#CreaMaker: évaluation de la co-créativité dans une activité de fabrication physico-numérique de type maker – CreaMaker
#CreaMaker: évaluation de la co-créativité dans une activité de fabrication physico-numérique de type maker – CreaMaker
La créativité a été principalement étudiée d'un point de vue individuel en psychologie. Néanmoins, il existe un nombre croissant d'études en éducation sur des projets créatifs en équipe. Le projet ANR #CreaMaker vise à faire progresser la recherche sur la créativité et la co-créativité non seulement dans les équipes du même âge mais aussi dans les équipes intergénérationnelles, dans la résolution de problèmes mal définis en robotique pédagogique.
Enjeux et objectifs du projet ANR #CreaMaker : évaluation de la créativité et co-créativité en robotique pédagogique
Dans ce contexte, #CreaMaker vise à avancer la recherche dans l’étude de la résolution créative de problèmes selon l’âge des participants, mais aussi en fonction de la modalité (individuelle ou collaborative) et des attitudes de tolérance à l’erreur, tolérance à l’ambiguïté et prise de risque. Le projet #CreaMaker est basé sur les approches de méthodologie mixte (Strijbos & Fischer, 2007) qui combinent les analyses quantitatives et les analyses qualitatives. Les approches mixtes avec des données longitudinales sont bien établies dans le domaine de l’apprentissage collaboratif (Cress, 2008, P.A. Kirschner & Erkens, 2013) et peuvent tout de même s’appliquer au contexte de l’apprentissage individuel. Le projet est organisé en une série de quatre workshops. Le volet quantitatif du projet fait appel à des instruments psychométriques validés pour chacune des attitudes étudiées (tolérance à l’erreur, tolérance à l’ambiguïté et prise de risque).
La résolution de la tâche avec le matériel de robotique modulaire Cubelets implique la manipulation et l’assemblage des cubes en vue de construire un véhicule qui se déplace de manière autonome d’un point initial (P1) à un point final (P2). Cette tâche peut paraître simple en raison de l’assemblage de cubes. Toutefois, un nombre limité de manière permet d’assembler les pièces selon une structure équilibrée. Par exemple, il est possible de faire un assemblage horizontal de l’ensemble de pièces ou encore de poser les cubes sur deux étages complets ou partiels de cubes. Selon un ordre de fonctionnalité, la pièce rouge doit se retrouver entre le capteur de distance et le cube de type actuateur qui comprend des roues pour permettre l’inversion du déplacement. Ainsi, si le participant assemble les pièces de manière verticale, en créant une colonne, la structure ne permet pas de garder la stabilité lors du déplacement, ce qui conduit à une difficulté à réaliser une structure équilibrée. D’autre part, si les participants placent le cube rouge à l’une des extrémités du robot, il risque de ne pas agir comme «inverseur».
Parmi les résultats obtenus dans cette première phase du projet ANR CreaMaker nous avons pu observer des différences dans la résolution de problèmes de la tâche CreaCube entre des enfants et des adultes. Nous observons que les enfants, au contraire de nos hypothèses initiales, prennent plus de temps pour chacune des phases, notamment au cours de l’activité 1 pour les phases des consignes et d’observation. Leur méconnaissance des cubes et la tâche leur fait prendre un temps important dès le début de la première activité, mais aussi à chaque itération de mise à l’essai de solution. D’autre part, les adultes sont plus rapides à comprendre les consignes et à anticiper une idée d’assemblage. Ces résultats vont dans le sens des résultats de Staudinger et Baltes (1996) qui avaient remarqué que les connaissances des adultes permettaient de compenser certaines difficultés cognitives face à une nouvelle tâche. Dans un deuxième temps, l’activité CreaCube présente différents degrés de liberté créative, ce qui influence la diversité des phases qui ont pu être modélisées. L’étude de la durée des différentes phases a permis de repérer l’importance de l’alternance entre l’exploration et l’assemblage et de l’alternance entre les consignes et l’analyse (exploitation). Ces observations confirment l’importance pour les apprenants de créer une alternance entre leurs connaissances et les données du problème (Bélanger et al. 2014) et l’intérêt de considérer la non linéarité du processus de résolution de problème.
