CE13 - Biologie cellulaire, biologie du développement et de l’évolution

Transfert des lipides aux mitochondries et formation des sites de contact lors de la carence en phosphate chez les plantes. – MiCoSLiT

Comment les plantes s’adaptent-elles aux milieux appauvris en nutriments ?

Le projet MiCoSLiT cherche à comprendre comment le remodelage des lipides se produit dans les mitochondries des plantes en réponse à la carence en phosphate et comment ce remodelage affecte la résistance globale des plantes à ce stress.

Compréhension des mécanismes impliqués dans l’adaptation des plantes aux milieux appauvris en phosphate.

Les plantes sont des organismes qui sont en permanence soumis à de nombreux stress tels que les fortes chaleurs ou les carences nutritives. Le phosphate est un microélément essentiel aux développement des plantes dont l’absence impact considérablement les rendements agricoles. Il est donc important de comprendre comment les plantes s’adaptent à ce stress. Lors de carence en phosphate, les plantes mettent en place des mécanismes permettant d’augmenter l’absorption du phosphate à partir du sol et de mobiliser les réserves présentes dans les cellules. Dans les cellules végétales, un tiers du phosphate est retenu dans les lipides qui constituent les membranes cellulaires : les phospholipides. Ces lipides sont donc dégradés en carence de phosphate et remplacés par les galactolipides qui ne renferment pas de phosphate. Ce processus, appelé remodelage des lipides, implique un trafic important des lipides entre différents compartiments de la cellule et est actuellement mal compris puisqu’un seul acteur a été identifié. Le projet MiCoSLiT a pour objectif d’identifier de nouveaux acteurs impliqués dans le remodelage des lipides qui s’opèrent chez les plantes se développant dans des milieux appauvris en phosphate et ainsi de mieux comprendre comment les plantes peuvent s’adapter et mieux résister à ce stress.

La première partie du projet consiste à identifier des nouveaux candidats potentiellement impliqués dans le remodelage des lipides. Pour cela des approches biochimiques basées sur la 1) la recherche des partenaires de protéines connues ainsi que 2) sur des analyses différentielles réalisées sur des plantes cultivées en présence et en absence de phosphate ont été mises en place. De ces approches, trois candidats ont été retenus pour une analyse fonctionnelle poussée, qui constitue la deuxième partie du projet. Les analyses ont consisté dans un premier temps à construire des lignées exprimant ou non les candidats d’intérêts puis à étudier différents paramètres. Ainsi, des approches de biochimie, comme la purification de compartiments cellulaire couplée à la lipidomique, ont été mises en place afin d’étudier l’effet des candidats sur le remodelage des lipides en carence de phosphate. Des approches de microscopie à fluorescence et électronique ont permis d’étudier la localisation des candidats et leur effet sur l’ultrastructure des cellules. Enfin, des tests de croissance en milieu pauvre en phosphate ont permis d’analyser l’impact de ces candidats sur la résistance des plantes à la carence de phosphate.

The projet MiCoSLiT a permis l’identification de trois nouveaux acteurs jouant un rôle dans le remodelage des lipides opérant en carence de phosphate. Un premier acteur est impliqué dans le processus de transport des phospholipides permettant leur dégradation. Les deux autres seraient impliqués dans la communication entre les compartiments cellulaires permettant d’orchestrer le remodelage. Ainsi, ce projet a permis de mieux comprendre un des mécanismes de mobilisation intracellulaire du phosphate chez les plantes. Sur le long terme, ces résultats pourront être utilisés afin de sélectionner des variétés qui pourraient mieux résister à ce stress nutritif.

L'analyse fonctionnelle de nos trois protéines candidates mettra en évidence leurs rôles dans le processus de remodelage des lipides se produisant lors de la carence en phosphate et leur importance pour la résistance des plantes à ce stress. Les résultats ouvriront également des perspectives importantes concernant la compréhension des mécanismes impliqués dans la régulation de la formation des sites de contact mitochondriaux et des processus de transport des lipides.

Ce projet a donné lieu à l’écriture deux chapitres d’ouvrage : un correspondant à un protocole détaillant une des techniques mise au point au cours du projet ainsi qu’un second correspondant à l’état de l’art sur l’ensemble des connaissances dans le domaine du transport des lipides chez les plantes. Un article de recherche retraçant l’histoire évolutive d’un candidat a été soumis récemment. Quelques expériences complémentaires restent à réaliser avant la publication de la caractérisation fonctionnelle de nos différents candidats.

