Analyse de la résilience des nouvelles formes d'agricultures irriguées à partir des eaux souterraines au Maghreb – Groundwater ARENA
Analyse de la vulnérabilité et de la capacité d’adaptation des nouvelles formes d’agricultures irriguées à partir des eaux souterraines au Maghreb
Plus de 10% de la production alimentaire mondiale repose sur des ressources souterraines surexploitées par des millions d’agriculteurs. Ce projet analysera la vulnérabilité des agricultures basées sur ces eaux souterraines face aux changements environnementaux, économiques et sociaux, et développera des méthodes pour améliorer la gouvernance des territoires ruraux concernés par ces agricultures.
Décrypter la nouvelle « groundwater economy » et développer des méthodes pour anticiper individuellement et collectivement la crise imminente des territoires concernés.
A l’échelle mondiale, un tiers des superficies irriguées pour l’agriculture (113 millions d’hectares) est basé sur l’exploitation des ressources souterraines, grâce à un développement fulgurant de puits et forages (par exemple en Inde, on est passé de 87 000 en 1950 à 25 millions de forages aujourd’hui), générant plus de 210 milliards $ de valeur ajoutée. L’investissement est consenti par des agriculteurs individuels, ou en petits collectifs. Deux problèmes majeurs sont apparus depuis une vingtaine d’années par rapport à cette « groundwater economy » (Shah, 2009) : 1) une crise imminente de ces agricultures basées sur l’exploitation des eaux souterraines à cause de fortes baisses des niveaux piézométriques (0.5-5 m/an) et une dégradation de la qualité des eaux souterraines, 2) un problème de gouvernance, d’une part par le manque de légitimité des Etats à intervenir, les investissements étant d’ordre privée, et d’autre part par la nature atomistique de l’exploitation des eaux souterraines. L’objectif du projet est d’analyser les facteurs perturbateurs qui peuvent impacter négativement les capacités des systèmes aquifères ainsi que les sociétés et les territoires dont la richesse dépend de ces eaux souterraines, et de co-construire avec les différents acteurs de possibles adaptations aux changements environnementaux, économiques et sociaux. Nous allons également analyser les possibilités d’une mise en politique de ces problématiques dans un but de renforcement de l’action publique dans la gouvernance de la « groundwater economy ».
Des avancées scientifiques seront obtenues sur les dimensions suivantes :
1) Le décryptage du fonctionnement des territoires irrigués dont à la fois les acteurs et actants (locataires, métayers informels, forages illicites...) et les ressources (eaux souterraines, titres foncier) sont invisibles. Le choix méthodologique fort qui a été fait dans le projet sera de partir des pratiques (prélèvements, agricoles/irrigation, commercialisation, de coordination) et des observations du milieu physique pour formaliser les processus en jeu.
2) L’analyse rétrospective de la groundwater economy où processus physiques (dynamiques des nappes, climat) et anthropiques (prélèvements, dynamiques sociales, différentiation socio-économique) sont étroitement liés. Les résultats obtenus à travers des analyses des différentes disciplines impliquées dans le projet (hydrogéologues, hydrauliciens, agronomes, économistes, sociologues, politistes) seront mis en débat et confrontés à travers la construction d’un cadre analytique permettant de dévoiler les vulnérabilités et les capacités d’adaptation de la groundwater economy.
3) Co-construction participative de scénarios de gestion adaptative d’une « groundwater economy » devenue très importante sur les plans économique, sociale et politique. L’enjeu méthodologique sera de créer l’environnement et les outils (jeux de rôle, supports pédagogiques) pour amener les différents acteurs à engager une réflexion rétrospective et prospective de l’évolution de la groundwater economy et de préciser les conditions de sa mise en politique.
Le projet implique des start-up dans le domaine des sciences sociales sur les deux rives de la Méditerranée. Des méthodes et outils innovants portant sur l’analyse rétrospective et prospective de la «groundwater economy« seront développées et testées sur les trois sites du projet afin d’aboutir à une certaine généricité, permettant l’application des méthodes et outils dans d’autres contextes, en particulier dans la Méditerranée. Par ailleurs, le projet accorde un intérêt particulier à la communication de ses résultats à un public large à travers des expositions, manifestations, films etc. Enfin, un partenariat scientifique internationale au-delà des partenaires du projet sera mis en place avec une ambition de pérennisation et capitalisation des résultats du projet.