Enfin, le temps d’exploration plus important tant des enfants que des adultes, tend à montrer que la phase d’exploration est très importante avant d’arriver à une phase d’analyse/exploitation. En effet, nous avons pu observer qu’en l’absence de solution satisfaisante, les participants alternent entre des phases d’exploration et d’assemblage/exploitation.
L’analyse de la résolution de problèmes dans la tâche CreaCube est développée à partir d’une modélisation des états de la tâche qui correspondent à un automate à états finis (finite-state machine) que représenter sous forme de graphe orienté. Les nœuds correspondent à l’état comportemental de la personne apprenante dans la tâche, et les nœuds correspondent aux transitions entre ces états. Cela permet de représenter les différentes étapes de la résolution du problème, et de distinguer quels enchaînements peuvent survenir d’une étape à l’autre. La modélisation de la tâche a été développée dans des nombreux travaux développés dans le domaine des Environnements d’Informatique et d’Apprentissage Humain (EIAH) à la croisée des SEF et des sciences du numérique. Dans l’ingénierie de la formation en téléformation, Paquette et collègues (2003) modélisent la tâche et les connaissances dans le but de structurer l’activité en situation de téléapprentissage.
Dans l’objectif de faciliter l’analyse de la tâche par le biais d’un programme informatique, dans le cadre du projet ANR CreaMaker, une interface graphique visait à faciliter l’analyse des différents observables : les observables des actions d’assemblage et désassemblage, la configuration des configurations des cubes (figures), les problèmes rencontrés, l’identification des affordances des objets, et les émotions rencontrées au cours de la tâche. La notion d’affordance (Gibson, 1988) y est particulièrement importante car elle permet, après une première phase d’étonnement (Thievenaz, 2017) produit par la perception et l’identification initiales d’une spécificité dans l’objet, de s'enchaîner avec une phase d’exploration de l’objet et de l’émergence d’une nouvelle connaissance technologique suite aux interactions des sujets avec l’objet.
Les publications du projet ANR CreaMaker sont disponibles en accès ouvert sur HAL : hal.archives-ouvertes.fr/LINE/.
==> 5 articles de revues scientifiques à comité de lecture :
Leroy, A., & Romero, M. (accepted). Interactivity and materiality matter in creativity: educational robotics for the assessment of divergent thinking. Interactive Learning Environments.
Cassone, L., Romero, M., & Basiri Esfahani, S. (2020). Group processes and creative components in a problem-solving task with modular robotics. Journal of Computers in Education. doi.org/10.1007/s40692-020-00172-7
Romero, M., DeBlois, L., & Pavel, A. (2018). CreaCube, comparaison de la résolution créative de problèmes, chez des enfants et des adultes, par le biais d’une tâche de robotique modulaire. MathémaTICE (61). revue.sesamath.net/spip.php
Komis, V., Romero, M., Depover, C., & Karsenti, T. (2019). Robotics in Primary Education – Robotique en Éducation Primaire?: Introduction. Review of Science, Mathematics and ICT Education, 3-6 Pages. doi.org/10.26220/REV.3151
Romero, M. (2019b). Analyser les apprentissages à partir des traces?: Des opportunités aux enjeux éthiques. Distances et médiations des savoirs, 26. doi.org/10.4000/dms.3754
==> 2 Ouvrages
Sanchez, E. & Romero, M. (2020). Apprendre en jouant. Retz. www.editions-retz.com/pedagogie/domaines-transversaux/apprendre-en-jouant-9782725639550.html
Sanabria-Z, J., Romero, M., Guerci, E., & Lefèvre, S.-C. (2019). L’écosystème techno-créatif de la Métropole Nice Côte d’Azur?: Des acteurs et des (tiers) lieux pour le développement d’une citoyenneté créative et d’une éducation aux compétences transversales. Centre de recherche et d’intervention sur la réussite scolaire (CRIRES). www7.bibl.ulaval.ca/doelec/lc2/monographies/2019/a2986002.pdf
==> 5 chapitres de livres
==> 4 communications dans des conférences à comité de lecture
L'apprentissage dans le cadre d'activités de fabrication numérique ou « maker » engage les participants dans le design et la création d'artefacts numériques et tangibles par le biais de différentes technologies (Maloy & Edwards, 2018; Martin, 2015). Les activités d’apprentissage « maker » sont basées sur le design collaboratif (Voogt et al., 2015). Par la fabrication, les participants créent un artefact qui vise solutionner de manière créative un problème. Ces activités sont basées sur le constructionnisme (Papert & Harel, 1991) et la modélisation tangible des idées par le biais d'artefacts (Kafai & Resnick, 1996 ; Sheridan et al., 2014). Malgré l'émergence des activités « maker » des dernières années, la co-créativité n’a pas été analysée dans ce contexte. Ainsi, par le biais du projet #CreaMaker nous ferons avancer les connaissances sur le processus de co-créativité dans ces activités, non seulement dans des équipes du même âge, mais aussi dans des équipes intergénérationnelles.
