Rôle du système moteur dans la perception de la parole : mécanismes neuronaux et bénéfices comportementaux – MotorSpeech
Rôle du système moteur dans la perception de la parole : mécanismes neuronaux et bénéfices comportementaux
L’objectif de ce projet est l’exploration d’une stratégie motrice active pour faciliter la perception de la parole dans le bruit.
Etude d'une stratégie motrice manifeste pour faciliter la perception de la parole
Le leitmotiv de cette recherche est l'étude de la stratégie motrice manifeste pour faciliter la perception de la parole dans un environnement bruyant. L'écoute de la parole active les régions corticales du système sensorimoteur. Le rôle fonctionnel de ces régions dans le traitement de la parole, ainsi que les conditions de leur implication sont fortement débattus. Leur rôle dans le traitement linguistique a fait l'objet de nombreuses recherches, mais leur rôle supposé dans l'analyse de la dynamique temporelle du signal de parole a été largement négligé. Cependant, des études sur la perception de la parole dans des conditions d'écoute défavorables - comme un environnement bruyant et multilocuteur - montrent que le suivi des modulations temporelles du signal de parole d'un locuteur d'intérêt facilite la compréhension de la parole. Nous avons récemment développé l'hypothèse que le système moteur est directement impliqué dans le traitement de l'information temporelle auditive et montré que pendant la perception d'un flux rythmique auditif, la segmentation temporelle de l'information auditive est améliorée lorsque les participants produisent des mouvements rythmiques manifestes par rapport à ceux qui restent immobiles. Dans cette proposition, nous chercherons à savoir si ces effets, observés lors du traitement auditif, se traduisent dans le traitement de la parole. La parole est en effet par essence un signal temporel, structuré selon une hiérarchie d'échelles de temps (phonème, syllabe, mot, phrase). Nous faisons l'hypothèse que la principale contribution des aires motrices au traitement de la parole concerne leur implication dans l'analyse de certaines dynamiques temporelles de la parole, fournissant un cadre temporel contextuel aux régions auditives et frontales distantes qui traitent l'information linguistique. De plus, nous caractériserons les conditions acoustiques dans lesquelles l'activité motrice contribue de manière optimale à la perception de la parole, en manipulant deux dimensions acoustiques principales supposées moduler l'implication motrice : le rapport signal/bruit de la parole et le débit de la parole. Ainsi, nous définirons si, quand et comment le système moteur et l'activité motrice manifeste contribuent au traitement de la parole.
Nous adapterons des paradigmes comportementaux qui ont déjà prouvé leur efficacité avec des enregistrements de magnétoencéphalographie (MEG) et d'EEG stéréotaxique des profondeurs humaines (sEEG) - qui permettent d'observer l'activité neuronale du cerveau entier résolue dans le temps chez l'homme - ou la stimulation magnétique transcrânienne (TMS) - une méthode qui permet d'activer sélectivement des portions spécifiques du cortex humain. Chaque étude MEG et TMS sera menée sur environ 30 participants en bonne santé, afin d'éviter les problèmes liés à la petite taille des échantillons. Il est important de noter que les enregistrements MEG et sEEG seront acquis sur les mêmes paradigmes et que les mêmes pipelines d'analyse seront appliqués aux deux ensembles de données. D'une part, la MEG permet de couvrir l'ensemble du cerveau et d'effectuer facilement des analyses statistiques sur un grand nombre de participants. Elle apporte une contribution unique à notre compréhension approfondie des dynamiques cérébrales régionales et à grande échelle. D'autre part, le signal SEEG fournit des informations anatomiquement précises sur l'engagement sélectif fonctionnel des populations neuronales à l'échelle du millimètre et sur la dynamique temporelle de leur engagement à l'échelle de la milliseconde, ce qui est nécessaire pour décrire avec précision les fondements neurophysiologiques d'un processus cognitif spécifique. Cette combinaison offre donc une occasion unique de représenter avec précision les fondements neurophysiologiques d'un processus cognitif spécifique.
- Le cortex moteur est activé pendant la perception naturelle de la parole, même dans le calme.
- Le principal facteur qui influe sur la compréhension de la parole est le débit syllabique de la parole. La compréhension de la parole est bonne lorsque le débit syllabique est inférieur à 15 syllabes par seconde, mais elle chute radicalement pour les débits syllabiques plus élevés.
- Le fait de bouger peut améliorer la compréhension de la parole dans des conditions d'écoute défavorables, mais seulement si les mouvements se produisent au taux lexical, qui est d'environ 2 Hz.
