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Fondements et déterminants de la compensation au moment du divorce – COMPRES

Justifications et modalités des formes de compensation économique après divorce

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Mariage, divorce et compensation des inégalités de genre : entre solidarité privée et solidarité publique

Au caractère indissoluble du mariage et à la distribution sexuée des rôles a répondu pendant longtemps le versement d’une pension alimentaire viagère après divorce : l’homme assurait des revenus à son ex-épouse, indépendamment des sommes versées pour les enfants communs. La loi a abandonné ce modèle en 1975 en instaurant une prestation compensatoire (PC), préférant au versement d’une pension un versement en capital, destiné à compenser la disparité des niveaux de vie au moment de la séparation et dans un avenir prévisible. Cette loi et les réformes ultérieures manifestent l’idée d’une égalité formelle entre époux et renforce le principe d’un règlement pour « solde pour tout compte » au moment du divorce. Le temps du « démariage » n’est pas pour autant celui de l’égalité des sexes : on sait que l’investissement dans les activités domestiques et l’éducation des enfants, les évolutions des carrières professionnelles comme les revenus des hommes et des femmes restent très différents. Pourtant, alors que les conditions sociales de son versement semblent encore réunies, une PC est rarement demandée et elle est prévue dans 12,5% seulement des divorces, parallèlement à une baisse continue des sommes allouées. Par ailleurs, les critères de décision fournis au juge restent ambigus et oscillent entre logique alimentaire (assurer des ressources minimales), logique de compensation (compenser la disparité des revenus) et logique indemnitaire (compenser le manque à gagner de l’épouse lié à son investissement domestique). Le projet s’interroge donc sur les fondements théoriques, empiriques et politiques du versement d’une prestation compensatoire. Il se propose également de comparer les solutions du droit français avec celles d’autres pays européen et d’analyser comment les praticiens (avocats, magistrats) font face aux contradictions et ambigüités lorsqu’ils doivent demander, octroyer ou fixer le montant de PC. Enfin, le projet ambitionne d’élaborer un outil d’aide (barème).

Axe 1 Réflexion théorique et empirique sur les justifications du versement d’une prestation compensatoire.
_ Examiner les raisonnements juridiques et l’économiques pouvant justifier l’octroi de ce type de transfert, à partir de la production doctrinale et institutionnelle française pour les juristes, de la littérature économique internationale pour les économistes. On est alors confronté à 3 types d’approches (fonction alimentaire, fonction compensatoire, fonction indemnitaire).
_Mettre à l’épreuve l’hypothèse d’une inégalité de genre spécifique aux couples mariés, le mariage constituant alors un facteur aggravant de l’inégalité. L’hypothèse confirmée constituerait une justification empirique de l’existence d’une prestation. Contrepoint : l’équité entre couples mariés et non mariés.
_ Identifier les systèmes de compensation liés à la présence d'enfants et/ou au statut matrimonial (marié/pas marié/pacsé) dans les dispositifs actuels de protection de sociale.
Axe 2 Analyse des déterminants de la demande d’une prestation compensatoire.
_Comparer les déterminants légaux et jurisprudentiels du droit français et d’autres droits européens.
_ Déterminer, à partir d’une enquête par entretiens menés auprès des avocats, comment se joue en amont de la procédure judiciaire, la formulation des demandes en justice, entre revendication d’une égalité et négociation sur les autres conséquences du divorce.
Axe 3 Analyse des déterminants de l’octroi d’une prestation compensatoire et des montants accordés.
Cette analyse s’appuiera sur l’analyse d’un large échantillon de décisions judiciaires de première instance (15000) et d’appel (2000)

Axe 4 Création d’un outil d’aide à la décision pour fixer les montants de prestation compensatoire
_Collecte et analyse des barèmes existants, en France et à l’étranger.
_ Simulation de ces derniers à partir de l’échantillon de décisions de justice collecté l’analyse (axe 3)
_Création d’un outil d’aide à la décision

