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CIRCULATION DES PRODUITS SIDERURGIQUES AUX ÂGES DU FER DE L'EST DE LA FRANCE ET DU SUD DE L'ALLEMAGNE: APPROCHES MULTIDISCIPLINAIRES ET METHODOLOGIQUES POUR L'ETUDE DE PROVENANCE DES FER ANCIENS – CIPIA

Comprendre les échanges et la circulation du fer aux Ages du fer.

Étude de la circulation des métaux ferreux aux Ages du Fer dans l’espace Nord-Alpin au premier Age du fer (Hallstatt D : 600-475 av. JC) et dans l'espace de la culture Aisne Marne au début de La Tène (La Tène A : 475-400)

Circulation des métaux ferreux aux Ages du Fer dans l’espace Nord-Alpin et sa périphérie

Le but du programme ANR CIPIA était de considérer les métaux ferreux comme un des éléments de lecture des échanges économiques à la fin du Hallstatt et le début de la Tène. Pour les périodes du premier Age du fer (Hallstatt D : 600-475 av. JC), il fallait étudier l’organisation des réseaux d’échanges liés aux métaux ferreux et vérifier si l’espace nord-alpin et les Principautés Celtiques associées avaient été des producteurs, voire potentiellement exportateurs de fer. Durant la période suivante (La Tène A : 475- 400), le but était de vérifier si les changements culturels et économiques s’accompagnaient d’une modification de la production et de la nature des échanges liés aux métaux ferreux. Un corpus de plus de 80 objets spécifiques de ces périodes (demi-produits bipyramidaux et bandages de roue de chars trouvés dans les sépultures) a été étudié. A travers la mise au point d’une méthodologie innovante et originale, les signatures chimique et isotopique de ces objets ont été comparées entre elles et à celles des espaces de productions identifiés archéologiques (minerais et scorie).

Environ 450 échantillons de minerai et de scorie ont été prélevés sur les sites archéologiques afin de déterminer la signature chimique et isotopique (Osmium) des ensembles potentiels de production au sein de l’espace géographique considéré. L’inter comparaison des données issues d’une approche statistique sur les éléments et de la mesure des rapports isotopiques des différents espaces a permis de montrer la parfaite complémentarité des deux approches : les rares ensembles de production ne pouvant être distingués par l’une pouvaient dans tous les cas être distingués par l’autre. Forts de cette consolidation méthodologique, les signatures chimiques et isotopiques des zones de production ont été comparées avec celles des objets collectés (demi-produits bipyramidaux, bandages de roue de char, chutes d’activités) provenant des territoires allemand et français pour la transition Hallstatt D/La Tène A. Ceux-ci ont subi une étude intégrale incluant des analyses métallographiques permettant de déterminer la nature et la qualité du métal employé. Par ailleurs, et pour la première fois au monde, des datations radiocarbone de ces objets ont pu être effectuées, et ce grâce à la mise au point d’une méthodologie inédite.

Le programme CIPIA a permis de mettre au point une méthodologie innovante afin de pister les provenances des alliages ferreux archéologique et de dater par technique radiocarbone les alliages ferreux anciens.
Cette méthodologie basée sur l’analyse élémentaire des inclusions (approche des équipes françaises) et des rapports isotopiques de l’Osmium (équipes allemande) a été appliquée à l’espace Nord Alpin à la fin du Hallstatt et au Début de la Tène (avec une extension aux espaces géographiques liés à la culture Aisne Marne et aux Ardennes Belge pour cette dernière période). Des ensembles de potentiels de production sidérurgiques ont été caractérisés chimiquement sur cet espace et les objets métalliques (demi-produits et bandages de char) ont été analysé afin de déterminer si ils provenaient de cet espace.
Les demi-produits et les bandages de roue des chars des sépultures du Hallstatt sont importés comme les autres biens de prestige trouvés à cette période. Seuls les objets liés à des sites d’artisanat et a des usages quotidiens ont une origine locale. Les réseaux d’échanges du métal sont communs de part et d’autre du Rhin mais il existe plusieurs réseaux parallèles : l’un réservé aux objets de prestige, l’autre aux objets du quotidien et de consommation locale. Pour la période de La Tène, les bandages de roues des sépultures forment des groupes plus homogènes révélant que les réseaux d’échange apparaissent plus resserrés localement.

