L’étude des mécanismes moléculaires qui contribuent à l’établissement et la maintenance des virus persistants dans leur état léthargique est essentielle pour comprendre les raisons de la résurgence de pathologies virales associées à la réactivation de ces virus. Le projet VIRUCEPTION est conçu pour comprendre l’interaction entre un virus persistant, le virus herpès simplex 1, et la cellule hôte, du point de vue du rôle des domaines nucléaires PML comme relais nucléaires de la réponse antivirale.
Les corps nucléaires PML (PML-NBs) sont des domaines nucléaires majeurs impliqués dans la réponse antivirale intrinsèque contre l’infection virale. Le projet VIRUCEPTION a pour but d’étudier in vivo dans un modèle souris et in vitro dans des cultures de cellules primaires, les mécanismes moléculaires régissant l’activité des PML-NBs pendant le processus d’établissement de la latence d’HSV-1. Nous nous focalisons sur le rôle des protéines associées aux PML-NBs dans l’interception et la séquestration des génomes viraux entrant. Nous avons récemment publié une étude qui montre dans un modèle souris, que le positionnement et la distribution des génomes viraux dans le noyau des neurones infectés par HSV-1 n’était pas aléatoire (Catez et al, 2012). Durant la phase aigüe de l’infection (6 jours post infection (pi)) les génomes viraux entrant forment des structures nucléaires spécifiquement avec les PML-NBs (nommées DNA-containing PML-NBs ou DCP-NBs). Pendant la latence (28 jpi)les DCP-NBs persistent, cependant d’autres profils de génomes viraux sont également observés. Les DCP-NBs répriment la transcription du virus, mais nous ne connaissons ni les mécanismes moléculaires qui sont impliqués dans la formation de ces structures, ni comment elles évoluent durant tout le processus de l’établissement de la latence (de 6Jpi à 28Jpi). Le projet VIRUCEPTION est construit de façon à étudier les facteurs viraux et cellulaires qui mènent à la formation des DCP-NBs. Nous investiguons si la transcription des génomes viraux ou leur réplication sont nécessaire pour initier la formation des DCP-NBs. Nous développons également deux modèles in vitro qui reproduisent la formation de DCP-NBs, (i) des cultures de neurones primaires de souris issus de ganglion trijumeaux qui sont les neurones supportant l’infection latente par HSV-1, (ii) des cultures de fibroblastes primaires humains qui reproduisent certains aspects de la latence, parmi lesquels la formation des DCP-NBs.
L’originalité du projet VIRUCEPTION est d’utiliser la technologie de FISH combinée à l’immunofluorescence pour étudier au niveau de la cellule unique (neurone, fibroblaste) le role des PML-NB comme effecteurs nucléaires de la réponse antivirale contre des génomes viraux entrant. Cette approche est complémentaire aux approches biochimiques utilisées jusqu’à présent pour étudier la latence d’HSV-1. En effet, la latence d’HSV-1 est hétérogène du point de vue de plusieurs caractéristiques moléculaires telles que, l’expression de l’ARN non codant LAT, les marques chromatiniennes apposées sur le génome viral, les profils de génomes viraux et l’association avec des domaines nucléaires…. C’est pourquoi il est essentiel pour une meilleure compréhension de la latence d’HSV-1 d’étudier le comportement des génomes viraux et des protéines cellulaires au niveau de la cellule unique. Au delà de ces aspects, le projet VIRUCEPTION fournira des données essentielles concernant le rôle des PML-NBs dans le contrôle de la biologie d’autres virus persistants ayant un tropisme nucléaire.
La nouveauté du projet VIRUCEPTION est de combiner pour la première fois l’utilisation de modèles in vivo et in vitro de latence d’HSV-1 pour analyser, en utilisant des virus génétiquement modifiés et par l’utilisation de technologie FISH, les mécanismes moléculaires de la formation des DCP-NBs et l’imlication de facteurs viraux et cellulaires dans le déclenchement de la réponse antivirale associée aux PML-NBs.
Au niveau in vivo nous avons été capable de déterminer dans un modèle d’infection de souris, le processus complet de la latence d’HSV-1 du point de vue de l’interaction des génomes viraux avec l’environnement nucléaire de la cellule hôte et plus particulièrement avec les PML-NBs. Nous avons déterminé que les profils des génomes viraux dans les noyaux des neurones infectés changent drastiquement au cours des dix premiers jours de l’infection des neurones des TGs. Ensuite, le virus semble stabilisé du point de vue de la distribution nucléaire des génomes viraux et de leur interaction avec les domaines nucléaires, et ce de façon concomitante avec l’acquisition des marques moléculaires de la latence.
La mise en route rapide du modèle de culture de neurones primaires issus des TG de souris nous a permis de comprendre quels facteurs viraux sont déterminants dans le choix du cycle lytique ou latent, spécialement du point de vue des profils des génomes viraux associés avec ces deux modes d’infection. De plus, nous avons également déterminé certains facteurs cellulaires qui influencent la distribution des génomes viraux dans les noyaux des neurones infectés, et de ce fait, qui participent au choix entre la latence et le cycle lytique.
Le modèle de culture de cellules primaires de fibroblastes humains infectés avec un virus non-réplicatif, mime un des aspects important de la latence virale en relation avec la distribution nucléaire des génomes viraux et leur interaction avec des domaines nucléaires, qui est la formation des DCP-NBs. Nous avons trouvez plusieurs composants des PML-NBs associés avec les DCP-NBs, mais nous avons également découvert certains facteurs d’assemblage de la chromatine qui nous laissent penser qu’un processus de chromatinisation pourrait être lié à la formation des DCP-NBs. Cette découverte nous a permis d’étendre le sujet d’étude sur des aspects initialement non planifiés dans le projet.
