Les cellules NKT constituent un composant important du système immunitaire chez les mammifères. Douées d'un vaste profil fonctionnel, ces cellules sont actuellement considérées somme des cibles potentielles en immunothérapie. Ceci s'explique par l'existence de sous populations fonctionnelles préprogrammées dérivant d’un programme de développement thymique complexe et encore mal compris. Le projet NKTdiff a donc pour ambition de définir les mécanismes associés à l'acquisition de ces fonctions.
Le développement des cellules NKT s’effectue dans le thymus, et divergent des cellules aß T classiques au stade DP suite à leur sélection positive par des thymocytes DP CD1d+. Un signal TCR indique la sélection positive des NKT et contrôle probablement l’acquisition de leur programme effecteur inné. La différentiation fonctionnelle des NKT qui en découle dépend de nombreux signaux comme les facteurs de transcription (TF), les facteurs solubles et l’interaction avec d’autres types cellulaires. <br />Cependant, les étapes précises de différentiation des NKT restent controversées. Deux modèles non-mutuellement exclusifs ont été proposés: un modèle de maturation linéaire et un modèle de différentiation fonctionnelle. Le modèle linéaire a proposé que les NKT nouvellement sélectionnées (CD24+) maturent séquentiellement en NKT de stade 1 à 3 via la perte de CD24 et l’acquisition des marqueurs CD44 et NK1.1. Le modèle de différentiation suggère que les NKT se différentient en populations fonctionnelles distinctes sur la base des mêmes TF que les cellules T CD4+ « helper ». Dans ce modèle, les 3 populations (NKT1, NKT2 and NKT17) sembleraient dériver d’un précurseur commun. Toutefois, les facteurs et cascade de signalisation contrôlant cela sont encore mal compris.<br />Le développement et la fonction des NKT étant intimement liés, une meilleure compréhension des trajectoires de développement et des points de contrôles accompagnant le développement fonctionnel des NKT apportera d’importantes informations dans la biologie des NKT avec d’éventuelles retombées dans les mécanismes de régulation immunitaire et la susceptibilité aux maladies.<br />Ainsi, en combinant des approches d’analyse transcriptomique et biologique, les objectifs du projet NKTdiff sont de mieux comprendre les événements cellulaires et moléculaires contrôlant la différentiation fonctionnelle des NKT ainsi que comprendre comment une altération dans ce processus peut influencer les fonctions des NKT dans la pathologie.
Pour étudier nos hypothèses, 4 tâches complémentaires ont été proposées:
1) Définir les trajectoires de développement et différentiation fonctionnelle des NKT par des approches d'analyses transcriptomiques et mathématiques ainsi que des expériences biologiques in vitro et in vivo.
2) Evaluer le rôle du cofacteur de transcription FHL2 dans le développement et l'homéostasie des NKT par des approches ex vivo et in vivo de cytométrie en flux et de biochimie.
3) Disséquer les mécanismes moléculaires sous-tendant le contrôle de FHL2 dans le développement NKT sur la base d'approches de cytométrie en flux, du développement de nouvelles souris génétiquement modifiées et l'analyse transcriptomique.
4) Etudier l'influence de la déficience en FHL2 sur les fonctions des NKT au cours de l'infection et du cancer en utilisant des modèles animaux relevant et la cytométrie en flux.
Tâche1 : Définir le modèle de développement des cellules NKT.
Dans cette partie, nous avons pu proposer un nouveau modèle de développement des cellules NKT. Le modèle diffère des précédents modèles et suggèrent que la différentiation fonctionnelle des NKT s’effectue en 2 étapes : Une étape intense de prolifération qui suit leur sélection positive et au cours duquel les NKT présentent un phénotype immature caractérisé par une grande capacité à produire les cytokines de type Th2 puis une étape de diversification fonctionnelle au cours duquel les NKT acquièrent un profil Th17 ou Th1. De plus, nos données indiquent que la population de type Th1 (NKT1) est composée de sous-populations présentant des différences fonctionnelles putatives sur la base transcriptomique.
Objectif 2 : Evaluer le rôle du cofacteur de transcription FHL2 dans le développement et l’homéostasie des NKT.
