Ecosystème intestinal du grand et très grand prématuré: analyse du microbiote, implications cliniques à court et long term – EPIFLORE

Les enfants inclus appartiennent à la cohorte de naissance française EPIPAGE 2 et seront suivis 12 ans. Ils sont nés à un âge gestationnel <32 semaines d’aménorrhée. Des selles ont été prélevées à 1 semaine, 1 mois et à la sortie du service de néonatologie. Un prélèvement supplémentaire a été effectué en cas d’ECUN. La composition microbiologique des selles est analysée par séquençage du gène codant l’ARN16S, plus de la culture pour les cas d’ECUN.

Les premiers résultats concernent les ECUN avec 14 cas analysés, appariés à 68 contrôles. L’analyse par culture montre une association significative entre la colonisation par le genre Clostridium et par l’espèce Staphylococcus aureus et l’ECUN. Les résultats par pyroséquençage est en fin d’analyse. L’analyse en parallèle des 105 cas d’ECUN de la cohorte Epipage 2 confirme l’importance du microbiote dans la survenue d’une ECUN.

Actuellement la prise en charge de l’ECUN est empirique en l’absence de connaissance exacte sur sa physiopathologie. La relation mise en évidence entre la composition du microbiote et la survenue d’une ECUN ouvre les portes vers la recherche d’un marqueur précoce de cette pathologie. Cela devrait permettre de traiter de façon spécifique et d’envisager une approche préventive.

Un manuscrit concernant les facteurs cliniques et biologiques associés à la survenue d’un cas d’ECUN est en cours d’écriture, à partir des données d’EPIPAGE 2 et des microbiologiques d’EPIFLORE.

La prématurité, et plus particulièrement la grande prématurité, est actuellement en augmentation et est une cause majeure de mortalité et de morbidité. Pendant leurs premiers jours de vie, les grands prématurés, c'est-à-dire nés à un âge gestationnel de moins de 33 semaines, ont un risque élevé de développer des pathologies infectieuses, comme des sepsis ou des infections d’origine gastrointestinale comme l’entérocolite ulcéro-nécrosante (ECUN). Par ailleurs, l'association entre la prématurité et/ou un petit poids à la naissance et des pathologies chroniques révélées plus tard au cours de la vie a été rapportée. A l'heure actuelle, le rôle du microbiote intestinal semble de plus en plus évident dans le maintien de la santé de l'hôte. En effet, des études montrent des liens entre des dysbioses (ou déséquilibres bactériens) de ce microbiote et le développement de pathologies telles que les maladies inflammatoires chroniques de l'intestin, l'obésité ou l'allergie. La mise en place du microbiote intestinal au cours des premières semaines de vie semble jouer un rôle crucial dans la maturation des diverses fonctions associées au microbiote. Ces différents éléments ont conduit à l’intérêt de développer des stratégies préventives par le biais de la manipulation du microbiote par l’utilisation de probiotiques et/ou prébiotiques.
Des études récentes ont mis en évidence une colonisation microbienne intestinale anormale chez les enfants prématurés, et plus particulièrement chez les grands prématurés. Ce profil de colonisation anormale pourrait constituer un facteur de risque dans le développement de pathologies d'apparition précoce, mais également plus tardives au cours de l'enfance. La supplémentation alimentaire par des probiotiques chez le prématuré a ainsi été recommandée par certains comités d’experts. Cependant, si plusieurs méta-analyses ont montré l’intérêt d’une telle supplémentation, des controverses ont émergé, en particulier en concernant le très grand prématuré. Des études améliorant la connaissance du microbiote chez le prématuré sont donc nécessaires.
Le projet EPIFLORE s’inscrit dans ce contexte et a pour but de faire une analyse à large échelle de l’établissement du microbiote chez le grand prématuré. Ce projet profite de l’opportunité de 2 cohortes françaises qui ont débuté en 2011 : (1) EPIPAGE 2 qui a inclus tous les prématurés nés en France et (2) ELFE qui a inclut tous les nouveau-nés à terme et les prématurés d’âge gestationnel élevé. Tous les enfants inclus seront suivis jusqu'à 12 ans. Le projet EPIFLORE a 3 objectifs: (1) étudier à grande échelle le microbiote intestinal spécifique de nouveau-nés grands prématurés avec une approche multicentrique prenant en compte la variabilité interindividuelle et la variabilité liée au centre, (2) de relier la grande prématurité au développement de pathologies à court et plus long terme et (3) de rechercher des relations entre le profil du microbiote et le développement de sepsis ou d’ECUN. Six cent soixante enfants provenant de 19 centres de soins intensifs de niveau III et appartenant à la cohorte EPIPAGE 2 ont été inclus. Des échantillons de selles ont été recueillis prospectivement entre J3 et J7, J23 et J30, et à la sortie de service de soins intensifs (en général entre 34 et 36 semaines d’AG). L'analyse du microbiote sera effectuée par une technique de pointe, à haut débit : le pyroséquençage 454-GS FL-X Titanium du gène codant l'ARN ribsomal 16S amplifié qui permet de faire une analyse qualitative et quantitative des espèces moléculaires présentes. L’analyse d’un prélèvement de selles effectué à la sortie de la maternité sur un groupe contrôle de 200 enfants appartenant à la cohorte ELFE et provenant de centres répartis sur la France sera inclus. La comparaison des enfants appartenant à ces 2 cohortes permettra de déterminer le risque pour un grand prématuré de développer des pathologies à court et long terme.