Beauté idéalisée dans la publicité et accessibilité des pensées négatives – BIPA

Ce projet poursuit un double objectif. Tout d’abord, il s’agira de mieux comprendre comment l’exposition aux images des médias représentant l’idéal féminin de minceur affecte l’accessibilité cognitive des pensées négatives (notamment les pensées liées au suicide) chez les femmes. Ensuite, nous examinerons si un avertissement, précisant que l’image a été retouchée, peut protéger les femmes d’une augmentation de l’accessibilité des pensées négatives lorsqu’elles sont exposées à l’idéal féminin de minceur.

Une littérature conséquente en psychologie sociale indique que l’exposition à des images de l’idéal féminin de minceur est associée à un certain nombre de problèmes psychologiques comme l’insatisfaction corporelle et les troubles du comportement alimentaire (Dittmar, 2009; Grabe, Ward, & Hyde, 2008; Levine & Murnen, 2009). Des recherches récentes montrent également que l’exposition à ces images, par rapport à des images plus réalistes, augmente l’accessibilité cognitive des mots liés au suicide dans une tâche de décision lexicale (Chatard & Selimbegovic, 2011, Etude 6). Cet effet était particulièrement prononcé chez les femmes relativement insatisfaites de leur corps. Cette étude est la première à établir un lien causal direct entre l’exposition aux médias et l’accessibilité cognitive des pensées liées au suicide. D’autres études permettant de mieux comprendre cette relation pourraient donner lieu à d’importants progrès.

Sur la base de la théorie de l’évasion (Baumeister, 1990) et de la théorie des systèmes de but (Kruglanski et al., 2002), Chatard et Selimbegovic (2011) ont proposé qu’une augmentation immédiate et momentanée de l’accessibilité des pensées liées au suicide est une réaction cognitive automatique qui reflète l’activation du moyen le plus efficace d’évasion, lorsque les individus réalisent qu’ils échouent à atteindre un standard important et sont motivés à s’évader, à échapper à soi.

Le premier objectif de ce projet de recherche est de tester la nature automatique de cette réaction. Pour cela, les quatre critères d’automaticité définis par Bargh (1994) seront testés dans quatre études expérimentales. En examinant séparément ces différents critères, nous serons en mesure de décrire précisément le caractère automatique de la réaction étudiée, et donc de mieux la comprendre.

Le second objectif de ce projet est d’examiner si un message d’avertissement, précisant que l’image a été retouchée, réduit l’accessibilité des pensées négatives lorsque les femmes sont exposées à l’idéal de minceur. Pour cela, quatre expériences seront menées. Etant donné que de nombreux pays sont actuellement en train de légiférer sur la nécessité d’apposer des avertissements sur les images publicitaires retouchées, les études de ce projet sont tout à fait d’actualité.

Dans une étude préliminaire, nous avons trouvé qu’un tel avertissement joue un rôle protecteur dans l’immédiat. Afin de poursuivre cette ligne de recherche, nous allons tester : le transfert de l’effet protecteur de l’avertissement d’une image à l’autre ; sa persistance temporelle; son rôle protecteur dans une population particulièrement vulnérable (femmes en surpoids et obèses) ; son rôle dans une population masculine.

Ce projet va contribuer à parfaire notre compréhension des effets des images représentant l’idéal de minceur sur l’accessibilité des pensées négatives chez les femmes. Ce projet permettra également d’informer la population et les responsables politiques de l’intérêt et de l’efficacité des avertissements sur les images retouchées.

Si ce projet s’inscrit principalement dans la psychologie sociale, il est aussi pertinent pour la psychopathologie cognitive et la psychiatrie, en particulier. Cet aspect interdisciplinaire se retrouve dans la composition de la présente équipe de recherche.