Transport électrocinétique dans une mousse liquide – E-FOAM
L’objectif de ce projet fondamental est d’étudier le transport électro-osmotique dans une classe de matériau où il n’a jamais été exploré : les mousses liquides.
Bien que rencontrées fréquemment dans notre vie quotidienne et utilisées dans de nombreux procédés industriels, les mousses sont des matériaux éphémères. Fortement hors équilibres, elles évoluent irréversiblement et, comme chacun l’a déjà observé en prenant un bain moussant, elles finissent immanquablement par disparaître. Un mécanisme important à l'origine de cette disparition est le drainage du liquide hors de la structure de la mousse, à cause de la gravité. Ce drainage est inévitable. Nous proposons ici un moyen de l’annuler et même de le renverser : l’électro-osmose. Le principe est le suivant : en raison des surfactants ioniques qui couvrent l'interface liquide-gaz, liquide est localement chargé près de cette surface et peut donc être mis en mouvement sous l'effet d'un champ électrique extérieur. En contrôlant le champ appliqué et le flux de liquide résultant, la mousse peut être maintenue dans un état superstable et même être d’une certaine façon rajeunie à la demande.
Après plus d’un siècle d’étude, l’électrocinétique dans les matériaux solides a été largement explorée. Le cas des mousses est cependant nouveau et surtout fondamentalement différent pour trois raisons. D’abord, alors que les canaux artificiels ont une géométrie fixe, les films de savon peuvent adapter leur forme et leur dimension. Comme de nombreux canaux rencontrés dans le monde vivant, ils sont déformables. Ensuite, alors que dans un canal solide les charges sont en général portées par les parois immobiles, dans les films de savon ces charges sont portées par les molécules de surfactants qui recouvrent les interfaces et qui peuvent être mises en mouvement. Enfin, alors que la plupart des solides imposent un non- (ou léger) glissement du liquide sur la paroi, la condition aux limites hydrodynamique imposée par l’interface liquide-gaz met en jeu la rhéologie de la surface et pourra changer d’une condition de non glissement à une condition de contrainte nulle, selon le type de surfactant utilisé.
Nous allons explorer le comportement des mousses sujettes à de l’électro-osmose. Des expériences dédiées seront construites pour caractériser l’électro-osmose aux différentes échelles de la mousse : au voisinage d’une interface recouverte de surfactants, dans un film de savon individuel, dans un canal de liquide à la jonction de trois films – un bord de Plateau – et enfin dans la structure interconnectée d’une mousse macroscopique. A ces fins, des outils de caractérisation comme de la microPIV, des mesures électrocinétiques, de l’interférométrie ou de l’analyse d’images seront mis en œuvre. D’un point de vue théorique, une compréhension globale sera recherchée en combinant des simulations (dynamique moléculaire), des résolutions numériques (éléments finis) et des approches analytiques. Reflétant le caractère multiéchelle de la mousse, ce large spectre d’outils est nécessaire pour faire le lien entre les échelles, de la dynamique des molécules de surfactants jusqu’à l’évolution d’une mousse macroscopique.
Bien que de caractère fondamental, le projet permettra aussi d'explorer d’éventuelles applications comme la réalisation de deux prototypes expérimentaux. Le premier est une puce microfluidique qui permet de stopper ou d'activer la diffusion de gaz à travers deux bulles voisines. Le second prototype vise à générer une colonne de mousse stable, dont la fraction liquide sera homogène aussi bien spatialement qu’au cours du temps.
Coordinateur du projet
Madame Anne-Laure Biance (Institut Lumière Matière)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenaire
ILM Institut Lumière Matière
Aide de l'ANR 188 000 euros
Début et durée du projet scientifique :
août 2013
- 36 Mois