de transduction encore jamais exploré pour cette application et qui devrait aboutir à une très grande résolution spatiotemporelle. Ces sondes sont des nanocristaux ferroélectriques (NCFE) dopés avec des ions de terres rares (RE3+) dont nous détecterons la modulation spectrale de conversion ascendante de photons (up-conversion, UC) en fonction du potentiel électrique environnant. Les variations de ce potentiel, sous l’effet de l’ouverture des canaux ioniques, modifient la densité surfacique des charges de polarisation P du NCFE, faisant alors varier P qui entraine à son tour une déformation du NCFE par effet piézoélectrique inverse, induisant enfin un changement d’intensité de certaines raies d’émission d’UC. Ce processus est conforté par notre récente observation d’une telle modulation de l’UC dans un NCFE exposé à un champ électrique.
Tout d’abord, nous synthétiserons des NCFE de BaTiO3 de taille˜200 nm dopés avec des ions d’Er3+ et Yb3+ et testerons également d’autres matrices à réponse piézoélectrique plus forte, et d’autres dopants. Des calculs ab initio nous aideront à déterminer les sites cristallographiques les plus favorables pour l’incorporation des ions. Nous caractériserons l’intensité de l’UC et sa durée de vie. Ensuite, nous imagerons les domaines ferro/piezoélectriques de NCFE individuels par microscopie à force piézoélectrique (PFM) où un potentiel oscillant est appliqué à la pointe. Nous chercherons à produire des NCFE brillants monodomaines. Nous quantifierons la variation du spectre d’UC lors des mesures PFM, ainsi que sous le flux d’ions issu d’une pointe à décharge. Enfin, nous testerons la capacité des NCFE à détecter des changements de densités de charges en solution, avant de les utiliser, après biofonctionalisation, comme capteurs optiques de changements de potentiel proche des membranes lors d’une électroporation, puis pour suivre la régénérescence nerveuse.
Ce projet fortement interdisciplinaire requiert les compétences complémentaires de cinq équipes, en synthèse et caractérisation de NCFE, spectroscopie optique et microscopie à sonde en champ proche, bio-conjugaison de nanoparticules et en bioélectrochimie. Ce projet exploitant les charges de polarisation de nanosystèmes ferroélectriques permettra d'ouvrir un nouveau champ d'applications au-delà de celui biomédical.
Coordination du projet
François Treussart (Laboratoire Lumière-Matière aux Interfaces)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenaire
SPEC Service de physique de l'état condensé
LUMIN Laboratoire Lumière-Matière aux Interfaces
SPMS Structures, propriétés et modélisation des solides
METSY Aspects métaboliques et systémiques de l'oncogénèse pour de nouvelles approches thérapeutiques
ICB LABORATOIRE INTERDISCIPLINAIRE CARNOT DE BOURGOGNE - UMR 6303
Aide de l'ANR 528 416 euros
Début et durée du projet scientifique :
December 2021
- 36 Mois