L’ambition du projet est de développer un réseau de chercheurs et de professionnels concernés par la gouvernance des eaux souterraines au-delà de la durée du projet. Ce réseau concerne d’abord le Maghreb et la France, et s’ouvrira progressivement sur la Méditerranée à travers des échanges méthodologiques.
Les premiers résultats du projet commencent à être publiés dans des revues ACL (2 publiés, 5 soumis), et ont été présentés dans des colloques internationaux (4) et nationaux (5). Une première version d'un jeu de rôle simulant l'évolution de la groundwater economy a été développé.
L'utilisation intensive des ressources souterraines (1000 km3/an) a permit le développement d'une économie agricole dynamique et porteuse de richesse la "groundwater economy". Cependant ce développement a de nombreuses conséquences environnementales : le tarissement des ressources souterraines, la dégradation de la qualité des eaux, la dégradation des sols et des milieux aquatiques. En fonction de la taille des aquifères et l'intensité des prélèvements d'eau, les tarissements des nappes vont jusqu'à 5m/an. Or plus de 10% de la production alimentaire repose sur des ressources souterraines surexploitées. Seule une minorité des surexploitations concerne les nappes fossiles (30 km3/an).
Ce projet de recherche analysera la vulnérabilité et les capacités d'adaptation de la "goundwater economy" qui représente un système socio-écologique où les dynamiques sociales et biophysiques sont intimement liées. En effet la groundwater economy combine deux systèmes complexes : 1) le système aquifère où les processus de recharge et d'écoulement naturels se combinent aux processus anthropiques de prélèvements par forage et de ré-infiltration par irrigation; 2) le système social où l'économie générée par l'irrigation provient des agriculteurs eux-mêmes suivant leur capacité d'initiative, d'investissement et de gestion. Le projet tiendra compte de deux types de changement global : 1) le changement climatique et ses impacts sur la ressource; 2) les pressions anthropiques sur les aquifères pour l'agriculture irriguée.
L'objectif du projet est de développer une approche intégrée pour analyser la vulnérabilité et les capacités d'adaptation de la groundwater economy au Maghreb face aux changements environnementaux, économiques et sociaux. Nous nous focaliserons sur trois territoires irrigués sur trois aquifères de taille moyenne et grande au Maghreb. Le projet analysera les facteurs perturbateurs qui peuvent impacter négativement les capacités des systèmes aquifères ainsi que les sociétés et les territoires dont la richesse dépend et les possibles adaptations aux changements globaux..
Pour atteindre ces objectifs, des avancées scientifiques seront obtenues sur les dimensions suivantes : la construction d'un cadre conceptuel pour interdisciplinaire pour pouvoir construire un dialogue et un débat parmi différents scientifiques et acteurs autour de la capacité d'adaptation de la groundwater economy, 2) la groundwater economy sera analysée sur trois types de ressources souterraines, selon un gradient de ressource fossile à une ressource totalement renouvelable. L'enjeu méthodologique sera de replacer les concepts de mitigation ou d'adaptation face à caractère renouvelable ou no de la ressource en eau souterraine, 3) le caractère informel de la groundwater economy rend les approches classiques de la GIRE non opérationnelles et nous oblige à trouver une nouvelle voie pour tenir compte de l'incapacité actuelle des politiques publiques pour mettre en œuvre des processus d'adaptation ou de mitigation.
Coordination du projet
Marcel KUPER (CENTRE DE COOPERATION INTERNATIONALE EN RECHERCHE AGRONOMIQUE POUR LE DEVELOPPEMENT - CIRAD - DEPARTEMENT ES) – marcel.kuper@cirad.fr
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenaire
BRGM BUREAU DE RECHERCHES GEOLOGIQUES ET MINIERES - BRGM
CIRED - CNRS CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE - DELEGATION REGIONALE ILE-DE-FRANCE SECTEUR EST
CLERSE - CNRS CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE - DELEGATION REGIONALE NORD-PAS-DE-CALAIS ET PICARDIE
LADYSS - CNRS CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE - DELEGATION REGIONALE ILE-DE-FRANCE SECTEUR OUEST ET NORD
GEAU-CIRAD CENTRE DE COOPERATION INTERNATIONALE EN RECHERCHE AGRONOMIQUE POUR LE DEVELOPPEMENT - CIRAD - DEPARTEMENT ES
Aide de l'ANR 798 990 euros
Début et durée du projet scientifique :
décembre 2011
- 48 Mois