Risques, controverses et vaccinations – RISCOVAC
Durant les deux derniers siècles, la vaccination a largement contribué à une augmentation spectaculaire de l’espérance de vie dans les pays développés. Cependant, de nombreux experts s’accordent pour considérer que le public a perdu confiance dans la vaccination. Cette perte de confiance se traduit par une opinion publique de plus en plus réticente à se faire vacciner, par la résurgence de mouvements anti-vaccination, particulièrement sur internet, ou encore par des couvertures vaccinales non-optimales pour certains vaccins et populations cibles et la réapparition d’épidémies, telle que celle de rougeole en Europe.
Dans ce contexte marqué à la fois par la persistance de maladies infectieuses anciennes (rougeole, grippe…) et l’émergence de nouveaux risques infectieux (grippe pandémique, Ebola…), une telle crise de confiance et ses conséquences comportementales constituent un défi pour la santé publique. Pour le relever, il est indispensable de mieux comprendre les croyances, attitudes et comportements de la population vis-à-vis de la vaccination.
Les chercheurs qui ont investi ce champ utilisent de plus en plus le terme « d’hésitation vaccinale » pour désigner l’extension des doutes à l’égard des vaccins, les retards ou les refus de vaccination. L’hésitation vaccinale constitue une catégorie hétérogène rassemblant des personnes avec des degrés et des motifs variés d’indécision à l’égard de vaccins particuliers. L’hésitation vaccinale fait écho à certaines caractéristiques des sociétés contemporaines, telles que le « santéisme » (« Healthism » en anglais) et le désenchantement à l’égard de la science. Certains auteurs montrent en effet que certaines des personnes hésitant à se vacciner sont très impliquées dans les questions vaccinales, enclines à s’informer et à considérer les avantages et inconvénients de la vaccination. En outre, confrontées à des sources d’information discordantes, elles font souvent moins confiance aux experts officiels qu’à d’autres sources.
Les médecins, particulièrement les généralistes, sont les principaux interlocuteurs de la population concernant la vaccination. Mais ils peuvent se trouver en difficulté face aux controverses sur la vaccination, pour inciter leurs patients à se vacciner. Les médias et particulièrement internet jouent un rôle clef dans la diffusion des opinions critiques à l’encontre des vaccins et dans l’alimentation des controverses et de l’hésitation vaccinale.
Notre programme de recherche multidisciplinaire vise à mieux comprendre les croyances, attitudes et comportements de la population à l’égard de la vaccination. Il prendra en compte différents vaccins et populations cibles (incluant les enfants) dans le contexte français. Ses objectifs spécifiques sont les suivants :
I. Construire et tester, par des données empiriques, un cadre théorique pour appréhender l’hésitation vaccinale dans la population et sa différenciation sociale, pour différents vaccins, avec plusieurs sources de données.
II. Mieux comprendre les croyances, attitudes et comportements des médecins à l’égard des vaccins et leur confiance dans différentes sources d’information. Le programme considèrera les médecins généralistes et les spécialistes : le rôle de ces derniers est particulièrement important pour les populations souffrant de maladies chroniques. Le programme étudiera aussi les interactions médecins-patients sur les questions vaccinales.
III. Etudier les facteurs (technologiques, institutionnels, politiques et culturels) favorisant l’émergence et la diffusion des controverses vaccinales dans les médias et sur internet. On utilisera les outils et concepts de la sociologie des controverses et les dernières avancées en matière d’analyse web.
Coordination du projet
Patrick Peretti-Watel (UMR912 "Sciences Economiques & Sociales de la Santé & Traitement de l’Information Médicale")
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenaire
EHESP Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique
LSHTM London School of Hygiene and Tropical Medicine
I-REIVAC Réseau innovatif de recherche clinique en vaccinologie
UMR912 SESSTIM UMR912 "Sciences Economiques & Sociales de la Santé & Traitement de l’Information Médicale"
Aide de l'ANR 350 419 euros
Début et durée du projet scientifique :
September 2015
- 36 Mois