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Analyse fonctionnelle de la voie de l'autophagie chez Toxoplasma gondii – Autophago-Toxo

Des fonctions inattendues pour la machinerie d’auto-digestion chez un eucaryote divergent

La machinerie d’autophagie (processus d’auto-digestion) est très conservée de l’Homme aux eucaryotes unicellulaires. Toxoplasma est un pathogène eucaryote unicellulaire chez lequel les fonctions de cette machinerie sont inconnues et nous avons entrepris de les découvrir.

Elucider l’importance de la machinerie d’autophagie pour une famille de pathogènes humains

Peu de choses sont connues sur l’autophagie chez le parasite Toxoplasma gondii et les autres membres du phylum des Apicomplexes (qui inclut des pathogènes d’importance considérable pour la santé publique comme Plasmodium, l’agent du paludisme). Nous avons depuis quelques années entrepris de caractériser les fonctions de la machinerie cellulaire d’autophagie chez ce parasite en combinant des approches de génomique fonctionnelle et d’imagerie du parasite. L’essentialité de plusieurs protéines de cette machinerie (appelées protéines ATG) chez le parasite nous a convaincu qu’il y avait un rôle important joué par plusieurs de ces protéines chez le parasite. Ce rôle semble cependant très différent de l’autophagie canonique que l’on peut trouver chez les autres eucaryotes, y compris les mammifères qui sont hôtes intermédiaires du parasite. Ceci ouvre la perspective vers la découverte de nouvelles cibles thérapeutiques potentielles dans ce processus cellulaire du parasite.

Toxoplasma est un modèle bien plus facile à manipuler génétiquement que la plupart des autres parasites Apicomplexes. Nous pouvons ainsi générer des parasites transgéniques afin d’exprimer une copie auto-fluorescente d’une protéine, ou diminuer spécifiquement l’expression d’un gène de façon conditionnelle. Nous avons ainsi pu produire plusieurs lignées mutées pour l’expression de gènes ATG. La possibilité « d’étiqueter » les protéines avec des molécules auto-fluorescentes nous a également permis de suivre la dynamique d’une protéine comme TgATG8 au cours du cycle cellulaire du parasite par imagerie sur cellules vivantes. Nous avons aussi utilisé des techniques de biochimie des protéines pour isoler et identifier des partenaires de protéines ATG afin de découvrir des indices sur les fonctions originales de ces protéines.

Nous avons découvert un rôle original pour une partie de la machinerie d’autophagie dans le maintien de l’homéostasie d’une organelle appelée l’apicoplaste. L’apicoplaste est un plaste non photosynthétique présent chez la plupart de parasites Apicomplexes, qui contient des voies métaboliques essentielles à la survie des parasites. La protéine TgATG8, ainsi que des protéines régulant son association aux membranes (TgATG3, TgATG4), sont essentielles au maintien du plaste dans le parasite, et donc à la survie de celui-ci. TgATG8 localise à la membrane externe du plaste, où on suppose qu’elle jouerait un rôle dans le positionnement de l’organelle ou un lien avec le cytosquelette lors de la division cellulaire.

Nous sommes aussi en train de caractériser l’autophagie canonique, c’est-à-dire catabolique, chez le parasite. A ce jour, il n’y a pas de démonstration claire de la présence d’une voie catabolique d’autophagie chez les Apicomplexes. Nous savons que des vésicules d’autophagie se forment chez Toxoplasma suite à un stress nutritif par exemple, mais n’avons pas de preuve de la dégradation et du recyclage de leur contenu. Nous essayons de mettre au point un test de mesure de la protéolyse que l’on puisse tester sur des mutants d’autophagie. Nous générons égalament des mutants de la machinerie précoce de formation des vésicules d’autophagie, afin de spécifiquement affecter la voie canonique et non la fonction liée à l’apicoplaste.

L’étude de l’autophagie canonique chez Toxoplasma a un intérêt du point de vue de la recherche fondamentale, car c’est un eucaryote divergent avec une machinerie réduite. Cela pourrait donc fournir des informations considérables sur les composants minimum nécessaires au processus d’autophagie.
Mais clairement, notre priorité est de poursuivre l’étude de la fonction originale de TgATG8 vis-à-vis de l’apicoplaste. Ce rôle inattendu est potentiellement intéressant pour la découverte de nouvelles cibles thérapeutiques, car il touche une fonction critique pour une organelle essentielle à la survie du parasite.

