CE41 - Inégalités, discriminations, migrations

Economie politique du colonialisme – COLECOPOL

Résumé de soumission

Ce projet cherche d’abord à construire une nouvelle économie politique du colonialisme aux XIXè et XXè siècles. Elle sera basée sur l’étude du cas français avec à l’esprit les autres empires coloniaux. Notre hypothèse de recherche est que le colonialisme bénéficia à une minorité d’acteurs influents politiquement et économiquement, dans la métropole ou localement. Sa longévité et ses transformations pourraient s’expliquer par le succès et l’évolution de coalitions pro-coloniales. Le colonialisme étant un phénomène global, sa compréhension implique de considérer le « plan global » plutôt que de se focaliser sur une région colonisée particulière ; plusieurs agents étaient engagés ou représentés dans des territoires multiples, si bien que les plans élaborés pour un endroit n’étaient pas indépendants de ceux faits pour un autre. Enfin, les analyses antérieures du colonialisme ont accordé trop peu d’attention à l’action des colonisés, ne serait-ce que les élites autochtones, aussi contraintes qu’aient été leurs marges de manœuvre. L’analyse combinera deux vastes bases de données couvrant la période du “second” Empire colonial français (1830-1962), sur l’administration et le développement des colonies d’une part, sur les entreprises cotées en Bourse d’autre part. Nos travaux récents sur les Etats coloniaux et les inégalités seront complétés par l’étude du capital privé et de ses profits, afin de reconstituer la répartition des bénéfices et des coûts de l’Empire entre capitalistes métropolitains, colons, minorités commerçantes, élites et populations autochtones. Des données de réseaux d'acteurs permettront de caractériser l’action d’un lobby colonial. Un second objectif du projet consiste à examiner comment l’économie politique du colonialisme a survécu à sa fin officielle et comment son analyse peut aider à comprendre l’état du monde contemporain. Les Etats indépendants ont hérité de structures coloniales qu’ils n’ont pu que progressivement réformer. Plusieurs entreprises coloniales sont toujours en vie et ont ouvert la route à de nouveaux investissements provenant de l’ancienne métropole. Les réseaux se sont aussi perpétués au fil des générations. Les flux de migration internationale, mais aussi la fuite de capitaux, restent orientés vers les anciennes métropoles. Cependant le « tropisme postcolonial » est aussi mis en question par de nouvelles concurrences, provenant d’Etats, de firmes ou d’Eglises. Plus généralement, même si le développement économique et les inégalités suivent des trajectoires de long terme, les situations postcoloniales sont très diverses ; en particulier, les pays n’ont pas géré de la même façon l’héritage colonial du dualisme des marchés du travail, de la terre, du crédit, ou de l’accès à la justice. Notre hypothèse de recherche est ici que certaines différences idiosyncratiques dans l’économie politique de la période coloniale, ainsi que dans les caractéristiques de la décolonisation, peuvent rendre compte pour partie de cette diversité de trajectoires. Ces différences ont émergé de l’interaction entre les caractéristiques précoloniales et les configurations du colonialisme. La nationalisation du capital et/ou de la terre, le défaut sur la dette coloniale, la rupture de l’ancrage monétaire à la métropole, le rejet de l’aide bilatérale ou de l’assistance technique, le protectionnisme et la substitution d’importation sont des politiques qui ont été plus appliquées par certains pays que par d’autres. A l’inverse, les programmes d’ajustement structurel des années 1985-1995 ont représenté un tournant critique où certaines de ces politiques ont été remises en cause, avec la privatisation et la libéralisation des économies. Nous essaierons d’évaluer jusqu’à quel point ces séries de transformations, additionnées à la compétition d’autres puissances, ont engendré une atténuation de l’empreinte coloniale, du côté des ressources et des politiques des Etats, de la propriété du capital et des inégalités.

Coordination du projet

Denis COGNEAU (ECOLE D´ ECONOMIE DE PARIS)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

EEP ECOLE D´ ECONOMIE DE PARIS
LEDA LABORATOIRE D'ECONOMIE DE DAUPHINE

Aide de l'ANR 348 750 euros
Début et durée du projet scientifique : septembre 2019 - 48 Mois

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