Les villes de la nouvelle route de la soie en Asie du Sud-Est – VinoRosa
Alors que les études sur la Belt and Road Initiative (BRI) - l’ambitieux programme d’internationalisation du développement économique chinois lancé en 2013 - sont nombreuses dans le domaine des sciences politiques et de l’économie, ses effets urbains sont encore méconnus, comme la majorité des projets qui lui sont associés sont encore sur le papier ou en phase de chantier. VinoRosa ouvre une piste d’investigation prometteuse pour les années à venir : il interroge le rôle de la BRI en tant que levier de l’internationalisation et du développement des villes secondaires d’Asie du Sud-Est continentale concernées par ses corridors. Dans ces villes, les effets de la BRI s’annoncent importants grâce à des dynamiques urbaines émergentes, dépendantes de l’aide internationale et de programmes de coopération. VinoRosa questionne le rôle performatif de deux discours concurrentiels - l’un axé sur le développement urbain durable et l’autre sur la croissance économique véhiculée par l’investissement - qui sous-tendent la BRI et orientent les politiques urbaines, les plans d’urbanisme, les programmes des bailleurs des fonds et les tactiques d’investissement.
Trois hypothèses orientent cette recherche. Elles sont sous-tendues par une réflexion plus générale sur la montée en puissance d’acteurs transnationaux chinois dans la fabrique urbaine en Asie du Sud-Est :
1. Les connaissances urbaines, modèles et modes d’urbanisation circulant entre la Chine et l’Asie du Sud-Est sont localisés dans les villes au prisme d’un vaste spectre de spécificités. En outre, la BRI catalyse les coopérations inter-urbaines, favorisant l’émergence de modèles urbains qui participent à la construction régionale à l’échelle de l’Association des Nations d’Asie du Sud-Est (ASEAN).
2. L’ascension d’acteurs urbains chinois génère des équilibres socio-politiques et économiques qui négocient les enjeux et la balance des pouvoirs en matière urbaine, contribuant à la multiplication des arènes décisionnelles et à la formation de coalitions concurrentielles.
3. Des logiques d’aménagement empreintes des idéologies développementaliste et néoliberale rationalisent l’espace urbain pour qu’il puisse gérer et articuler les flux de capitaux, marchandises et personnes.
Les membres de l’équipe - sept géographes et architectes-urbanistes spécialistes de l’Asie du Sud-Est et de la Chine - développeront une approche comparative relationnelle restituant la spécificité des trajectoires urbaines de cinq villes : Chiang Mai (Thaïlande) ; Haiphong (Vietnam) ; Mandalay (Birmanie) ; Melaka (Malaisie) et Sihanoukville (Cambodge).
Au croisement de l’analyse critique des discours, de l’anthropologie du développement, de la géographie sociale et de la morphologie architecturale et urbaine, notre méthodologie prévoit des enquêtes articulant les échelles transnationale, régionale et locale. Elle comporte également des mesures (parmi lesquelles, une veille des projets urbains liés à la BRI à l’échelle de l’ASEAN) qui traiteront deux risques prévisibles : l’interaction de la BRI avec d’autres leviers du développement (programmes régionaux, aide au développement, investissements étrangers) et le caractère encore incertain de la stratégie chinoise, qui pourrait impliquer l’abandon de certaines initiatives mais aussi le lancement de nouveaux projets urbains.
L’impact global de VinoRosa est triple : 1. Interroger la spécificité des modèles d’urbanisme durable et intelligent au prisme d’expériences menées en Chine, ainsi que les modalités de leur transfert et adaptation dans les villes d’Asie du Sud-Est ; 2/. Produire une connaissance critique sur les démarches et les logiques d’aménagement urbain véhiculées par la BRI, qui pourrait alimenter la conception de plans et outils de gouvernance pour les villes de corridors ; 3. Contribuer au renouvellement de la recherche urbaine et aérale, en questionnant le rôle de l’intensification des circulations internationales dans la fabrique des villes secondaires.
Coordination du projet
Adèle ESPOSITO (Institut de Recherche sur l'Asie du Sud-Est Contemporaine)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenaire
IRASEC Institut de Recherche sur l'Asie du Sud-Est Contemporaine
Aide de l'ANR 300 672 euros
Début et durée du projet scientifique :
December 2019
- 48 Mois