Nous possédons maintenant trois modèles (un in vivo, deux in vitro) pour étudier la altence d’HSV-1 du point de vue des interactions entre les génomes viraux et l’environnement nucléaire. Nous allons maintenant utiliser des virus et cellules génétiquement modifiés pour comprendre le rôle de facteurs viraux et cellulaires dans l’interaction entre les génomes viraux et les domaines nucléaires. Parce que nos données publiées et non publiées montrent que la distribution nucléaire des génomes viraux est une caractéristique majeure de l’établissement de la latence virale, nous allons poursuivre nos investigations dans le but de mettre en évidence les mécanismes moléculaires qui contrôlent l’interaction entre les génomes viraux et l’environnement nucléaire.
1.Cavallero S., Huot N., Francelle L., Lomonte P., Naas T., Labetoulle M. 2014. Biological features of herpes simplex virus type 1 latency in mice according to experimental conditions and type of neurones. Invest Ophthalmol Vis Sci. 14-14673.
2. Ramakrishna C, Ferraioli A, Calle A, Nguyen TK, Openshaw H, Lundberg PS, Lomonte P, Cantin EM. Establishment of HSV1 Latency in Immunodeficient Mice Facilitates Efficient In Vivo Reactivation. PLoS Pathog. 2015 Mar 11;11(3):e1004730.
L’étude des mécanismes moléculaires qui contribuent à l’établissement et la maintenance des virus persistants dans leur état léthargique est essentielle pour comprendre les raisons de la résurgence de pathologies virales associées à la réactivation de ces virus. Le projet VIRUCEPTION est conçu pour comprendre un des aspects clés de l’interaction entre un virus persistant, le virus herpès simplex de type 1 (HSV-1), et la cellule hôte, à savoir le rôle des domaines nucléaires PML (PML-NBs) en tant que relais nucléaires de la réponse antivirale.
HSV-1 est un virus pathogène humain, qui reste un problème important de santé publique. HSV1 induit des infections récurrentes du visage (lèvres, nez), et en particulier au nivaux des yeux, provoquant des pathologies oculaires graves. L'infection primaire qui affecte la muqueuse orale est suivie d'une infection secondaire appelée latence se déroulant dans les neurones du système nerveux périphérique. HSV1 peut réactiver et chaque épisode de réactivation au niveau oculaire peut affecter le pronostic visuel. En effet, les infections cornéennes par HSV-1 sont à ce jour la première cause infectieuse de cécité. L’étude des mécanismes moléculaires qui règulent l'équilibre entre la latence et la réactivation d’HSV-1 est donc cruciale pour la compréhension de la biologie du virus. C'est également un défi important pour la conception de nouvelles approches thérapeutiques visant à empêcher le virus de réactiver. En effet, les thérapies antivirales actuelles sont administrées souvent si tardivement que le virus a déjà endommagé certains tissus de façon irréversible. C'est particulièrement vrai quand la réactivation affecte les tissus nobles (œil ou cerveau), ou lorsqu'il s'agit de réactivations provoquées par des immunodéficiences graves comme chez les patients co-infectés par d'autres virus tels que le VIH.
L'étude du processus de latence/réactivation au sein d’un tissu neuronal a été entravée pour plus d'une décennie par l’impossibilité de détecter de façon efficace par fluorescence les génomes viraux latents dans les neurones. Nous avons récemment développé une méthode de détection par Hybridation In Situ Fluorescente (FISH) spécifiquement adaptée pour visualiser les génomes HSV-1 latents. Nous avons démontré que les génomes viraux forment des « clusters » qui sont préférentiellement associés aux corps nucléaires PML (PML-NBs) et que nous avons appelés « DNA-containing PML-NBs » ou DCP-NBs. L’utilisation de souris KO pour PML a permis de démontrer que la protéine PML était directement impliquée dans la formations des DCP-NBs, mais également dans l’expression de l’ARN non-codant viral LAT (pour Latency Associated Transcript) synthétisé durant le processus de latence. Par conséquent, tous les virus associés aux DCP-NBs sont transcriptionnellement silencieux. L’analyse des premières étapes d’infection menant à la latence, nous a permis de démontrer que la formation des DCP-NBs débute très tôt au cours du processus infectieux, suggérant fortement que les DCP-NBs sont des structures impliquées dans la réponse antivirale nucléaire.
Nos données publiées posent de nombreuses questions concernant le rôle des PML-NBs dans l’infection virale. Quels facteurs viraux sont impliqués dans la formation des DCP-NBs ? Est-ce que la transcription des LATs et/ou la réplication du virus favorisent la formation des DCP-NBs ? Quelles protéines associées aux PML-NBs sont responsables de la reconnaissance des génomes viraux entrant dans le noyau et la structuration des DCP-NBs ?... Le projet VIRUCEPTION à pour but de répondre à ces questions en utilisant des modèles d’infection in vivo et in vitro ainsi que des virus génétiquement modifiés. Des modèles in vitro d’infection de cellules primaires seront également utilisés dans lesquels les protéines des PML-NBs pourront être inactivées afin de comprendre le rôle de ces protéines dans la reconnaissance des génomes viraux entrant dans le noyau et dans la formation des DCP-NBs.
Monsieur Patrick Lomonte (Centre de Génétique et de Physiologie Moléculaire et Cellulaire)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
UPR3296 Laboratoire de Virologie Moléculaire et Strucutrale
UMR5534 Centre de Génétique et de Physiologie Moléculaire et Cellulaire
Aide de l'ANR 400 000 euros
Début et durée du projet scientifique :
décembre 2013
- 48 Mois