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Ce projet aboutira à développer un champ de recherche peu exploré en France (et peu abordé internationalement) alors même que les questions concernent une fraction importante de la population compte tenu du nombre élevé de divorces et que les évolutions du droit et de la société peuvent avoir des conséquences majeures, juridiques comme économiques.
Il propose, dans le cadre d’une démarche interdisciplinaire, une analyse du droit fondée sur une véritable interaction entre économistes et juristes, de façon à faire évoluer conjointement l’analyse économique et l’analyse juridique du divorce et à proposer des outils et des politiques publiques applicables. Cette perspective est d’autant plus intéressante que l’économie du droit reste encore principalement théorique et les approches empiriques sont rares, que le droit de la famille reste encore principalement doctrinal et les approches empiriques sont inexistantes.
Il permet aux économistes de construire une méthodologie reposant sur des analyses économétriques menées à partir de données issues d’une part de l’autorité judiciaire (corpus de décisions de justice), d’autre part d’enquêtes nationales, en mobilisant des compétences reconnues tant dans la collecte que dans le traitement de ces données.
Il permet aux juristes de participer à l’élaboration d’une telle méthodologie , en veillant à ce que la logique juridique ne soit pas ignorée (analyse des décisions de justice) et en permettant de valider les résultats proposés aux yeux des juristes comme aux yeux des économistes.
Le projet propose en outre l’élaboration d’un outil d’aide à la décision (création d’un barème de pension compensatoire) à destination du monde judiciaire français, à des fins opérationnelles.

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Au caractère indissoluble du mariage et à la distribution sexuée des rôles sociaux a répondu pendant longtemps le versement d’une pension alimentaire (viagère) après divorce : l’homme devait assurer des revenus à son ex-épouse, indépendamment des sommes versées pour l’éducation des enfants communs. En France, la loi a abandonné en partie ce modèle en 1975 en instaurant une « prestation compensatoire ». Il s’agissait de préférer au versement d’une pension un versement en capital supposé compenser la disparité des niveaux de vie au moment de la séparation et dans un avenir prévisible. Cette loi n’a pas pour autant mis fin aux pensions viagères et elle a été suivie d’une série de réformes destinées à la fois à favoriser le versement en capital et à limiter les montants retenus. Ce mouvement manifeste l’idée d’une égalité formelle entre époux et renforce le principe d’un règlement pour « solde pour tout compte » au moment du divorce. Le temps du « démariage », acquis, n’est pas pour autant celui de l’égalité des sexes : parallèlement à la participation accrue des femmes sur le marché du travail et à la baisse de la fécondité, on sait que l’investissement dans les activités domestiques et l’éducation des enfants, les évolutions des carrières professionnelles comme les revenus des hommes et des femmes restent très différents.
Pourtant, alors que les conditions sociales de son versement semblent encore réunies, une prestation compensatoire est rarement demandée à l’occasion des procédures de divorce et 12,5% des décisions de divorce en prévoient effectivement une, parallèlement à une baisse continue des sommes allouées. Par ailleurs, les critères de décision fournis au juge par le Code civil restent ambigus et oscillent toujours entre une logique alimentaire (assurer des ressources minimales à l’ex-épouse) et une logique de compensation ou indemnitaire (compenser le manque à gagner de l’épouse lié à son investissement domestique au détriment de son investissement professionnel). Par conséquent, les décisions rendues ne permettent pas de comprendre les logiques de détermination du montant des prestations compensatoires.
En rassemblant des chercheurs en droit, en économie et en sociologie, et des praticiens (juges et avocats), ce projet propose donc de s’interroger sur les fondements théoriques, empiriques et politiques du versement d’une telle prestation. Il se propose ensuite d’analyser scientifiquement comment les praticiens (avocats, juges de première instance, juges d’appel) font face aux contradictions et aux ambigüités lorsqu’ils doivent prendre une décision d’octroi et de fixation d’un montant de prestation compensatoire. Enfin, forts des enseignements tirés des analyses précédentes, le projet ambitionne d’élaborer un outil d’aide à la fixation d’un montant de prestation compensatoire (barème) susceptible d’être proposé au Ministère de la Justice.

Coordination du projet

Isabelle SAYN (CENTRE DE RECHERCHES CRITIQUES SUR LE DROIT) – isabelle.sayn@univ-st-etienne.fr

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

CERCRID CENTRE DE RECHERCHES CRITIQUES SUR LE DROIT
BETA Bureau d'Economie Théorique et Appliquée

Aide de l'ANR 148 553 euros
Début et durée du projet scientifique : octobre 2012 - 36 Mois

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