1 article dans journal à comité de lecture
1 chapitre de livre
3 communications orales internationales
1 communication orale nationale
4 communications par affiche nationales

Toxoplasma gondii est le parasite responsable de la toxoplasmose, une maladie qui compromet le développement du fœtus lors d’une contamination de la mère pendant la grossesse et met également en danger la vie de malades immunodéprimés (bénéficiaires de transplantations d'organes ou malades du SIDA). Le tachyzoite, la forme invasive du parasite et responsable des symptômes de la maladie, a un développement intracellulaire obligatoire. Par ailleurs, ce protiste fait partie du phylum des Apicomplexes, qui comprend plusieurs autres pathogènes humains notables tels que Cryptosporidium ou Plasmodium, l’agent du paludisme.
L’autophagie est un processus d’autodigestion de la cellule eucaryote qui, en fait, permet la survie cellulaire et l’adaptation à des conditions de stress telles que le manque de nutriments. En effet, l’autophagie permet le recyclage de composants cellulaires et d’ainsi rediriger les nutriments des processus non-essentiels vers les processus vitaux comme la synthèse de protéines. Le processus d’autophagie débute par la formation d’une vacuole à double membrane, l’autophagosome, qui séquestre les constituants du cytoplasme avant de fusionner avec un compartiment lytique. En plus d’être déclenchée en conditions de stress nutritif ou lors de l’altération d’organelles, l’autophagie peut également être impliquée lors du remodelage cellulaire pendant le développement normal des cellules eucaryotes.
La machinerie d’autophagie est partiellement conservée entre les organismes eucaryotes. Plusieurs protéines centrales à l’autophagie sont présentes chez T. gondii, mais le rôle potentiel du processus dans le développement intracellulaire de ce parasite et des autres Apicomplexes était jusqu’alors largement inconnu. Nous avons récemment montré que la voie d’autophagie est fonctionnelle chez les tachyzoites et peut être stimulée par le manque de nutriments (1). Des études de génétique fonctionnelle (1, 2) nous ont permis de démontrer un rôle crucial pour plusieurs protéines de la machinerie d’autophagie dans la survie du parasite et son développement intracellulaire. Plus précisément, les protéines TgATG3 et TgATG4 semblent importantes pour le maintien d’organelles comme l’apicoplaste ou la mitochondrie.
L’autophagie est donc présente, fonctionnelle et essentielle au développement intracellulaire de T. gondii ; de plus, la régulation du processus autophagique implique plusieurs enzymes, ayant des particularités qui permettent d’envisager une approche pharmaceutique pour interférer de façon sélective avec l’autophagie parasitaire (la cellule hôte ayant également sa propre machinerie d’autophagie). Par conséquent, cette voie cellulaire est un domaine prometteur pour identifier une cible propice à une intervention thérapeutique dans la lute contre les parasites apicomplexes.
Des études plus poussées sont nécessaires pour déterminer les modes de régulation de la voie d’autophagie dans le parasite ainsi que les processus physiologiques dans lesquels elle est impliquée. Nous entreprendrons l’élucidation des fonctions cellulaires de l’autophagie chez Toxoplasma par des approches à plusieurs niveaux : impliquant de l’imagerie cellulaire (pour l’interaction entre autophagosomes et les organelles cibles ou de dégradation), la biochimie et la protéomique (pour l’identification d’acteurs protéiques de l’autophagie parasitaire) et de génétique fonctionnelle (pour l’élucidation du rôle de candidats importants de la machinerie). Ces recherches sont une étape préliminaire obligatoire avant d’identifier des approches pharmacologiques adaptées, mais elles peuvent également amener des informations fondamentales sur la compréhension de la biologie des Eukayotes en général et des Apicomplexes en particulier.

1. Besteiro S, Brooks CF, Striepen B, Dubremetz J-F (2011). PLoS Pathog. 7: e1002416.
2. Kong-Hap MA, Mouammine A, Daher W, Berry L, Lebrun M, Dubremetz JF, Besteiro S (2013). Autophagy. en révision

Coordination du projet

Sébastien Besteiro (UMR5235, Dynamique des Interactions Membranaires Normales et Pathologiques)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

DIMNP UMR5235, Dynamique des Interactions Membranaires Normales et Pathologiques

Aide de l'ANR 210 000 euros
Début et durée du projet scientifique : décembre 2013 - 42 Mois

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