Les développements méthodologiques permettent aujourd’hui d’ouvrir ces perspectives vers d’avantages de questionnement archéologiques. Nos recherches peuvent à présent s’étendre à un espace géographique plus étendu et à une diachronie plus large permettant une meilleure vision de l’évolution des échanges et de l’organisation socio-économique des productions.
L’une des conclusions majeure de ce programme est l’existence d’un réseau d’échange beaucoup plus large que la zone prise en compte. Le métal semble circuler sur de vastes distances et la majorité des objets étudiés proviennent d’espaces extérieurs à la zone d’étude. Il est aujourd’hui primordial de compléter la base de données des espaces de production, d’une part en élargissant encore le nombre d’échantillons analysés pour la définition des espaces existants et, d’autre part, en intégrant la Bourgogne, la Franche-Comté, La Sarthe, l’Eure et l’Aisne en France, le Markgräflerland, le Siegerland, le Pfalz en Allemagne et le Condroz et l’Eifel en Belgique.Il apparait également primordial d’étendre l’étude des espaces de production au nord de l’Italie afin d’appréhender l’influence du monde méditerranéen sur le commerce du fer.
L’un des résultats majeur de ce programme a été de mettre en évidence l’existence de réseaux d’échange et de circulation de métal différenciés selon le type de mobilier. La vocation particulière des bipyramidaux et des bandages de roue fait que l’image de la circulation des métaux qui en découle parait déformée. Le mobilier des sites d’habitats devrait être plus à même d’apporter des données directes susceptibles de caractériser et de quantifier l’importance des productions locales. C’est pourquoi, à l’avenir, il sera nécessaire d’étudier préférentiellement les chutes métalliques en contextes de forge sur les agglomérations du Hallstatt D et de La Tène A et un échantillonnage d’objets métalliques dans divers contextes (agglomération, établissement rural, tombes autres que tombe à char…).

Le projet a donné lieu à 7 articles dans des revues à comité de lecture, 23 chapitres d’ouvrages, 10 communication à des conférences et 7 articles dans la presse de vulgarisation scientifique.

L’Europe Centrale et Nord-occidentale aux âges du fer n’est pas un ensemble uniforme, de nombreuses variantes se dégages et des centres moteurs apparaissent puis sont remplacés. Ces changements sont principalement interprétés en termes de relations commerciales et d’influences avec l’économie-monde méditerranéenne. Le premier âge du Fer (800-500 BC) se caractérise par une aristocratie de très haut rang aux sépultures à char toujours plus riches et mieux dotées en biens de prestiges et importations méditerranéennes. Dans les modèles interprétatifs, le fer est interprété comme moteur des processus de hiérarchisation sociale et des changements géostratégiques des sociétés post âge du Bronze, sans que l’on ait pour autant les données archéologiques suffisantes en termes de production et de commerce des produits sidérurgiques.
Contrairement à ce qui a pu être affirmé, nous n’avons encore aucun indice archéologique pouvant permettre de rattacher l’émergence des premières sociétés centralisées à une quelconque exploitation primaire du fer. Le lien hypothétique entre développement d’une complexification sociale et production de fer n’est en fait issu que de la convergence entre la présence historique d’exploitation de minerai et la présence des sépultures à importations.
Plus tard, à partir du 5ème siècle le groupe Aisne-Marne, le groupe du Hunsrück-Eifel et la Bohème viennent se substituer plus au nord au complexe nord-alpin. Ce bouleversement des axes commerciaux rapproche les centres de pouvoir politique et économique des régions dont nous connaissons des productions sidérurgiques précoces. Toutefois, il n’est pas possible de rattacher l’émergence de ces nouveaux centres à cette production et aucunes données n’est accessible sur les échanges commerciaux à courte, moyenne ou longue distance de produits sidérurgiques.
L’objectif de ce programme est double. Il possède une orientation méthodologique en archéométrie et traite des problématiques anthropologiques et historiques relatives aux périodes protohistoriques. Le premier objectif est d’exploiter, de confronter et de développer de façon complémentaire les deux méthodes archéométriques de détermination des origines de produits sidérurgiques. En effet, le développement récent dans deux laboratoires d’archéométrie en France et en Allemagne permet à présent d’envisager l’étude de la provenance des produits sidérurgiques. C’est une véritable révolution pour les problématiques relatives aux sociétés de l’âge du Fer. Le second objectif revient, en appliquant ces méthodes, à s’intéresser aux deux périodes chronologiques de l’âge du fer précédemment évoquées et d’apporter une vision renouvelée des relations commerciales et du rôle du fer dans chacun des changements majeurs qui se déroulent à ces périodes. Pour cela, nous nous intéresserons à un corpus d’objets archéologiques spécifique sur lequel seront appliquées les méthodes innovantes de détermination de provenance développées en France et en Allemagne.
Les méthodes archéométriques développées par les deux équipes se basent sur la détermination des signatures chimiques des éléments traces et des isotopes (Osmium) propres aux espaces producteurs. Ainsi, dans un premier temps, la signature va être recherchée dans les minerais, les scories archéologiques et les autres déchets de la chaîne opératoire trouvés sur les sites de régions de production potentiels liées à la problématique (Lorraine, Baden Wuerttemberg, Sénonais, Pays de Bray, West Bavaria). Dans un second temps, nous analyserons les signatures chimiques de deux types de mobilier caractéristiques de ces périodes : les lingots bipyramidés préférentiellement distribués dans l’aire géographique du complexe nord-alpin et les bandages de roue des sépultures à char représentatifs des zones de dépôts funéraires ostentatoires.

Coordination du projet

Philippe DILLMANN (CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE - DELEGATION REGIONALE ILE-DE-FRANCE SECTEUR SUD) – philippe.dillmann@cea.fr

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

CNRS CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE - DELEGATION REGIONALE ILE-DE-FRANCE SECTEUR SUD
Curt-Engelhorn-Zentrum Archäometrie Curt-Engelhorn-Zentrum Archäometrie

Aide de l'ANR 359 999 euros
Début et durée du projet scientifique : - 36 Mois

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