Blanc Inter II - SVSE 4 - Blanc International II - SVSE 4 - Neurosciences

Interactions temporelles entre les flux perceptuels conscient et inconscient. – TICUPS

Aux portes de la perception consciente

Interactions temporelles entres les flux perceptuels conscients et inconscients. Une investigation fondée sur l’illusion de cécité induite par le mouvement.

La perception consciente en différé de 100ms : pourquoi et comment ?

La perception consciente nous apparait à la fois facile et instantanée. Pourtant, elle est le résultat de traitements neuronaux intensifs et coûteux en temps. Il n'est donc pas surprenant que le cerveau s'active souvent plusieurs dixièmes de seconde après l'évènement externe qui cause cette réponse. Nous avons récemment révélé que, par-delà ces délais de traitement inhérents à tout système sensoriel, le flux perceptuel de la conscience est encore décalé de 100ms supplémentaires (Wu, Busch, Fabre-Thorpe & VanRullen, 2009). Cette découverte provient de l'utilisation de la cécité induite par le mouvement (MIB en anglais), une technique rendant invisible à la perception consciente un stimulus (par ex. un anneau jaune) qui est néanmoins présent sur la rétine. Une manipulation spécifique (un flash) nous a permis d'induire le retour quasi-immédiat de ce stimulus à la conscience; à notre surprise, les participants voyaient systématiquement l'anneau réapparaître ~100ms avant le flash qui causait cette réapparition. En d'autres termes, le «rechargement« conscient d'une représentation neuronale précédemment établie (celle de l'anneau) prend au moins 100ms de moins que le «chargement« normal d'un nouveau stimulus (le flash). Ceci implique que le flux de la conscience se passe normalement «en différé« de 100ms par rapport à un flux de représentations neuronales déjà traitées mais encore inconscientes. Quelle est la cause, et surtout la fonction de ce délai supplémentaire? Le but de ce projet était d'explorer minutieusement ce délai de 100ms et ses corrélats neuronaux grâce aux dernières techniques neuroscientifiques (analyse EEG temps-fréquence, psychophysique, IRM fonctionnelle), afin d'appréhender les relations temporelles précises entre les flux perceptuels conscient et inconscient.

Notre approche consiste à disséquer, étape par étape, la construction d’une perception consciente, en faisant appel aux techniques actuelles d’imagerie cérébrale: analyses EEG temps-fréquence, IRM fonctionnelle et psychophysique. Les questions posées à chaque étape sont :
1. Corrélats neuronaux de la MIB: quelles sont les différences entre les représentations neuronales d’un stimulus “supprimé” de la perception consciente, et le même stimulus lorsqu’il est consciemment perçu?
2. Chargement vs rechargement: quelle différence de réponse cérébrale (au niveau des oscillations EEG) entre la réapparition d’un stimulus temporairement rendu inconscient (rechargement) et l’apparition d’un nouveau stimulus (chargement) ?
3. Corrélats neuronaux du rechargement : quelles régions cérébrales s’activent sélectivement (en IRMf) lors du rechargement ?
4. Durée et devenir des représentations inconscientes : pendant combien de temps (mesure psychophysique) un stimulus rendu inconscient peut-il conserver son avantage temporel pour l’accès à la perception consciente (rechargement) par rapport à un nouveau stimulus (chargement) ?
5. Stimulation corticale : le délai de 100ms entre flux perceptuels conscients et inconscients peut-il être révélé par une autre stimulation du cortex visuel (masquage psychophysique) ?
6. Cycles de conscience : quel facteur détermine l’avantage temporel relatif entre les processus de chargement et rechargement ? Ce délai varie-t-il à chaque essai, suivant les fluctuations d’une oscillation cérébrale ?

Nous avons démontré, grâce à l’IRMf, l’implication spécifique de certaines régions cérébrales du cortex occipital et pariétal dans le processus de rechargement d’un stimulus temporairement rendu inconscient. De plus, l’analyse EEG démontre que ce rechargement suit un processus cyclique à une fréquence d’environ 7Hz. Ces résultats nous ont permis d’avancer fortement dans notre compréhension des étapes neuronales permettant la construction d’une perception consciente.