Les projets « maker » ont le potentiel de combiner le bricolage, la programmation et la robotique éducative afin d’engager l'apprenant dans un processus créatif tant individuel que collaboratif. À l’heure actuelle, les compétences créatives des participants engagés dans des activités « maker » n’ont pas encore été étudiées en lien avec les attitudes créatives et l’hétérogénéité d’âge. Ainsi, dans le projet #CreaMaker, la créativité est analysée non seulement comme une compétence individuelle mais comme un processus d'équipe, au cours duquel, les attitudes des apprenants sont considérées comme des antécédents potentiels de la co-créativité. Les attitudes analysées dans le projet intègrent la tolérance aux erreurs (Tulis, 2013), la tolérance à l'ambiguïté (DeRoma, Martin & Kessler, 2003) et la prise de risque (Davies, 2003) pour créer des solutions à des problèmes donnés (Barma et al., 2015). Dans ce contexte, #CreaMaker vise avancer la recherche dans l’étude de la co-créativité combinée à ces trois attitudes dans différentes conditions d’hétérogénéité d’âge.
Le projet #CreaMaker est basé sur les approches de méthodologie mixte (Strijbos & Fischer, 2007) établies dans le domaine de l'apprentissage collaboratif (Cress, 2008, P.A. Kirschner & Erkens, 2013). Le projet est organisé en une série de quatre workshops de fabrication numérique basés sur la méthodologie du laboratoire du changement (Engeström, 1987, 2015 ; Sannino, Engeström & Lahikainen, 2016). Le volet quantitatif du projet fait appel à des instruments psychométriquement validés pour chacune des attitudes étudiées (tolérance à l'erreur, tolérance à l'ambiguïté et prise de risque). Quatre groupes d'âge sont considérés pour l’étude : les apprenants de l'enseignement secondaire (15 à 18 ans), les jeunes adultes (19 à 29 ans), les apprenants adultes (30 à 59 ans) et les adultes âgés (60 à 79 ans). Les ateliers #CreaMaker sont menés avec des équipes du même groupe d’âge mais aussi avec des équipes intergénérationnelles afin de tester l'hypothèse de l'avantage de co-créativité des équipes intergénérationnelles (H1: les équipes intergénérationnelles sont plus co-créatives). Dans les équipes du même groupe d’âge, nous nous attendons à un niveau plus élevé de co-créativité entre les plus jeunes (H2: les équipes plus jeunes sont plus co-créatives). Le projet #CreaMaker analyse également le processus de co-créativité en lien aux attitudes de tolérance à l'erreur des participants (H3), de tolérance à l'ambiguïté (H4) et de prise de risque (H5). Ces hypothèses sont analysées de manière longitudinale dans le cadre d'activités « maker ». Le projet #CreaMaker rendra disponibles les articles de recherche et les communications en libre accès, l'instrument d'évaluation de la co-créativité et les activités « maker » via le site Internet #CreaMaker. Cette mise en ligne vise à assurer une diffusion ouverte tant des contributions méthodologiques que des résultats scientifiques.
Coordinateur du projet
Madame Margarida Romero (Université Nice Sophia Antipolis - Laboratoire d'Innovation et Numérique pour l'Education)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenaire
UNS - LINE Université Nice Sophia Antipolis - Laboratoire d'Innovation et Numérique pour l'Education
Aide de l'ANR 301 294 euros
Début et durée du projet scientifique :
novembre 2018
- 48 Mois