À suivre
1. Jérémy Giroud, Jacques Pesnot Lerousseau, François Pellegrino, Benjamin Morillon. The channel capacity of multilevel linguistic features constrains speech comprehension. Cognition, 2023, 232, pp.105345. ?10.1016/j.cognition.2022.105345?. ?hal-03880586?
2. N te Rietmolen, M Mercier, A Trebuchon, B Morillon, D Schön. Speech and music recruit frequency-specific distributed and overlapping cortical networks. bioRxiv, 2022.10. 08.511398
L’objectif de ce projet est l’exploration d’une stratégie motrice active pour faciliter la perception de la parole dans le bruit. Écouter des sons de parole induit l’activation de régions corticales sensorimotrices, mais leur rôle fonctionnel ainsi que les conditions de leur implication restent fortement débattus. Dans des conditions d’écoutes défavorables, nous suivons le flux, la dynamique temporelle du signal de parole pour compenser le déficit de compréhension. De plus, ce mécanisme se renforce avec l’âge, une attention descendante sélective plus soutenue permettant de compenser une information acoustique ascendante dégradée. Nous avons récemment montré que l’information temporelle est traitée par le système moteur et que bouger en rythme permet d’optimiser la qualité de l’information temporelle et d’augmenter son influence sur le traitement sensoriel.
Dans ce projet, nous allons étudier si ces effets, observés durant la perception de sons purs, sont aussi présents lors de la perception de la parole. La parole est un signal temporel structuré selon une hiérarchie de rythmes (phonème, syllabe, mot, phrase). Nous faisons l’hypothèse que la principale contribution des aires motrices dans le traitement de la parole a trait à l’analyse de certains de ces rythmes de parole, ce qui permettrait de fournir un cadre contextuel aux aires auditives et frontales qui traitement l’information linguistique. De plus, nous allons caractériser les conditions dans lesquelles l’activité motrice contribue maximalement à la perception de la parole. Ainsi, nous allons définir si, quand, et comment le système moteur et une ‘perception active’ contribuent au traitement de la parole.
Ce projet sera réalisé à travers quatre expériences complémentaires de neurosciences cognitives chez des participants sains. 1. Premièrement, nous étudierons avec des enregistrements en magnétoencéphalographie (MEG) et intra-crâniaux EEG (sEEG) la contribution des aires motrices dans le traitement des rythmes de la parole. Les corrélats neuronaux des rythmes phonémiques, syllabiques, des mots et des phrases seront caractérisés. 2. Dans une étude regroupant comportement, sEEG et MEG, nous allons ensuite étudier les conditions dans lesquelles les aires motrices contribuent de manière optimale à la perception de la parole. Nous manipulerons deux dimensions acoustiques fondamentales : le ratio signal sur bruit (SNR) et la vitesse de locution. L’impact de ces manipulations sur l’activité motrice et sur la compréhension sera établi. 3. Sur la base de ces résultats, dans une autre étude comportement-sEEG-MEG, les participants effectueront une tâche de compréhension, soit en restant immobile, soit en bougeant au rythme syllabique, des mots, ou des phrases. Nous quantifierons l’impact d’une stratégie d’écoute active sur la compréhension verbale et décrirons ses manifestations au niveau neuronal. 4. Enfin, dans une étude utilisant la stimulation magnétique transcrânienne (TMS) nous isolerons la (ou les) composante motrice requise pour optimiser le traitement de la parole, en dissociant la contribution de l’intention d’agir, de l’acte moteur, et du retour somatosensoriel dans l’optimisation de la perception auditive.
Ce projet porte à la fois sur des questions de recherche fondamentale en neurosciences cognitives et sur le développement d’une nouvelle stratégie comportementale permettant d’améliorer la compréhension de la parole dans le bruit. À l’issue de ce projet, nous devrions être capable de proposer une nouvelle théorie motrice de la perception de la parole, plus précise et ancrée neuro-physiologiquement. L’objectif à long terme de ce projet est de proposer une stratégie comportementale pour aider les personnes à mieux comprendre la parole, notamment dans le bruit. Ce projet va donc en particulier questionner l’efficacité d’une intervention non-médicale dédiée à l’amélioration de la compréhension de la parole.
Coordination du projet
Benjamin Morillon (Institut de Neurosciences des Systèmes)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenaire
INS Institut de Neurosciences des Systèmes
Aide de l'ANR 327 240 euros
Début et durée du projet scientifique :
décembre 2020
- 48 Mois