DS0102 - Les risques sanitaires face aux changements environnementaux

Les MOllusques BIvalves comme inDICateurs de la contamination des masses d’eau par les protozoaires parasites. – MOBIDIC

Des bivalves comme outils d’évaluation de la qualité sanitaire des cours d’eau

Les indicateurs microbiologiques actuels ne renseignent pas correctement la contamination des masses d’eau par les protozoaires. De plus, la recherche des protozoaires dans l’eau est fastidieuse et conduit à une variabilité des résultats (spatiale et temporelle). MOBIDIC se propose de lever ces limites par l’utilisation de bivalves

Améliorer les moyens pour l’évaluation de la qualité des masses d’eau

La contamination fécale des environnements aquatiques intéresse les virus et les bactéries, mais également les parasites, notamment les protozoaires pathogènes tels que Cryptosporidium spp, Giardia duodenalis et Toxoplasma gondii. Ces protozoaires sont clairement identifiés comme des priorités de santé publique. Or, l’évaluation de la qualité biologique des masses d’eaux repose sur des indicateurs bactériologiques tels qu’Escherichia coli, et les coliformes ou entérocoques fécaux, qui ne reflètent pas, ou peu, la qualité parasitaire. De plus, la détection des protozoaires se fait principalement par immunofluorescence sur des échantillons issus de la filtration d’eau (ISO 15553 :2006). Des limites sont identifiées autant sur la méthode de détection IF (nécessité : d’anticorps, forte expertise…) que sur la matrice utilisée (eau). En effet, l’utilisation de cette matrice s’accompagne de résultats variables, dépendants de paramètres physico-chimiques et météorologiques. Le projet MOBIDIC propose d’utiliser la capacité d’accumulation de mollusques bivalves, déjà largement renseignée pour les contaminants chimiques, dans le contexte de la qualité sanitaire des masses d’eau. MOBIDIC a pour objectif d’apporter des connaissances nouvelles sur les interactions entre des protozoaires et deux espèces de mollusques bivalves (Dreissena polymorpha et Mytilus spp), en vue de définir un indicateur fiable de la qualité biologique des masses d’eau dans un souci de préservation de la qualité des ressources. Pour ceci MOBIDIC se propose de lever des verrous techniques et scientifiques en lien d’une part avec l’extraction et la quantification des protozoaires en matrices complexes (tissus mous des bivalves), et d’autre part concernant la représentativité de la charge en protozoaires bioaccumulés en fonction de la contamination des masses d’eau

La démarche utilisée dans le projet porte sur trois axes complémentaires :
- Améliorer l’extraction et la détection des protozoaires en matrices complexes (bivalves). Différents paramètres visant la préparation des matrices, l’élution/concentration des parasites à partir des matrices et l’extraction/purification des ADN de parasites ont été testés. Concernant la détection et la quantification, différentes approches moléculaires (qPCR, dd-PCR ou encore LAMP) ont été développées et comparées
- Définir la représentativité de la charge en protozoaires mesurée dans les bivalves vis-à-vis du niveau de contamination des masses d’eau. Ce volet est abordé par l’étude des cinétiques d’accumulation et de dépuration des trois protozoaires en conditions contrôlées de laboratoire en exposition simple pendant 21 jours suivi de 21 jours de dépuration en eau claire. Une deuxième expérimentation a été effectuée mais cette fois-ci en exposition simultanée des 3 protozoaires durant 7 jours suivi de 7 jours de dépuration.
- Améliorer nos connaissances sur les effets possibles de ces protozoaires sur la physiologie des bivalves. Une attention particulière a été portée sur le compartiment hémolymphatique incluant les cellules en charge de la défense immunitaire des mollusques. Etant donné l’absence d’information dans la littérature, nous avons choisi, sur la base d’exposition ex vivo, de développer d’une part une approche ciblée (marqueurs de cytotoxicité, phagocytose, d’apoptose, de nécrose…) et d’autre part une approche ouverte de protéogénomique afin d’identifier les modes d’action.

Les résultats les plus marquants de cette période concernent la mise en place de quatre nouveaux protocoles pour extraire et détecter les trois protozoaires dans les tissus et l’hémolymphe de la dreissène et la moule bleue. Outre leurs performances nettement supérieures à ceux de référence, la simplification de la procédure et la réduction du temps de traitement sur les tissus (notamment de moule bleue), constituent une réelle avancée et rupture par rapport aux méthodes existantes. La faisabilité et l’intérêt de la ddPCR pour la quantification des parasites a également été démontrée. Concernant la cinétique d’accumulation et de dépuration, les expositions en laboratoire ont montré que les 2 espèces de bivalves sont capables de bioaccumuler les 3 protozoaires de façon dose et temps dépendant, que ce soit en exposition simple ou simultanée. Concernant les réponses biologiques, le projet a permis l’acquisition de nouvelles connaissances vis-à-vis de marqueurs mis au point chez les hémocytes de dreissènes par des mesures en cytométrie et en dd-PCR. En complément de l’approche ciblée (période 1), l’approche protéomique a permis d’identifier de nombreuses protéines (671) modulées par C. parvum, ce qui permettra i) de préciser plus finement le mode d’action du protozoaire sur les hémocytes de dreissènes, et ii) identifier de potentiels biomarqueurs d’effet.

