DS04 - Vie, santé et bien-être

Analyse comparée de la spécification des neurones sensoriels ventraux chez les cordés invertébrés: apports à l’étude de l’origine et de l’évolution du système nerveux périphérique des vertébrés. – VentralPNS

Une origine ventrale pour le système nerveux périphérique dorsal des vertébrés?

Origines évolutives du système nerveux périphérique des vertébrés.

Le système nerveux périphérique des vertébrés est unique en son genre.

Au cours de l'évolution, les vertébrés se sont distingués des autres chordés, leurs cousins invertébrés les plus proches (amphioxus et ascidies), par l'acquisition de caractères uniques. En particulier, la crête neurale et les placodes ectodermiques, qui n'existent que durant la vie embryonnaire, participent à la formation du système nerveux périphérique (PNS). Elles se forment dans la partie dorsale de l'embryon, à la bordure du système nerveux central. Les mécanismes embryologiques et génétiques qui régulent leur formation ont été étudiés en détail chez plusieurs espèces de vertébrés, et apparaissent conservés. Les PNS de l'ascidie et de l'amphioxus sont beaucoup plus simples que celui des vertébrés. Ils sont constitués de neurones sensoriels présents au sein de l'épiderme au stade larvaire. Une population particulière de neurones, le vPNS, est présente chez les deux groupes d'invertébrés dans la partie ventrale, et est vraisemblablement d’origine commune (homologue). L'absence de vPNS chez les vertébrés suggère que le vPNS est un caractère ancestral chez les chordés, et qu'il a été perdu chez les vertébrés. L'objectif du projet VentralPNS est de tester cette hypothèse.

Il avait été montré que le vPNS est spécifié en deux étapes chez des espèces de référence d'invertébrés chordés: induction de l'ectoderme ventral en territoire neurogénique par la voie de signalisation BMP, puis spécification de certaines cellules en neurones par la voie de signalisation Notch. En utilisant ce point de départ, nous avons entrepris de reconstruire et comparer les réseaux géniques qui régulent la formation du vPNS chez d'autres espèces, plusieurs espèces d'ascidies et l'amphioxus européen Branchiostoma lanceolatum. Tout d'abord, nous avons, par hybridation in situ, déterminé si les gènes du vPNS déjà connus étaient aussi exprimés dans le vPNS des autres espèces. Ensuite, en combinant des approches fonctionnelles sur embryons (traitements pharmacologiques, embryologie classique, CRISPR/Cas9), du RNA-seq et de la phylogénie, nous avons identifié de nouveaux marqueurs moléculaires du vPNS et déterminé la fonction de certains. Enfin, en se focalisant sur les régions régulatrices de la transcription, nous avons déterminé si une expression conservée dans le vPNS était mise en place par les mêmes mécanismes.

De nombreux gènes orthologues sont exprimés dans le vPNS de plusieurs espèces, et, pour une fraction que nous avons testée, il existe une régulation et une fonction partagées, confortant l'hypothèse d'une homologie du vPNS. Néanmoins, les réseaux géniques sont très différents après 600 millions d'années d'évolution séparée. En revanche, pour la majorité des gènes du vPNS, leurs orthologues sont exprimés dans le PNS des vertébrés. Cela suggère que le réseau génique du vPNS, ancestralement déployé dans la partie ventrale de l'embryon, a été recruté dorsalement et a contribué à l'émergence du PNS des vertébrés.

Notre 'point de vue invertébré' sur l'évolution du PNS a apporté des hypothèses originales qui ne seraient pas apparues dans une 'vision vertébrés-centrée'.
Notre étude sur les chordés invertébrés a considérablement augmenté la description moléculaire de la formation du vPNS. De manière intéressante, une majorité d'orthologues des gènes du vPNS sont exprimés dans le PNS dorsal des vertébrés. Nous proposons que le vPNS est ancestral chez les chordés, mais qu'une forte dérive des systèmes développementaux depuis la séparation ancienne de l'ascidie et de l'amphioxus explique que leurs réseaux géniques ont peu de gènes en commun.
Il sera essentiel à l'avenir d'étendre notre étude comparative en mettant en oeuvre des expériences de génomique fonctionnelle sur une large palette d'espèces.

Coulcher JF, Roure A, Chowdhury R, Robert M, Lescat L, Bouin A, Carvajal Cadavid J, Nishida H and Darras S (2020). Conservation of peripheral nervous system formation mechanisms in divergent ascidian embryos. eLife 9, e59157.
Comparaison de l'expression et la régulation des gènes du PNS chez plusieurs espèces d'ascidies.

Darras S (2021). En masse DNA Electroporation for in vivo Transcriptional Assay in Ascidian Embryos. Bio-protocol 11(18): e4160.
Protocole permettant la transgenèse chez plusieurs espèces d'ascidies.

Chowdhury R, Roure A, le Pétillon Y, Mayeur H, Daric V and Darras S (2022). Highly distinct genetic programs for peripheral nervous system formation in chordates. BMC Biol 20, 1–25.
Comparaison des réseaux géniques du vPNS entre ascidie et amphioxus.

Alors que le système nerveux périphérique des vertébrés (SNP) dérive exclusivement de structures dorsales, crête neurale et placodes, il dérive aussi de l’ectoderme ventral chez les chordés invertébrés, ascidies et amphioxus. La signalisation BMP induit un territoire neurogénique dans lequel sont spécifiés des neurones sensoriels par la voie Notch. Ce SNP ventral (vPNS) correspond à une structure ancestrale des chordés qui a été perdue chez les vertébrés ou alors recrutée dorsalement, possiblement par co-option de mécanismes ancestraux. Notre projet vise à explorer fonctionnellement la formation du vPNS chez les deux groupes de chordés invertébrés en: 1) identifiant les gènes du vPNS, 2) déterminant leur hiérarchie et leur régulation transcriptionnelle, 3) établissant si leur mode de régulation est conservé et 4) identifiant d’éventuels équivalents chez les vertébrés soit pour le territoire vPNS, soit pour les neurones du vPNS ou soit pour le réseau de régulations géniques du vPNS.

Coordination du projet

Sébastien DARRAS (Biologie intégrative des organismes marins)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

BIOM Biologie intégrative des organismes marins
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Aide de l'ANR 453 834 euros
Début et durée du projet scientifique : janvier 2018 - 48 Mois

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