Nos travaux ont confirmé le rôle clé de FHL2 dans le développement NKT et que cet effet était cell-intrinsèque. De plus, nous avons pu montrer que FHL2 était plus particulièrement impliqué dans la différentiation des NKT vers un profil NKT1. Toutefois, nous n’avons pas pu observer d’effet particulier de FHL2 dans le contrôle de la sortie des NKT du thymus. Ainsi nous observons en périphérie un défaut de NKT en absence de FHL2 similaire à celui observé dans le thymus.
En lien avec son rôle dans l’acquisition du profil NKT1, nous avons pu constater un défaut de production d’IFN-g par les NKT provenant de souris FHL2.
Objectif 3 : Etudes des événements moléculaires dépendants de FHL2 impliqués dans le développement NKT.
Nos premiers travaux ont permis de déterminer des partenaires « upstream » et « downstream » de FHL2 potentiellement impliqués dans le développement fonctionnel des NKT. Par exemple, FHL2 semble contrôler négativement l’expression de PLZF, un facteur de transcription clé dans le développement NKT. En lien, la repression de PLZF est indispensable à l’acquisition du profil NKT1.
Concernant l'objectif 1, nous poursuivons à l’heure actuelle nos travaux pour confirmer ce modèle avec des approches in vivo. Nous avons déjà pu mettre en place le modèle d’injection de cellules en intrathymique avec une bonne efficacité et reproductibilité.
Concernant l'objectif 3, nos analyses in silico suggèrent plusieurs candidats environnementaux qui pourraient contrôler l’expression de FHL2 dans les NKT. Ce travail qui n'avait pas été inscrit sur le projet initial est en cours d'évaluation de par son côté original. Des modèles in vitro sont en cours de développement pour étudier ces nouvelles hypothèses. En parallèle, et afin d'étudier les partenaires moléculaires de FHL2 au sein des NKT, une souris taggée FHL2 est en cours de développement.
Sur cette première période, nous avons pu valoriser nos travaux au travers d’une publication originale (Baranek et al., PMID : 32905761) dans le journal « Cell Reports » (IF : 8.1). Ces travaux remettent en question le modèle général de développement des cellules NKT. De plus, elles suggèrent l’existence d’une hétérogénéité fonctionnelle plus importante qu’initialement décrite.
La pandémie de COVID-19 a stoppé nos travaux expérimentaux pendant plus de 6 mois au cours du premier semestre 2020 (voir C.3). Toutefois pendant cette période, nous avons initié un projet de recherche étudiant chez des patients présentant des formes sévères de COVID-19. Ce travail de clinique descriptive nous a permis de montrer une altération importante de la biologie des lymphocytes T non conventionnelles incluant les NKT dans cette pathologie. Ces travaux (Jouan et al., PMID : 32886755) ont été valorisé par le prestigieux journal de recherche clinique « Journal of Experimental Medicine » (IF : 14.3) et confirmés depuis par d’autres études.
Les lymphocytes T Natural Killer représentent une famille de lymphocytes T dérivée du thymus occupant une place charnière dans le système immunitaire à l’interface entre inné et adaptatif. Douées d’un vaste répertoire fonctionnel, ces cellules jouent un rôle clé dans de nombreuses pathologies et ainsi représentent des cibles d’intérêt en immunothérapie. Ceci s’explique notamment par l’existence de sous-populations fonctionnelles préprogrammées dérivant d’un programme de développement thymique complexe et encore mal compris. Dans ce contexte, ce projet a donc pour ambition de 1) mieux définir les étapes dynamiques, et 2) étudier les facteurs moléculaires, impliquées dans l’émergence de ces populations fonctionnelles. Définir ces mécanismes nous fournira d’importantes informations sur la biologie de cette lignée de lymphocytes T particuliers et permettront une meilleure compréhension des processus d’éducation du système immunitaire et de susceptibilité aux maladies.
Monsieur Christophe PAGET (Christophe PAGET)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
CEPR Christophe PAGET
Aide de l'ANR 318 600 euros
Début et durée du projet scientifique :
février 2020
- 36 Mois