Le projet MOBIDIC concernait initialement exclusivement des approches en conditions contrôlées de laboratoire. Une évolution du WP2 est proposée et concernera l’application des nouveaux protocoles d’extraction et quantification des protozoaires dans les mollusques pour évaluer in situ la qualité des masses d’eau. Concernant la dreissène, cette approche bénéficiera d’échantillons prélevés dans différents projets en cours (ZA PIREN-Seine, Projet EQUAL AERM et INTERREG FWVL DIADeM). De plus, suite à l’approche comparative de protéomique, une centaine de protéines d’intérêt seront sélectionnées pour une détection et de quantification de façon simultanée en spectrométrie de masse.
La mise en place de protocoles performants pour la détection des parasites dans les deux espèces de bivalves ouvre des perspectives dans les domaines environnemental et également alimentaire. Ils permettront notamment de mieux caractériser l’exposition de l’homme à ces dangers émergents, par exemple dans le cadre de plans de surveillance.

Le projet, démarré depuis moins de 36 mois, est encore dans sa phase expérimentale et d’acquisition des données. Le projet fait l’objet actuellement de plusieurs communications, de deux chapitres d’ouvrage et de deux articles soumis ou en cours de soumission

Les protozoaires Cryptosporidium spp, Giardia duodenalis et Toxoplasma gondii pour lesquels l'eau constitue une voie de transmission importante sont identifiés comme des priorités de santé publique. Le suivi de la contamination en protozoaires des milieux aquatiques via une détection par immunofluorescence (IF), excepté pour T. gondii, dans l’eau présente plusieurs limites techniques ainsi qu’une variabilité des résultats liée aux paramètres physico-chimiques et météorologiques, ce qui est particulièrement important dans un contexte de changement global. L’accumulation de ces protozoaires au sein d’invertébrés représente une alternative de choix comme outil d’évaluation de la contamination des eaux et présente une rupture vis-à-vis des approches actuelles de recherche de protozoaires en tant qu’indicateurs de la contamination de l’eau. Les avantages portent sur le caractère intégrateur (temporel) de la charge corporelle en pathogènes et la représentativité de la mesure vis-à-vis du site d’exposition (animaux fixés). Afin de disposer d’outils applicables à grande échelle spatiale, deux espèces de moules seront considérées : une côtière, la moule bleue (Mytilus edulis) et une continentale, la moule zébrée (Dreissena polymorpha). L’utilisation de la capacité d’accumulation de ces parasites par nos espèces sentinelles en tant qu’outil nécessite de lever différents verrous scientifiques comme autant de questions scientifiques organisées autour de trois tâches. 1- Il est nécessaire de développer une méthode sensible pour la détection et la quantification simultanées des (oo)cystes des protozoaires dans une matrice complexe (tissus d’invertébrés). MOBIDIC propose de développer des approches moléculaires innovantes rapides et sensibles. 2- Il est nécessaire de valider la représentativité de la charge parasitaire mesurée au sein des tissus mous des invertébrés vis-à-vis du degré de contamination des masses d’eau. Pour ceci il est proposé de définir les cinétiques d’accumulation des différents pathogènes chez les moules, durant des expositions simples ou combinées en conditions contrôlées. 3- La physiologie des moules, sous l’influence d’un grand nombre de facteurs endogènes et environnementaux, peut moduler leur capacités d’accumulation des pathogènes. Ainsi le projet se propose d’appréhender l’influence de paramètres environnementaux sur la capacité d’accumulation des pathogènes par les moules. De façon complémentaire, et étant donné le peu de données dans la littérature, il sera également investigué l’influence possible des protozoaires sur la physiologie des moules et tout particulièrement sur des réponses liées à l’immunité. MOBIDIC se propose d’apporter des connaissances nouvelles sur les interactions entre des protozoaires et les moules dans le but de définir un indicateur fiable de la qualité biologique des masses d’eau dans un souci de préservation de la qualité des ressources et de protection des populations humaines. MOBIDIC produira également des données originales en écotoxicologie sur les effets cumulatifs/interactions entre les contaminants chimique et biologique en lien avec une meilleur compréhension des risques associés aux changements climatiques. Pour atteindre les objectifs, un consortium pluridisciplinaire a été mis en place, associant d’une part des compétences en sciences de l’environnement (écotoxicologie) et de santé humaine (parasitologie) mais également d’autre part des partenaires académiques, institutionnel et privé afin de concilier recherche cognitive et appliquée dans un objectif de transfert de ces compétences aux gestionnaires et utilisateurs des masses d’eau. Ceci est en cohérence avec les priorités issues de la « Stratégie Nationale de Recherche ». Pour faciliter ce transfert, une demande de labellisation du projet a été faite au pôle de compétitivité Hydreos, et différentes sociétés membres de ce pôle participeront au comité de pilotage du projet.

Coordination du projet

Alain Geffard (UMR-I 02 Stress environnementaux et biosurveillance des milieux aquatiques - URCA)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

ACTALIA ACTALIA Sécurité des Aliments
Bio-Rad SNC Bio-Rad SNC
PROTAL-URCA EA 3800 Protozooses transmises par l'alimentation (cryptosporidiose, giardose et toxoplasmose) : mode de contamination et pathogénie
SEBIO - URCA UMR-I 02 Stress environnementaux et biosurveillance des milieux aquatiques - URCA

Aide de l'ANR 411 999 euros
Début et durée du projet scientifique : novembre 2015 - 48 Mois

Liens utiles

Explorez notre base de projets financés

 

 

L’ANR met à disposition ses jeux de données sur les projets, cliquez ici pour en savoir plus.

Inscrivez-vous à notre newsletter
pour recevoir nos actualités
S'inscrire à notre newsletter