BIOADAPT - Adaptation - des gènes aux populations.Génétique et biologie de l'adaptation aux stress et aux perturbations

Adaptation aux changements environnementaux rapides dans des communautés fragmentées d'eau douce – AFFAIRS

Comprendre la réponse d’une communauté d’espèces aux contraintes d’un milieu fragmenté

Les communautés animales répondent au changement par la perte/le gain d'espèces et par l'évolution de ces espèces. Comprendre ce phénomène est crucial à une époque où l'homme modifie rapidement le climat et l'usage des terres. Nous étudions ces processus dans les eaux douces des Antilles.

Les eaux douces, des milieux fragmentés soumis à de nombreuses pressions anthropiques

L’homme est responsable de nombreux changements écosystémiques, via son effet sur le climat, les introductions d’espèces et l’anthropisation. Les milieux d’eau douce, tels que mares et étangs, y sont particulièrement exposés. Face à ces changements la flore et la faune réagissent à deux niveaux : (i) au sein d’une espèce, la sélection favorise des génotypes adaptés aux nouvelles contraintes; (ii) au sein d’une communauté, certaines espèces augmentent en abondance au détriment d’autres, selon leurs traits biologiques. Notre objectif est de mieux comprendre et prédire ces deux types de changement interdépendants, évolutif et écologique, en étudiant une communauté-modèle : les escargots d’eau douce des Antilles Françaises. <br /> Une particularité des eaux douces est de se présenter en fragments (par ex. des mares), soumis à une forte instabilité des niveaux d’eau. Les populations animales y sont régulièrement soumises à des cycles d’extinction et recolonisation. Un des enjeux de notre étude est de distinguer les changements à long terme de cette dynamique rapide, naturelle, d’extinction-recolonisation. Cette problématique étant commune à de nombreux milieux, les développements méthodologiques faits dans notre étude ont une portée générale et serviront beaucoup d’autres recherches visant à prédire les réponses des écosystèmes face au changement global. <br />

Pour modéliser de manière réaliste des communautés fragmentées nous combinons plusieurs approches.
- Nous devons estimer des processus d’extinction-recolonisation sans supposer qu’un équilibre est atteint (car nous étudions les changements). Pour cela il faut des jeux de données de grande taille et répétés dans le temps. Nous utilisons un suivi de plus de 200 sites visités tous les ans depuis 15 ans.
- Aucun écologiste ne peut garantir complètement qu’une espèce est absente même s’il ne l’a pas trouvée ; nous répétons nos visites pour évaluer la probabilité de détection. L’analyse de ces données est complexe et nous développons des modèles statistiques originaux, réalistes et flexibles, pour cela.
- Certaines espèces persistent dans le sol, indétectables, quand les mares sont à sec. Nous intégrons cette possibilité dans nos modèles statistiques. Nous avons aussi développé une méthode moléculaire pour tester si une population retrouvée après un à-sec provient d’individus locaux ou d’immigrants ayant recolonisé.
- Enfin nous abordons l’évolution dans les communautés, sous l’angle théorique (modèles d’évolution d’assemblages d’espèces), et empirique sur un cas d’étude (évolution en réponse à une invasion biologique, dans deux espèces proches : une invasive et une résidente).

Résultats majeurs du projet
Nous avons modélisé la dynamique en métapopulation d’une quinzaine d’espèces de la communauté étudiée. Cette méthodologie permet de prédire le devenir de ces espèces, comment certaines vont se maintenir et d’autres diminuer face aux changements du milieu et aux bio-invasions. Nos données génétiques révèlent la persistance de populations lors de l’assèchement des mares, alors même que les individus sont enterrés et presque indétectables. Par ailleurs nous montrons, sur un cas d’étude, que les espèces résidentes peuvent évoluer rapidement et adopter des traits d’histoire de vie permettant de mieux tolérer la compétition avec les espèces introduites. Enfin, à plus large échelle, nos modèles montrent qu’une certaine diversité initiale est nécessaire pour enclencher un processus de diversification évolutive des espèces – cet effet autocatalytique explique des observations sur l’histoire de communautés insulaires et sur des communautés expérimentales. Ces résultats sont potentiellement applicables à des situations très générales d’étude de communautés fragmentées dans l’espace et soumises aux contraintes des changements globaux.

Nous avons mis au point une méthode pour estimer avec précision les taux d'extinction et de colonisation d'une espèce dans un ensemble de sites en réseau (métapopulation). L'originalité de notre apporche est de prendre en compte les états non détectables des organismes (phases de vie où l'organisme ne peut pas être détecté sur le terrain : par exemple sous forme de graines ou de formes inactives). Cette méthodologie sera utile aux écologistes de terrain fréquemment confrontés à ce problème.

