INEG - Métamorphoses des sociétés. Inégalité - Inégalités.

Périphéries, marges : interpréter les relations aux centres dans la mondialisation. – PERIMARGE

PERIMARGE

Périphéries, marges : interpréter les relations aux centres dans la mondialisation<br /><br />Avec l’accélération des échanges mondiaux, les espaces situés en position périphérique ou marginale sont liés à des centres plus nombreux et divers que par le passé. Des flux de capitaux, d’information, de normes… de plus en plus intenses et complexes interagissent avec des sociétés spécifiques et avec leurs projets. Leur analyse est nécessaire pour comprendre les transformations socio-spatiales contemporaines.<br />

Comprendre les processus d’évolution des espaces périphériques et la recomposition des inégalités socio-spatiales dans la mondialisation, à partir d’études de cas en Amérique Latine et en Afrique.

Les enjeux et objectifs du projet se déclinent à plusieurs niveaux, qui sont complémentaires. Il s’agit, en premier lieu, de comprendre les mécanismes de transformation d’espaces caractérisés de longue date par les inégalités de conditions sociales, économiques et politiques subies par leurs habitants en comparaison avec celles de leurs concitoyens. Ces inégalités peuvent être liées à des formes de dépendance par rapport aux centres nationaux ou au contraire à un certain abandon, dont les effets peuvent être renforcés par l’éloignement physique. Ces périphéries se transforment de façon accélérée sous l’influence de l’étape actuelle de la mondialisation. Celui-ci engendre des interactions complexes dont l’analyse précise reste à faire : notamment, arrivée de nouveaux acteurs, de capitaux, introduction de nouvelles normes, aménagement renforcé des territoires et mobilisation accrue de leurs ressources, accès de la population à de nouveaux moyens d’information et d’action (internet, téléphonie mobile, services bancaires, réseaux de contacts internationaux…). Il s’agit, en deuxième lieu, de comprendre la mondialisation elle-même et son rôle dans les mutations des inégalités socio-spatiales, en l’observant à travers le prisme de processus qui œuvrent de façon particulièrement visible et rapide dans les espaces périphériques. La comparaison entre les huit études de cas doit nous permettre de distinguer les processus généraux de ceux qui sont propres à des contextes particuliers. Un troisième enjeu consiste à rendre nos résultats utilisables par d’autres chercheurs comme par les acteurs de la gouvernance, pour améliorer l’analyse et la gestion de ces espaces. Pour répondre à ces trois enjeux, nous proposons une méthode d’analyse centrée sur les flux et relations, matériels et immatériels, tels qu’ils se mettent en place depuis les centres vers les périphéries et inversement. <br />

La méthode part du modèle graphique d’A. Reynaud (1981), qui propose une typologie des flux entre un centre et des périphéries, pour analyser les évolutions de ces dernières. Nous proposons d’actualiser ce modèle en prenant en compte la multiplication des centres, aux hiérarchies moins claires que par le passé, et la diversification des flux, matériels et immatériels, dans la mondialisation contemporaine. Le modèle doit intégrer également la capacité des territoires périphériques à développer de nouveaux projets en profitant de ces interactions. Nous sommes partis d’un modèle graphique provisoire discuté lors de l’atelier de lancement (voir illustration déposée ci-dessous), qui a été enrichi par la suite à partir de plusieurs choix méthodologiques. Le premier réside dans le découpage de chaque terrain objet de l’étude en plusieurs sous-espaces, qui n’entretiennent pas avec les centres des relations similaires. Le deuxième choix méthodologique consiste à repérer les flux et relations tels qu’ils apparaissent sur le terrain, à l’aide d’un schéma centré sur celui-ci, en gardant pour plus tard une analyse plus précise des « centres ». Un troisième outil consiste en l’utilisation d’une grille d’analyse qui propose des outils de type quantitatif et qualitatif pour saisir et estimer l’importance relative de chaque flux ou relation repérés. L’élaboration simultanée du schéma et de la grille met en évidence les flux et permet de repérer les liens entre eux. La collecte d’informations sur les flux a également fait l’objet d’une discussion sur les méthodes à mettre en œuvre, en fonction d’aspects théoriques et pratiques. Plusieurs outils, issus des modèles conceptuels de données, des SIG et de la géographie des relations, sont utilisés, grâce aux compétences diversifiées des membres de l’équipe. La mise en commun des éléments qui donneront lieu à la comparaison, à partir des études de cas, est en cours d’affinage.

