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Médialisation des maladies neurodégénératives et psychiatriques : interactions entre science et médias – MEDIANEURO

MEDIANEURO

Médialisation des maladies neurodégénératives et psychiatriques : interactions entre science et médias

La production et la communication scientifique sont-elles influencées par des logiques médiatiques?

Le projet MediaNeuro repose sur le concept de médialisation qui postule une orientation accrue et intéressée des médias vers les sciences et des sciences vers les médias. Il interroge les conséquences de cette l’orientation croissante sur l’activité scientifique. L’ambition de ce projet est de mettre en évidence des indicateurs de la médialisation dans le domaine des neurosciences.<br />Nous avons défini cinq indicateurs potentiels : 1) l’attention médiatique (proportion d’études scientifiques publiées couvertes par la presse dans le domaine des neurosciences), 2) l’adaptation aux logiques médiatiques (e.g. influence potentielle des médias sur la sélection des manuscrits opérée par les éditeurs des revues scientifiques), 3) l’influence de la couverture médiatique sur les taux de citations des publications scientifiques, 4) la contextualisation des questions scientifiques par les médias (lien opéré´ entre une question d’intérêt public et une étude scientifique) et enfin 5) la visibilité´ médiatique des scientifiques (statut des scientifiques présents dans les médias et expertise scientifique).

Deux bases de données sont utilisées. La première couvre les années 2014 à 2018 et a été réalisée en utilisant les données Altmetrics des publications scientifiques recensées sur Scopus. La seconde base de données est créée à partir de la recherche de mots clefs sur Factiva au cours des années 2000-2004. Ces deux bases de données nous permettent de collecter des articles scientifiques dans le domaine des neurosciences qui ont eu un retentissement médiatique et publiés sur deux périodes différentes. Notre matériel de travail est donc constitué de publications scientifiques et des articles de presse leur correspondant.

Nous avons mis en évidence l’existence d’une corrélation entre l’attention médiatique et la sélection opérée par les éditeurs de revues scientifiques. En effet, pour le virus Zika, nous avons pu observer que le pic d’attention médiatique précède un pic d’intérêt scientifique dans 3 revues Nature, Science et Nature Medicine. D’autre part les délais entre soumission et acceptation puis entre acceptation et publication sont largement réduits pour cette période et reviennent à la normale une fois épuisé l’intérêt médiatique.
D’autre part, nous avons analysé « l’effet publicité » qui a été décrit, entre la couverture médiatique d’une publication scientifique et son taux de citation par les pairs. Notre analyse confirme qu’il existe une association positive entre la couverture médiatique d’un article scientifique et son taux de citation. De plus, elle montre pour la première fois qu’il existe aussi une association pour des articles publiés dans des revues à plus faible facteur d’impact. Notre approche nous a également permis de mettre en évidence un effet d’intensité : l’association entre la couverture médiatique et les taux de citations varie avec le nombre d’articles de presse.

L’existence de ces deux corrélations entre visibilité médiatique et intérêt scientifique (sélection par les éditeurs des revues scientifiques et taux de citation par les pairs) suggère donc que l’évaluation de la qualité d’une publication ne serait plus uniquement basée sur le modèle de relecture par les pairs et de sélection par les revues scientifiques.

Gonon, F., Dumas-Mallet, E, Ponnou, S. (2019) La couverture me´diatique des observations scientifiques concernant les troubles mentaux. Les cahiers du journalisme, 2(3) R045-R063
Dumas-Mallet, E., Garenne, A., Boraud, T., & Gonon, F. (2020). Does newspapers coverage influence the citations count of scientific publications? An analysis of biomedical studies. Scientometrics, doi.org/10.1007/s11192-020-03380-1.

Ce projet s’appuie sur le concept de médialisation des sciences : celui-ci décrit le rôle croissant des médias dans les changements sociétaux. Ce concept implique que les scientifiques, leurs organisations et les éditeurs scientifiques s’adaptent aux logiques médiatiques et recherchent l’attention des médias. Cette orientation pourrait avoir des conséquences sur la pratique de la recherche, notamment au niveau des publications scientifiques et de l’expertise. Ce concept n’a été jusqu’à présent utilisé que dans le cadre d’études de cas, limitant de fait son caractère heuristique. Par conséquent, nous ne disposons pas d’indicateurs des répercussions de cette orientation des scientifiques vers les médias sur la pratique de la recherche elle-même. Ce projet a pour but de palier à ce manque.
Nous nous focaliserons sur cinq indicateurs d’une éventuelle répercussion de l’attention médiatique sur la pratique de la recherche:
1- L’adaptation croissante des éditeurs de journaux scientifiques prestigieux tels que Science et Nature à des logiques médiatiques dans la sélection des études publiées.
2- La présence croissante d’exagérations dans les conclusions et résumés des articles scientifiques ainsi que dans les communiqués de presse correspondants.
3- La stimulation du taux de citations reçu par les publications scientifiques en fonction de l’attention portée par les médias.
4- Une augmentation de la quantité d’études scientifiques qui se rattachent à des sujets d’intérêt public tels que définis par les journalistes
5- Une augmentation de la participation de scientifiques renommés au discours public.

Ces éventuelles répercussions seront analysées sur une large base de données établie à partir de recherches systématiques dans le domaine des neurosciences biomédicales sur les bases de données Altmetrics, Lexis-Nexis et DowJones Factiva. Nous analyserons les éventuelles répercussions de l’attention des médias et leur évolution sur deux périodes : 2000-2004 et 2014-2018.
Deux approches seront utilisées : la première utilise des indicateurs permettant de distinguer des degrés de médialisation en se focalisant notamment sur la polarisation et le pluralisation des discours publics attachés à des problèmes scientifiques dans les médias. La seconde est basée sur l’analyse des publications scientifiques. Des études ont ainsi montré que les exagérations présentes dans les médias étaient bien souvent déjà présentes dans le texte des publications scientifiques ou des communiqués de presse. Ces pratiques exagèrent l’importance sociétale des observations scientifiques et peuvent ainsi être interprétées comme un indicateur de médialisation.

Coordination du projet

François Gonon (Institut des Maladies neurodégénératives Université de Bordeaux CNRS-UMR 5293)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

KIT Karlsruher Institut für Technologie (KIT)
IMN Institut des Maladies neurodégénératives Université de Bordeaux CNRS-UMR 5293

Aide de l'ANR 173 448 euros
Début et durée du projet scientifique : février 2019 - 36 Mois

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