La carence en phosphate (Pi) est un stress fréquent entraînant une baisse importante de rendement des plantes cultivées. L’adaptation des plantes met en jeu différents mécanismes afin d’augmenter l’absorption du Pi extracellulaire et de remobiliser les réserves intracellulaires. Les phospholipides, principaux composants des membranes non-plastidiales, renferment un tiers du Pi cellulaire. Lors d’une carence, ces lipides sont partiellement dégradés afin de libérer du Pi et remplacés par un lipide non-phosphaté synthétisé dans le plaste, le digalactosyldiacylglycérol (DGDG). Ainsi, la synthèse et le transfert de DGDG vers différents organites sont fortement induits dans cette situation. Les mécanismes impliqués dans ce remodelage lipidique restent mal compris. Le transfert du DGDG à la mitochondrie s’opère au niveau de sites de contact avec le plaste. J’ai précédemment identifié chez Arabidopsis thaliana un super-complexe, le complexe MTL (Mitochondrial Transmembrane Lipoprotein), impliqué dans le transfert du DGDG à la mitochondrie en carence de Pi. Dans ce complexe, la protéine AtMic60, localisée dans la membrane interne des mitochondries, joue un rôle indirect dans ce transfert en favorisant la formation des sites de contact entre les membranes mitochondriales et en les déstabilisant. L’absence de la protéine AtMic60 entraine une diminution partielle du transport de lipides, suggérant que d’autres voies sont également impliquées. D’autre part, les mécanismes de formation des sites de contact entre mitochondries et plastes sont à l’heure actuelle peu connus. Le projet MiCoSLiT a pour but d’identifier et de caractériser les acteurs clés impliqués dans la formation des sites de contact mitochondrie-plaste et dans le transport des lipides en carence de Pi. L’hypothèse de travail est que le complexe MTL, ainsi que d’autres acteurs qui restent à identifier, sont impliqués. Dans un premier temps, trois approches biochimiques seront mises en place afin d’identifier des protéines candidates. La première est basée sur une caractérisation approfondie du complexe MTL en termes de composition et d’organisation afin 1) de mieux comprendre les différentes fonctions de ce complexe et 2) de mettre en évidence d’autres protéines qu’AtMic60 potentiellement impliquées dans le transfert de lipides et/ou la formation des sites de contact membranaires. Afin d’identifier de nouvelles voies, deux autres approches, non-ciblées, correspondant à une analyse du protéome mitochondrial en carence de Pi et à l’optimisation d’une approche de purification des sites de contact mitochondrie-plaste, seront également mises en place. Ces approches seront réalisées à partir de cultures cellulaires d’A. thaliana en présence et en absence de Pi afin de mettre en évidence des candidats impliqués dans la réponse à ce stress. Dans un deuxième temps, une caractérisation fonctionnelle d’un petit nombre de candidats sera réalisée afin d’analyser leur rôle dans le transport de lipides aux mitochondries et/ou la formation des sites de contact mitochondrie-plaste. Pour terminer, l’implication de ces candidats dans la réponse globale de la plante à la carence en Pi sera étudiée afin de mettre en évidence l’importance du remodelage lipidique dans le processus d’adaptation des plantes à ce stress. Les retombées du projet MiCoSLiT sont attendues à la fois dans le domaine de la recherche fondamentale et dans le domaine de l’agronomie. En effet, ce projet permettra de mieux comprendre les mécanismes impliqués dans la formation des sites de contact entre organites et dans le transport des lipides aux mitochondries, processus fondamentaux qui restent mal compris à l’heure actuelle. De plus, il permettra de mieux comprendre comment les plantes s’adaptent à la présence de faible quantité de Pi dans le sol, ouvrant ainsi des perspectives à long termes sur le développement de variétés dont les rendements seraient moins impactés par ce stress.

Coordination du projet

Morgane Michaud (LABORATOIRE DE PHYSIOLOGIE CELLULAIRE ET VEGETALE)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

LPCV LABORATOIRE DE PHYSIOLOGIE CELLULAIRE ET VEGETALE

Aide de l'ANR 248 664 euros
Début et durée du projet scientifique : octobre 2019 - 36 Mois

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