L’atelier de lancement, puis les réunions de l’équipe lors d’un colloque co-organisé par le Centre d’information géographique de l’université Catholique de Lima (CIGA) en octobre 2013 au Pérou, puis à une école chercheurs proposée par le CIRAD et l’université fédérale du Para (UFPA) en juin 2014 au Brésil, ont permis de préciser et de mettre en œuvre les étapes de la recherche. Le premier résultat a été l’élaboration d’un modèle graphique provisoire, mettant l’accent sur les éléments à actualiser : multiplicité des centres, différenciation des territoires locaux en fonction des flux et relations, existence de projets autonomes ; et d’une grille générale à remplir pour chaque type de flux ou relation. Le deuxième résultat obtenu a été la description de la trajectoire de chaque territoire étudié au cours des 30 dernières années : principales évolutions physiques, économiques, sociales, politiques. Cette description prend en compte la différenciation interne à chacun des territoires choisis pour l’étude. Nous avons obtenu simultanément un repérage qualitatif des flux apparus, modifiés ou disparus en particulier pendant les 10 dernières années, également pour chaque étude de cas, en nous appuyant sur notre connaissance des dynamiques territoriales et des jeux d’acteurs dans les périphéries étudiées. L’élaboration en parallèle d’un schéma recentré sur les études de cas et d’une grille améliorée ont contribué à ce repérage. Par ailleurs, les premiers étudiants participant au projet ont soutenu leurs mémoires ou rédigé leurs rapports de stage. Nous sommes à présent dans la phase de collecte d’informations (qualitative ou quantitative selon les caractéristiques du flux) pour chacun des flux (de capitaux, personnes, produits, informations, normes) ou des ensembles de flux repérés. La méthode à privilégier pour cette étape a été discutée afin de faciliter l’étape suivante de comparaison entre les études de cas.

Nous poursuivrons au cours des prochains mois les travaux d’enquêtes. Il s’agit de détailler et approfondir la description des différents flux repérés et de mesurer leurs importances respectives, grâce aux équipes locales, aux stagiaires et aux missions restant à effectuer. Pour certains terrains, tout particulièrement au Tchad, la possibilité de mettre en œuvre les enquêtes dépendra de l’amélioration des conditions de sécurité et de l’obtention des autorisations.
Il nous faudra ensuite revisiter, pour chaque étude de cas, l’analyse des dynamiques territoriales et des jeux d’acteurs effectuée dans l’étape précédente. Nous reviendrons ensuite au modèle général qui inclut également les centres et leur description. En raison des contraintes de temps, et de moyens humains, l’analyse des centres éloignés se limitera à une description générale, qui s’effectuera à partir de la bibliographie disponible et des enquêtes auprès des émissaires de ces centres.
La mise en commun des résultats obtenus pour les huit études de cas, qui suppose des processus de sélection et de mise en forme, doit se mettre en place progressivement au cours des mois à venir. Nous organiserons au printemps 2015 un atelier qui réunira tous les membres de l’équipe, afin de faire le point sur ce processus de comparaison finale des flux et relations décrits pour les huit études de cas et pour discuter du modèle que nous proposerons comme résultat final de notre recherche. Nous organiserons également le colloque final et les missions de restitution auprès des sociétés locales.
Parallèlement, nous préparerons au cours des prochains mois les publications intermédiaires dans des revues à comité de lecture, qui porteront sur les thématiques transversales repérées à partir de la première phase de la recherche, comme autour des méthodes utilisées. Les publications finales seront organisées lors de l’atelier de mai 2015.

Communications les plus représentatives :
Auquier, C., Chaléard, J.-L., Gluski, P., Lortic, B., Marshall, A., Mesclier, É., Piron, M. 2013 “Geografía de Olmos y mundialización”. X° Congreso Nacional y V° Congreso de Geografía de las Américas. Trujillo, Pérou, 3-5 octubre del 2013.

Bernex, N. ; Tavera, M. « El modelo Centro-Periferia : caso de cuatro localidades de la carretera Iquitos-Nauta ». X° Congreso Nacional y V° Congreso de Geografía de las Américas. Trujillo, Pérou, 3-5 octubre del 2013.

Chaléard, J.-L., Adjoba Koffi-Didia, M., Mesclier, É., 2013 « Farming and metropolisation in the surroundings of Abidjan (Ivory Coast) ». Présentation au colloque ECAS 2013 ( 5E European Conference on African Studies), Lisbonne, 29 juin 2013.

Huamantinco, A. 2013. « Influencias mundializadas y dinámicas endógenas en la comunidad campesina de Jicamarca ». X° Congreso Nacional y V° Congreso de Geografía de las Américas. Trujillo, Pérou, 3-5 octubre del 2013.

Perrier Bruslé, L., 2013, “Dinámicas territoriales en un margen boliviano. El Norte La Paz en la encrucijada de la integración”, X° Congreso Nacional y V° Congreso de Geografía de las Américas. Trujillo, Pérou, 3-5 octubre del 2013.