L’émergence de la conscience est l’une des questions scientifiques majeures de notre époque. Bien que l’on comprenne certains aspects de l’anatomie et la physiologie du cerveau, et que l’on soit capable de caractériser la séquence d’activations neuronales élicitées par la présentation d’un stimulus donné (comme un anneau jaune), personne ne sait encore quelle portion de cette activité correspond à la reconnaissance consciente et l’expérience phénoménale du stimulus, ou encore ce qui changerait dans ces activations si le même stimulus était présenté sans évoquer de perception consciente. La recherche sur cette question est primordiale, pas seulement parce qu’elle repousse les limites de la connaissance, mais aussi parce qu’elle peut donner lieu à d’importantes retombées médicales, sociétales ou technologiques.

Chacune des 6 questions listées ci-dessus a donné lieu à une expérience distincte, dont la moitié ont été pilotées par le partenaire Français (CerCo, Toulouse), et l’autre moitié par le partenaire Taiwanais (National Taiwan University), toujours en collaboration avec l’autre partenaire. Toutes ces expériences ont produit des résultats interprétables, qui ont été pour la plupart présentés dans des conférences scientifiques internationales (5 conférences), et ont donné ou donneront lieu à des publications dans les journaux scientifiques spécialisés du domaine (1 article publié dans une revue internationale à comité de lecture : « Neuroscience of Consciousness », 5 articles encore en préparation).

La perception consciente nous apparait à la fois facile et instantanée. Pourtant, elle est le résultat de traitements neuronaux intensifs et coûteux en temps. Il n'est donc pas surprenant que le cerveau s'active souvent plusieurs dixièmes de seconde après l'évènement externe qui cause cette réponse. Nous avons récemment révélé que, par-delà ces délais de traitement inhérents à tout système sensoriel, le flux perceptuel de la conscience est encore décalé de 100ms supplémentaires (Wu, Busch, Fabre-Thorpe & VanRullen, 2009). Cette découverte provient de l'utilisation de la cécité induite par le mouvement (MIB en anglais), une technique rendant invisible à la perception consciente un stimulus (par ex. un anneau jaune) qui est néanmoins présent sur la rétine. Une manipulation spécifique (un flash) nous a permis d'induire le retour quasi-immédiat de ce stimulus à la conscience; à notre surprise, les participants voyaient systématiquement l'anneau réapparaître ~100ms avant le flash qui causait cette réapparition. En d'autres termes, le "rechargement" conscient d'une représentation neuronale précédemment établie (celle de l'anneau) prend au moins 100ms de mois que le "chargement" normal d'un nouveau stimulus (le flash). Ceci implique que le flux de la conscience se passe normalement "en différé" de 100ms par rapport à un flux de représentations neuronales déjà traitées mais encore inconscientes. Quelle est la cause, et surtout la fonction de ce délai supplémentaire? Reflète-t-il par exemple une nécessaire ré-entrée (feedback) des signaux avant l'accès conscient? Ou un temps d'activation minimal pour la conscience? Le but de ce projet est d'explorer minutieusement ce délai de 100ms et ses corrélats neuronaux grâce aux dernières techniques neuroscientifiques (analyse EEG temps-fréquence, TMS, IRM fonctionnelle), afin d'appréhender les relations temporelles précises entre les flux perceptuels conscient et inconscient. Ces résultats pourraient engendrer des avancées considérables dans l'exploration des corrélats neuronaux de la conscience. Ce projet est un effort collaboratif entre les deux auteurs principaux de la découverte originale, R. VanRullen (basé en France) et C-T. Wu qui a récemment ouvert un laboratoire indépendant à Taiwan.

Coordination du projet

Rufin VanRullen (Universite Paul Sabatier - Centre de Recherche Cerveau et Cognition) – rufin.vanrullen@cnrs.fr

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

UPS-CerCo Universite Paul Sabatier - Centre de Recherche Cerveau et Cognition
National Taiwan University School and Graduate Institute of Occupational Therapy College of Medicine

Aide de l'ANR 157 572 euros
Début et durée du projet scientifique : mars 2013 - 36 Mois

Liens utiles

Explorez notre base de projets financés

 

 

L’ANR met à disposition ses jeux de données sur les projets, cliquez ici pour en savoir plus.

Inscrivez-vous à notre newsletter
pour recevoir nos actualités
S'inscrire à notre newsletter