Comptage et spectroscopie électron alpha dans un cube de silicium – SEASON
L’étude du noyau atomique dans ses configurations les plus extrêmes, en asymétrie du nombre de protons (Z)/nombre de neutrons (N), en énergie d’excitation ou en masse, est un axe majeur de la physique nucléaire fondamentale contemporaine. En effet, le noyau, poussé dans ses retranchements, adopte un comportement caractéristique qui révèle sa structure sous-jacente. Ces études sont cependant confrontées à des difficultés expérimentales, comme c’est le cas dans la région des noyaux lourds (HN, Z > 88) et superlourds (SHN, Z > 103) où les réactions de fusion-évaporation mises en jeu pour produire ces noyaux peuvent présenter des section-efficaces très faibles et où les objets produits sont éphémères, car très instables. Ainsi, peu de données expérimentales sont disponibles et la structure de ces noyaux reste mal connue. De plus, les modèles théoriques ne reproduisent pas correctement les observations, et ne s’accordent pas sur la prédiction d’un éventuel « îlot de stabilité superlourds » ni sur les limites de stabilité de la matière nucléaire. Dans ce contexte, des données expérimentales robustes, pouvant servir de points d’ancrage aux modèles, sont nécessaires.
Dans un futur proche, grâce aux faisceaux de haute intensité délivrés par le « Super Separator Spectrometer (S3) » à GANIL/SPIRAL2, il sera possible de produire des HN/SHN avec des intensités 15 à 20 fois plus grandes que celles des faisceaux des installations existantes. Ces nouveaux faisceaux offriront la possibilité d’aller sonder la structure des HN/SHN, dont la spectroscopie détaillée n’était pas accessible jusqu’à présent. Au plan focal de S3, le dispositif expérimental « low energy branch (LEB) » permettra de réaliser la spectroscopie par ionisation laser de nombreux noyaux sélectionnés par S3. Cette technique permet, via la mesure de la structure hyperfine du spectre de l’atome et de son décalage isotopique/isomérique, de déduire les caractéristiques de l’état fondamental d’un noyau, ou d’un état isomérique, indépendamment des modèles nucléaires, apportant ainsi un regard nouveau sur les études spectroscopiques.
Le but du projet SEASON est de réaliser la spectroscopie de ces HN/SHN, dans leur état fondamental ou isomérique, en utilisant une approche pionnière : la confrontation des observables mesurées par spectroscopie par ionisation laser (technique de physique atomique) avec les résultats obtenus par spectroscopie retardée (technique de physique nucléaire). Ce projet n’est possible qu’en développant un détecteur qui permettra d’acquérir les données des deux approches. Il s’agit donc de concevoir un détecteur qui i) comptera les produits issus de l’ionisation laser pour mesurer la structure hyperfine et le décalage isotopique/isomérique et ii) permettra de réaliser simultanément la spectroscopie (alpha, électron de conversion et gamma) de décroissance des noyaux implantés. Cette nouvelle technique expérimentale fournira des contraintes fortes sans précédent sur les modèles de structure nucléaire.
Le second but du projet SEASON est d’effectuer une première expérience auprès de S3/LEB avec le détecteur SEASON. Pour cela nous proposons de réaliser la spectroscopie par ionisation laser des isotopes 225,226,227,228U, ainsi que, simultanément, leur spectroscopie de décroissance. Ce cas physique est particulièrement intéressant car plusieurs calculs théoriques prédisent des déformations octupolaires fortes dans cette région des actinides déficients en neutrons. Étant donné la difficulté à produire ces faisceaux, la spectroscopie par ionisation laser n’a jamais été réalisée pour ces isotopes, et peu de données issues des techniques de physiques nucléaires standards existent pour ces noyaux.
Au-delà de cette première expérience, toute la communauté qui réalisera des expériences auprès de S3/LEB pourra bénéficier de la double approche expérimentale accessible avec SEASON pour aller étudier la structure de nombreux HN/SHN, des Ac (Z = 89) au Rf (Z = 104).
Coordinateur du projet
Madame Marine Vandebrouck (Institut de Recherche sur les lois Fondamentales de l'Univers)
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Partenaire
IRFU Institut de Recherche sur les lois Fondamentales de l'Univers
Aide de l'ANR 448 248 euros
Début et durée du projet scientifique :
- 48 Mois