Piraux M, Simões A, Tonneau JP. 2013. « Entre el agro-extractivismo y el cultivo de palma. Cambios recientes en las dinámicas de ordenamiento territorial del Baixo Tocantins en la Amazonia brasileira. El caso de la municipalidad de Mocajuba ». X° Congreso Nacional y V° Congreso de Geografía de las Américas. Trujillo, Pérou, 3-5 octubre del 2013.

Publications:
Mesclier, É., Marshall, A., Chaléard, J.-L., Auquier, C., 2013. « L’agriculture entreprenariale d’exportation : un choix politique aux enjeux complexes ». Problèmes d’Amérique latine n°88, 55-76

Perrier Bruslé L, Gozalvez B. 2014, El Norte La Paz en la encrucijida de la integración. PLURAL – IRD éditions.

Dans un contexte de mondialisation, la croissance laissait espérer une réduction des inégalités territoriales par l’intégration des périphéries à la dynamique des lieux centraux. Cependant, un grand nombre d’espaces se distinguent toujours des centres par les mauvaises conditions de vie de la majorité de la population, auxquelles s’ajoutent souvent la violence des affrontements entre les acteurs, l’amplitude des spoliations et les dégradations de l’environnement. Ces espaces et les conflits qui s’y déroulent sont parfois devenus une menace pour la stabilité de gouvernements nationaux.

Comment comprendre la multiplication de tels espaces ? Nous considérons qu’il faut avant toute chose en étudier le fonctionnement. Nous pouvons pour cela utiliser le modèle centre-périphérie, à condition de le revisiter. Le modèle centre-périphérie, tel qu’il a été formalisé par A. Reynaud dans les années 1980 à partir de l’analyse de la dissymétrie des flux, a permis dans les décennies passées de mieux comprendre la création et la reproduction des inégalités entre les lieux. Dans ce modèle, le centre se constitue classiquement par le biais d’un processus historique où domination politique et économique se renforcent mutuellement. La périphérie dépendante pourvoit le centre en ressources, sans bénéficier de flux de biens et de capitaux en retour, ou perd ses habitants, dans une indifférence d’autant plus grande qu’elle est située loin des regards. Une des forces de ce modèle est qu’il pouvait rendre compte d’inégalités spatiales d’échelles diverses, quartiers d’une ville, régions d’un pays ou pays du monde. Par ailleurs, il a permis à A. Reynaud de différencier des types de périphéries, en fonction de la nature, de l’intensité et de la combinaison des flux qui les reliaient au centre.

Depuis une trentaine d’années, la mondialisation a complexifié ce schéma. Elle atteint en effet tous les espaces de la planète, les sort de leur invisibilité, y amène investissements, nouveaux acteurs, nouvelles normes. Notre hypothèse est que ces nouveaux flux conduisent à une reconfiguration des asymétries spatiales entre centres et périphéries et laissent entrevoir l’émergence de nouveaux types d’espaces. Un modèle graphique interprétatif qui intégrera les flux entre les centres et les périphéries comme le modèle d’A. Reynaud, tout en prenant en compte leur plus grande diversité, permettra de comprendre et faire comprendre les situations de ces espaces. Leur originalité par rapport aux périphéries décrites dans les années 1980 nous conduit à les désigner par le terme de marges mondialisées.

Nous partirons d’un modèle provisoire élaboré à partir des connaissances que nous pourrons réunir sur les flux reliant les marges aux centres dans la mondialisation, les participants apportant leur expertise sur les types de flux dont ils dominent l’étude. La robustesse de ce modèle sera testée en collectant des données relatives aux flux sur des territoires déjà étudiés par les membres du projet et qui seront abordés au prisme de la méthodologie et des objectifs communs. Nous intégrerons ensuite ces données à des bases, qui nous permettront de confronter le modèle initial à la réalité des flux entrant et sortant des marges, afin de l’améliorer. Ces résultats seront finalement diffusés. S’il s’agit bien d’une recherche fondamentale, ses conclusions pourront aider les sociétés locales et nationales à comprendre les modes d’insertion de leurs espaces dans la mondialisation et à concevoir les stratégies de développement spécifiques qu’elles peuvent mettre en œuvre, à partir de diagnostics mieux étayés théoriquement.

Coordination du projet

Evelyne MESCLIER (Pôle de Recherche pour l'Organisation et la Diffusion de l'Information Géographique) – evelyne.mesclier@gmail.com

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

PRODIG / CNRS Pôle de Recherche pour l'Organisation et la Diffusion de l'Information Géographique
PRODIG Pôle de Recherche pour l'Organisation et la Diffusion de l'Information Géographique
CIRAD CIRAD
IIGEO Instituto de Investigaciones Geográficas
CIGA Centro de Investigación en Geografía Aplicada

Aide de l'ANR 299 926 euros
Début et durée du projet scientifique : janvier 2013 - 36 Mois

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