LIPOLYSE ET QUALITE DU LAIT : VERS UNE MEILLEURE COMPREHENSION DES MECANISMES MOLECULAIRES CONTROLANT LA DEGRADATION DE LA MATIERE GRASSE LAITIERE – LIPOMEC
LIPOMEC
Vers une meilleure compréhension des mécanismes contrôlant la dégradation de la matière grasse laitière
LIPOMEC: premier programme de biologie intégrative pour mieux comprendre la lipolyse chez les ruminants
La dégradation de la matière grasse laitière ou lipolyse conduit à la libération d’acides gras libres dans le lait dont l’oxydation provoque l’apparition de goût rance mal toléré par la plupart des consommateurs. Au-delà des aspects directement liés à la consommation, la lipolyse impacte également l’aptitude du lait à la transformation, et elle représente donc un critère important d’évaluation de la qualité du lait. Il existe trois types de lipolyse : la lipolyse spontanée (dépendante de l’animal et des facteurs d’élevage), la lipolyse induite (liée à la traite et au stockage du lait), et la lipolyse microbienne (due à l’action des enzymes microbiennes). Les objectifs de LIPOMEC sont (i) d’identifier les facteurs responsables de taux élevés de lipolyse dans le lait (ii) de mieux comprendre la lipolyse dans le lait et la glande mammaire des ruminants (vache, chèvre, brebis) par une approche de biologie intégrative (iii) de développer des outils et des méthodes pour estimer et réduire la lipolyse « de la mamelle au fromage ».
LIPOMEC combine des approches de zootechnie, de biologie intégrative (omics), de biophysique, de biostatistiques, de modélisation mathématique pour limiter la lipolyse, «de la mamelle au fromage«.
La lipolyse est un critère important de qualité du lait. Ce critère de qualité est actuellement évalué sur lait de mélange (lait de tank) par une équation d’estimation basée sur la spectrométrie moyen infra rouge (MIR). Cette équation n’est pas utilisable sur des échantillons de lait individuels. LIPOMEC a permis le développement d’une équation de prédiction de la lipolyse sur le lait individuel de vache et de chèvre. Les applications éventuelles de cette invention sont :
• L’estimation de la lipolyse du lait par MIR à l’échelle individuelle (animal) pour le suivi du troupeau ;
• Son utilisation comme critère de sélection génétique conjointement avec d’autres critères de qualité du lait.
D’autre part, l’impact de plusieurs facteurs d’élevage sur le taux de lipolyse du lait ont été évalués. L’impact d’une restriction alimentaire sur le taux de lipolyse du lait a été évalué chez les 3 espèces de ruminants (vache, chèvre, brebis) et des particularités propres à chaque espèce ont pu être démontrées. Chez la vache, des expérimentations supplémentaires ont montré l’impact de la fréquence et de l’intervalle de traite sur le taux de lipolyse du lait.
Enfin, les premiers résultats des analyses de protéomique chez la vache laitière ont permis d’identifier, grâce à une approche biostatistique très originale, des signatures moléculaires de la lipolyse dans le lait, en particulier deux protéines qui pourraient bien devenir des biomarqueurs de lipolyse.
Un programme de finalisation des résultats obtenus au cours du programme LIPOMEC est en cours de réflexion au sein du consortium. L’objectif de ce programme de finalisation est d’atteindre un niveau de TRL (Technology Readiness Level) supérieur à 7 (TRL 7-9 : démonstration et validation de l’invention dans un environnement opérationnel).
Les résultats du programme LIPOMEC ont déjà fait l’objet de plusieurs communications orales et posters dans des congrès nationaux (Rencontres Recherches Ruminants (3R) 2020 & 2022) et internationaux (congrès EAAP -European Federation of Animal Science- 2020 & 2022 ; congrès FAO-CIHEAM 2022, congrès ICAR/Interbull …) Plusieurs articles scientifiques sont en cours de finalisation. En outre, deux déclarations d’invention INRAE pouvant donner lieu éventuellement à des brevets sont en cours d’instruction.
La maîtrise de la lipolyse du lait constitue un des enjeux majeurs auxquels doit faire face la filière laitière. La libération d’acides gras libres et leur éventuelle oxydation dans le lait conduisent au développement d’une flaveur jugée intolérable par le consommateur au-delà d’un certain seuil (1,2 mEq/100 g de matière grasse). Les laits qui présentent un taux élevé de lipolyse ne sont donc pas commercialisables sous forme de lait de boisson, et ont également des inaptitudes technologiques à la transformation. En pratique, un indice de lipolyse a été mis en place pour évaluer la qualité des laits et est utilisé actuellement pour le paiement du lait dans certaines régions. Cet indice englobe la lipolyse spontanée [dégradation hydrolytique de la matière grasse laitière par des lipases naturelles, principalement, la lipoprotéine lipase (ou LPL)], la lipolyse induite (due aux chocs thermiques et mécaniques) et la lipolyse microbienne (associée à de la contamination microbienne).
La question principale à laquelle doit répondre le projet LIPOMEC est celle-ci : « Comment limiter la lipolyse dans le lait et les produits laitiers ?» Autrement dit, comment résoudre les problèmes de lipolyse rencontrés par les éleveurs de vaches laitières, de chèvres et de brebis dans un système d’élevage de précision ? Comment optimiser les pratiques des éleveurs et la sélection génomique pour réduire la lipolyse dans le lait de ruminants, tout en conservant un lait répondant aux exigences des transformateurs laitiers ?
Pour atteindre ces objectifs, nous nous proposons de :
- Hiérarchiser les facteurs responsables des niveaux élevés de lipolyse dans le lait, parmi les paramètres génétiques, les pratiques agricoles et le système de traite,
- Améliorer la compréhension du système lipolytique, constitué par l'enzyme lipoprotéine lipase, son substrat (le globule gras du lait) et les cofacteurs (activateurs et inhibiteurs), chez les trois espèces laitières à travers la caractérisation des réseaux régulateurs de la lipoprotéine lipase dans le lait et / ou dans les cellules épithéliales mammaires,
-Développer des outils et des méthodes pour mesurer et réduire la lipolyse « de la mamelle au fromage ».
LIPOMEC est le premier projet à grande échelle pour étudier les mécanismes de lipolyse dans le lait et la glande mammaire dans les trois espèces d’intérêt agronomique : vache, chèvre et brebis.
Coordinateur du projet
Madame Christelle CEBO (Génétique Animale et Biologie Intégrative)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenaire
UMRH Unité Mixte de Recherche sur les Herbivores
STLO Science et Technologie du Lait et de l'Oeuf
GenPhySE Génétique Physiologie et Systèmes d'Elevage
Idele INSTITUT DE L´ELEVAGE
ACTALIA
PEGASE Physiologie, Environnement et Génétique pour l'Animal et les Systèmes d'Elevage
GABI Génétique Animale et Biologie Intégrative
Aide de l'ANR 690 097 euros
Début et durée du projet scientifique :
décembre 2019
- 36 Mois