Etude de la plasticité et du potentiel de différentiation des cellules des zones de transition pendant l’homéostasie normale et perturbée – StemTZones
Zone de transition épithéliale : gardienne de l’homéostasie tissulaire
Les épithéliums sont reliés entre eux par des jonctions nommées zones de transition. On en trouve à différents endroits dans le corps comme entre l'anus et le rectum et l’estomac. Chez l'homme et la souris ces régions sont similaires et sont susceptibles de développer des cancers agressifs rendant primordial la compréhension des propriétés des cellules de ces régions.
Caractérisation cellulaire et moléculaire de la zone de transition anorectale et de l'estomac en condition normale et d’homéostasie perturbée
Les zones de transition (ZT) retrouvées dans notre organisme représentent une région intermédiaire entre deux types d’épithéliums. Elles ZT assurent la continuité de nos tissus, il est donc essentiel de comprendre leur fonction dans le maintien de l’homéostasie épithéliale. Notre hypothèse de travail est que les cellules des ZT contribuent au maintien des différents épithéliums et sont les cibles de dérégulations. Les objectifs principaux du projet visent à identifier les mécanismes régulant l’homéostasie tissulaire aux ZT anorectales et de l’estomac et de définir les mécanismes dérégulés pendant les états blessés qui peuvent représenter la phase précoce des maladies.
Nous avons développé une approche multidisciplinaire incluant des modèles génétiques murins pour pouvoir suivre en temps réel le devenir des cellules souches de la ZT au sein du tissu entier, du transcriptome de cellule unique pour caractériser l’hétérogénéité cellulaire de la ZT, et des cultures d’organoïdes tridimensionnelles pour caractériser les cellules le la ZT anorectale lors du développement et suite à des blessures. Le modèle génétique murin utilise le marqueur spécifique de la ZT, la Kératine 17, permettant de suivre in vivo le devenir des cellules en condition physiologique et de blessure.
Nous avons mis en évidence une nouvelle population de cellule souche au niveau de la membrane basale de la ZT anorectale positive pour la kératine 17 ayant des capacités d’unipotence en condition d’homéostasie en maintenant l’épithélium du canal anal. Toutefois, lorsqu’une blessure survient dans la région anorectale, les cellules souches de la ZT, en plus de réparer le canal anal, sont capables de réparer et de donner naissance à des cellules du rectum faisant de la zone de transition une véritable gardienne de l’homéostasie tissulaire. Nous avons aussi cultivé des organoïdes de ZT anorectales pour la première fois (structures in vitro en trois dimensions, réalisées avec les cellules souches et qui reproduisent les tissus étudiés), qui représentent des outils innovants et indispensables pour valider les résultats in vivo.
Notre étude suggère que lors du développement des épithéliums adultes, une région contenant des cellules souches, existe entre chaque épithélium, créant ainsi un réservoir de sauvegarde/d’urgence dans le cas où l’un des épithéliums environnants venait à manquer de ses propres cellules souches.
Nos épithéliums se renouvellent en permanence. Pour cela, ils disposent de leurs propres cellules souches, mais si ces dernières viennent à manquer, celles de la zone de transition peuvent venir en renfort. C’est une sorte de réservoir d’urgence qui assure l’homéostasie – l’équilibre – tissulaire. Nos découvertes ouvrent donc la voie à de nombreuses perspectives aussi bien au niveau de la médecine régénérative qu’au niveau de la compréhension même des phénomènes anormaux régissant les transformations malignes.
Nous continuons à caractériser une autre ZT qui est celle de l'estomac afin de déterminer si dans une autre région, les cellules kératine 17+ ont un rôle similaire de protection.
Enfin si chaque épithélium environnant la ZT a ses propres cellules souches à quoi donc sert cette transition ? Est-ce simplement une barrière séparant deux épithéliums différents ? Pour répondre à ces questions nous tentons d’éliminer cette ZT en utilisant des modèles génétiquement modifiés afin de déterminer si les épithéliums environnants sont affectés par cette délétion ou si un phénomène d’adaptation tissulaire (plasticité) peut être envisagé.
Mitoyan L, Chevrier V, Hernandez-Vargas H, Ollivier A, Homayed Z, Pannequin J, Poizat F, De Biasi-Cador C, Charafe-Jauffret E, Ginestier C, and Guasch G. A stem cell population at the anorectal junction maintains homeostasis and participates in tissue regeneration after injury. Nature Communications 2021 12(1):2761.
Alexane Ollivier, Maxime Mahé, Géraldine Guasch Modeling gastrointestinal diseases using organoids to understand healing and regenerative processes. Cells. 2021,10, 1331
Mitoyan L, Gard C, Nin S, Loriod B, Guasch G. Defining anorectal transition zone heterogeneity using single-cell RNA sequencing. Methods Mol Biol. 2022 In press
Thèse de Louciné Mitoyan «Rôle des cellules souches de la zone de transition dans le maintien des tissus épithéliaux en condition normale et cancéreuse » soutenue le 13 octobre 2021
Dans l'épithélium adulte, les cellules souches maintiennent l'homéostasie et réagissent aux blessures, un processus essentiel pour le maintien des organes. À de nombreux endroits du corps, les zones de transition se situent entre deux types d'épithélium, contiennent des cellules ayant des propriétés de cellules souches et sont fréquemment associées à des maladies congénitales rares comme des malformations anorectales de type cloaque et représentent un site privilégié pour le développement d’ulcères. Ces jonctions entre nos organes assurent la continuité de nos tissus, il est donc essentiel de comprendre leur fonction dans le maintien de l’homéostasie épithéliale. StemTZones remet en question l'idée que chaque épithélium est maintenu par son propre pool de cellules souches. Nous émettons l'hypothèse qu'un réservoir de cellules souches multipotentes, participant au maintien des deux types épithéliaux, existe dans ces zones de transition et représente une barrière contre la métaplasie définie par le remplacement d'un type de cellules par un autre et précédant fréquemment la progression de la dysplasie vers le cancer. Comprendre si les cellules des zones de transition représentent une nouvelle population de cellules capables de maintenir l'épithélium environnant est une question centrale pour de nombreux tissus régénératifs. Plus important encore, le décryptage des caractéristiques uniques et communes des cellules des zones de transition devrait nous permettre de mieux comprendre la susceptibilité tumorale fréquente de ces régions.
Le projet StemTZones utilisera de nouvelles méthodes que nous avons récemment mises au point pour marquer et suivre spécifiquement les cellules des zones de transition au cours du développement par un traçage cellulaire combiné à une approche multidisciplinaire intégrant la génétique des souris, la bioinformatique, la biologie du développement, le profil transcriptionnel et les expériences fonctionnelles en culture tridimensionnelle.
Les objectifs spécifiques StemTZones sont les suivants 1) déterminer le potentiel de différenciation et le devenir des cellules des zones de transition de l'estomac et des régions anorectales pendant la régénération des tissus adultes et après une blessure ; 2) identifier les mécanismes moléculaires de régulation par lesquels les cellules souches des zones de transition maintiennent l'homéostasie et répondent aux blessures ; et 3) définir la contribution des cellules des zones de transition au maintien de l'homéostasie de l'épithélium environnant par ablation génétique sélective.
Coordination du projet
Geraldine GUASCH (Centre de recherche en cancérologie de Marseille)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenaire
CRCL Centre de Recherche en Cancérologie de Lyon
IGF Institut de génomique fonctionnelle
CRCM Centre de recherche en cancérologie de Marseille
Aide de l'ANR 528 038 euros
Début et durée du projet scientifique :
novembre 2020
- 36 Mois