Résultats majeurs du projet
Nous avons modélisé la dynamique en métapopulation d’une quinzaine d’espèces de la communauté étudiée. Cette méthodologie permet de prédire le devenir de ces espèces, comment certaines vont se maintenir et d’autres diminuer face aux changements du milieu et aux bio-invasions. Nos données génétiques révèlent la persistance de populations lors de l’assèchement des mares, alors même que les individus sont enterrés et presque indétectables. Par ailleurs nous montrons, sur un cas d’étude, que les espèces résidentes peuvent évoluer rapidement et adopter des traits d’histoire de vie permettant de mieux tolérer la compétition avec les espèces introduites. Enfin, à plus large échelle, nos modèles montrent qu’une certaine diversité initiale est nécessaire pour enclencher un processus de diversification évolutive des espèces – cet effet autocatalytique explique des observations sur l’histoire de communautés insulaires et sur des communautés expérimentales. Ces résultats sont potentiellement applicables à des situations très générales d’étude de communautés fragmentées dans l’espace et soumises aux contraintes des changements globaux.

Nous étudierons l'adaptation de systèmes fragmentés (métapopulations et métacommunautés) au changement climatique et aux bioinvasions. Dans ces systèmes la diversité biologique est régulée à l'échelle du paysage par des perturbations qui renouvellent les génotypes et les espèces au sein des sites. La fitness d'un génotype provient de sa capacité à coloniser de nouveaux sites, à supporter la compétition localement, ou à tolérer les perturbations. Les équilibres liés aux trade-offs subtils entre ces traits sont menacés par le changement global, qui se traduit par l'augmentation du taux de perturbation et l'arrivée d'espèces invasives. La fragmentation croissante des habitats justifie l'intérêt d'étudier les capacités d'adaptation de ces systèmes.
Nous étudierons des petits habitats d'eau douce (mares et rivières) des Antilles, naturellement fragmentés, exposés à des à-secs de plus en plus fréquents (réchauffement climatique) et à de nombreuses invasions. Nous chercherons à décomposer le processus d'adaptation à travers ses composantes de colonisation, compétition et tolérance, au niveau des diverses espèces d'une métacommunauté et des divers génotypes d'une métapopulation. Ainsi, à travers les changements de fréquence de ces espèces et génotypes, nous expliquerons la trajectoire adaptative passée, et prédirons la trajectoire future, des communautés / populations étudiées, en réponse à l'augmentation des perturbations et des invasions. Nous exploiterons deux jeux de données exceptionnels (>14 ans de données), l'un sur les mares de Guadeloupe er l'autre sur les rivières de Martinique. Les mares abritent une communauté de mollusques de diverses espèces (proches) ; les rivières contiennent surtout une espèce : Melanoides tuberculata, qui est parthégonétique et se présente comme un ensemble de souches bien différentes, chacune étant un clone reconnaissable morphologiquement. Le jeu de la compétition entre clones produit sur l'île une expérience d'évolution grandeur nature. Nous modéliserons la dynamique de ces systèmes avec des méthodes bayésiennes récentes ainsi qu'une approche plus originale, fondée sur la théorie des graphes. Ces résultats auront un fort impact car aucun système à n espèces ou n génotypes n'a ainsi été analysé, ce qui révèle un gros trou entre écologie théorique et écologie de terrain. En parallèle, nous mettons en place un gros programme de mesures des traits d'histoire de vie et de résistance à l'assèchement au laboratoire pour comprendre l'architecture phénotypique et génétique de l'aptitude à la colonisation, de la tolérance et de la compétitivité.
Nous étudierons aussi l'impact de l'évolution sur la coexistence à travers l'étude de l'évolution rapide des traits dans une paire d'espèces apparentées , l'une invasive, l'autre indigène. Nous ferons des modèles théoriques pour comprendre quels assemblages ou paires d'espèces sont évolutivement stables en plus d'être écologiquement stables; et comment le déplacement de caractère peut avoir lieu dans le triangle compétition-colonisation-tolérance. L'application de ces modèles se fera sur un sous jeu de données à 2 espèces (Physa acuta et marmorata) ; on y recherchera des adaptations aux habitats perturbés nouvellement rencontrés par l'espèce invasive (acuta) et un déplacement de caractère chez les marmorata lors de l'arrivée de leur compétiteur acuta.
Ce projet réunit un consortium pluridisciplinaire (écologie, génétique moléculaire et quantitative, expérimentations en élevage et modèles mathématiques) , avec un bon équilibre entre empiristes et théoriciens, entre travaux de terrain et de laboratoire, entre génétique évolutive et écologie des communautés. Les compétences des différents partenaires sont très complémentaires, comme le prouvent les nombreux papiers en communs qu'ils ont produit dans le passé.

Coordination du projet

Patrice DAVID (Organisme de recherche)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

CBGP Centre de Biologie pour le Gestion des Populations
CNRS CNRS
ISA Institut Sophia Agrobiotech
CRIOBE Centre de Recherches Insulaires et Observatoire de l'Environnement
ASCONIT ASCONIT Consultants

Aide de l'ANR 339 174 euros
Début et durée du projet scientifique : septembre 2012 - 42 Mois

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