GENO - Appel Spécifique Génocides et violences de masse

Face à l'irréparable: Une histoire comparée des survivants des génocides des Arméniens et des Tutsi – FALI

Résumé de soumission

Face à l’irréparable
Une histoire comparée des survivants des génocides des Arméniens et des Tutsi


Ce projet ambitionne d’étudier conjointement deux configurations génocidaires n’ayant jamais fait l’objet, à ce jour, d’une enquête comparative. Deux entreprises d’extermination mises en œuvre à l’orée puis à la toute fin du XXe siècle, et visant les Arméniens ottomans tout d’abord, les Tutsi du Rwanda ensuite.
De part et d’autre du « siècle des génocides », dont la centralité est occupée par la destruction des juifs d’Europe, ces événements font encore l’objet d’un déficit cognitif important. À cela, un intérêt moindre, ou relativement récent, du monde académique pour des crimes jugés lointains dans le temps (cas arménien) comme dans l’espace — extra-européen — où ils ont été commis. Des crimes souffrant, en outre, de préjugés condescendants quant à la rationalité de leurs fondements idéologiques, de leurs préparatifs et de leur exécution. Autre obstacle notable, la difficulté d’accès aux sources primaires : leur étude implique non seulement la maîtrise de langues rares, mais encore une certaine faculté à identifier leur localisation, tant à l’échelle d’un pays comme le Rwanda, où leur archivage fait l’objet d’un soin réel mais incomplet, qu’à l’échelle d’un vaste archipel transnational dans le cas de la diaspora arménienne. Une indéniable dimension patrimoniale régit ce programme de recherche, conscient d’avoir à relever, autant que possible, le défi très concret du sauvetage d’« archives survivantes ».
Le matériau documentaire comporte une fragilité supplémentaire, qui n’est pas sans rapport avec la catégorie de population civile privilégiée par ce projet, à savoir les survivants arméniens et tutsi. Au vrai, les archives des institutions de secours regorgent d’informations sur les rescapés, dont les silhouettes passent dans les rapports détaillant les soins médicaux, l’aide humanitaire et les politiques de soutien apportées. C’est néanmoins dans une autre perspective que ce programme souhaite s’adresser à cette documentation, somme toute classique, des lendemains de violence, tout en lui adjoignant des sources plus modestes, tirées du quotidien, collectées au plus près de l’expérience individuelle. Croisant alors le champ des pratiques et celui des subjectivités, la réflexion entend contribuer à la connaissance de la violence génocidaire depuis le vécu de celles et ceux qui, chaque jour, s’affrontent à l’irréparable.
L’approche critique du postulat de « reconstruction » implique d’informer très finement les conditions dans lesquelles les survivants ont renégocié leur place d’acteurs sociaux, mais aussi de sujets. Pour ce faire, il sera prêté intérêt aux dimensions matérielle (axe 1), familiale (axe 2), puis corporelle et psychique (axe 3) de leurs existences, celles-ci se déroulant, pour les Arméniens collectivement chassés de Turquie, dans les pays de l’exil ; pour la majorité des Tutsi, dans une proximité immédiate avec les tueurs de leur famille ; et chaque fois, dans un monde devenu étranger. Comment vivre alors, après que la vie a rencontré la mort de masse ? Comment se relever, et en s’aidant de quels ressorts interpersonnels, collectifs et symboliques ? Comment retrouver un statut social, juridique — et lequel ? Comment et où réinscrire ses trajectoires résidentielles, migratoires, ou encore matrimoniales ? Enfin, que peut apporter à l’historiographie de la « sortie » des violences la réalité des morts différées, survenues longtemps après que les armes se soient tues, dans les camps de réfugiés arméniens ou dans le silence des collines rwandaises ?

Coordination du projet

Hélène Dumas (Centre d'études sociologiques et politiques Raymond Aron)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

CESPRA Centre d'études sociologiques et politiques Raymond Aron
IRIS Institut de recherche interdisciplinaire sur les enjeux sociaux Sciences sociales, Politique, Santé
IHTP Institut d'histoire du temps présent

Aide de l'ANR 206 363 euros
Début et durée du projet scientifique : December 2019 - 24 Mois

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