Vers une théorie intégrée de langage et cerveau – TIBLT

Malgré des connaissances relativement détaillées sur les représentations et les processus sous-tendant le langage dans le cerveau, deux traditions de recherche ont prédominé : 1) la recherche sur le langage est typiquement modalité dépendante, avec une dissociation entre la production et la compréhension du langage en termes de stratégies de recherche, de paradigmes et de modèles ; (2) l’intégration des fonctions linguistiques aux fonctions cérébrales est principalement basée sur des corrélations établies les unes après les autres entre les théories psycholinguistiques et les réponses cérébrales élicitées lors de la production ou de la compréhension du langage. L’objectif de ce projet est d’explorer la nature des représentations et des processus langagiers dans une perspective intégrée, à la fois en termes de modalités langagières et de cartographies cerveau-langage. Plus spécifiquement, le but est (1) d’offrir une comparaison systématique des réponses neurophysiologiques de la perception et de la production des mots afin de mettre en évidence les similarités et les différences spatio-temporelles entre ces deux modalités langagières ; et (2) de transcrire ces similarités et ces différences à l’intérieur d’une théorie du codage neuronal, le but étant d’obtenir des explications causales et mécanistes des intégrations cerveau-langage sous-tendant notre capacité à produire et à entendre des mots. Pour ce faire, 7 études faisant appel à des techniques ayant une sensibilité spatio-temporelle sont prévues (3 expériences en EEG, 2 expériences en MEG et 2 expériences en TMS). Les réponses cérébrales élicitées dans des tâches de production (dénomination d’objets) et dans des tâches de perception (écoute passive associée à une tâche de catégorisation sémantique sur certains essais non critiques) seront comparées au sein des mêmes participants, des mêmes stimuli et des mêmes manipulations expérimentales. Les prédictions et les théories relatives à la progression temporelle et à l’organisation spatiale de l’activité cérébrale liée aux différents processus langagiers de la production et de la perception des mots (traitement lexico/sémantique vs. traitement acoustique et articulatoire) seront guidées par l’adoption des systèmes bien connus de codage neuronal de l’organisation corticale et de la communication (e.g. codage de convergence hiérarchique, codage de population hiérarchique, codage d’assemblage non-hiérarchique) et des théories psycholinguistiques de la récupération des mots (e.g. dynamique sérielle discrète, dynamique interactive et en cascade, dynamique distribuée et parallèle). Ces intégrations cerveau-langage mécanistes permet de générer sans ambigüité des prédictions théoriques contrastées concernant les différences et les similarités neuronales dans l’espace et dans le temps entre la production et la compréhension de mots. De cette façon, les données qui seront collectées dans ce projet, permettront non seulement d’élucider davantage la nature et les mécanismes qui sous-tendent respectivement la production et la perception du langage dans le cerveau humain, mais aussi d’offrir une nouvelle vision de l’intégration et des interactions corticales entre écouter et produire un mot. De plus, au-delà des objectifs spécifiques et des avancées théoriques de ce projet, une telle cartographie cerveau-langage intégrée au travers les modalités sera une base importante et essentielle pour commencer à étudier la neurophysiologie du langage en situation de communication naturelle (e.g. entendre, parler) ; un défi complexe mais nécessaire et excitant pour les recherches futures sur la neurobiologie du langage.