Blanc SVSE 4 - Sciences de la vie, de la santé et des écosystèmes : Neurosciences

Instabilité fonctionnelle durant la fixation oculaire : conséquences motrices et perceptives – VISAFIX

Jamais au repos : La dynamique des mouvements oculaires de fixation

VISAFIX avait comme objectif d'étudier chez l'homme et chez le singe le contrôle et le rôle fonctionnel des mouvements miniatures des yeux pendant que l'on fixe une scène visuelle.<br />

La fixation oculaire : du bruit ou un mouvement contrôlé ?

L’exploration oculaire d’une scène visuelle est un processus dynamique qui implique des mouvements oculaires rapides d’amplitude très variée. Même pendant la fixation d’une portion limitée de la scène, des microsaccades sont produites qui partagent beaucoup des propriétés des plus grandes. Ces mouvements miniatures ont pendant longtemps été considérés comme le résultat d’une activité stochastique dans le système oculomoteur. Plus récemment, il est apparu au niveau moteur qu’en fait saccades et microsaccades sont des mouvements dont l’amplitude et la direction sont contrôlées, selon de processus communs d’ajustement. Cependant, cette conception ne prenait pas en compte le rôle des processus visuels qui afférent au système oculomoteur. VISAFIX visait à mieux comprendre quelles sont ces signaux visuelles qui guident ces mouvements oculaires, leur impact sur les mécanismes corticaux de la perception visuelle et enfin leur substrat neuronal au niveau du tronc cérébral. Cette recherche a des conséquences importantes pour notre compréhension sur la nature de l’exploration visuelle où bruit, fluctuations stochastiques et informations pertinentes influent le comportement dans des proportions variables.

VISAFIX repose sur une approche interdisciplinaire au sein d’une seule équipe en abordant ces questions en psychophysique (homme, singe), en électrophysiologie (singe) et imagerie (singe). Un point clé est le modèle singe chez lequel le comportement oculomoteur est identique à l’homme. Les expériences psychophysiques ont été conduites chez les deux espèces. L’approche neurophysiologique sur le singe implique des techniques de microstimulation électrique et d’inactivation des structures sous-corticales profondes ainsi que des techniques d’imagerie optique en temps réel du cortex visuel primaire. Chez l’homme, l’accent a été mis sur une exploration plus détaillée des déterminants visuels du comportement oculomoteur et leurs liens avec la perception.

Nous avons montré que les propriétés statistiques des images naturelles influent sur le patron de fixation, via une carte des informations visuelles les plus pertinentes. Ceci suggère que ce n’est pas l’image directement mais plutôt une carte de saillance qui contrôle ces microsaccades, tout comme les saccades. Ces déplacements de l’œil impactent la représentation rétinotopique de l’image au niveau du cortex visuel primaire, mais avec une dynamique amortie par les interactions intra-corticales. Enfin, nous avons pu montrer que cette dynamique dépend de structures du tronc cérébral partagées avec les saccades d’exploration. Ainsi, VISAFIX confirme que les microsaccades sont le produit d’un équilibre dynamique dans les structures de contrôle des mouvements oculaires d’orientation et qu’il dépend du poids respectifs des informations les plus saillantes qui sont liées à la structure de l’image et à la tâche cognitive en cours.

Le projet VISAFIX est un projet de recherche fondamentale coordonné par le Dr Guillaume Masson et réalisé au sein d’une seule équipe de recherche CNRS fortement interdisciplinaire. Il a commencé en avril 2011, et s’est poursuivi jusqu’en octobre 2014. Il a bénéficié d’une aide de l’ANR de 456K€, sur un coût total 1.1M€.

La réalisation du projet VISAFIX a conduit pour l’heure à la production de 5 articles dans les meilleures revues scientifiques de la discipline (J Neurosci, Vision Res, Nature Neuroscience). 4 autres articles sont encore en préparation et devraient être soumis pour publications les mois à venir. Les travaux réalisés ont été présentés dans deux thèses de Neurosciences (Université Aix-Marseille). Le travail sur la genèse de nouveaux stimuli a été publié dans J Neurophysiol et le code source est disponible gratuitement. Nous travaillons à distribuer une librairie informatique pour l’ensemble de la communauté scientifique en OpenSource. Enfin, les résultats des différentes séries expérimentales ont été présentés dans les conférences internationales de la discipline.

Lors de la fixation visuelle de scènes naturelles, nos yeux sont constamment animés de petits mouvements. La nature et le rôle de ces micro-saccades durant la fixation a été l'objet d'intenses débats scientifiques dans les années 1960. Cette question a reçu un très récent regain d'intérêt à la suite de travaux expérimentaux chez l'homme et le singe qui ont remis en cause plusieurs aspects de la conception classique du couplage entre vision et oculomotricité. Tout d'abord, il faut maintenant voir l'instabilité de fixation comme le produit d'un système moteur dynamique où les mouvements s'enchainent, allant des microsaccades fovéales aux grandes saccades de fovéation. Nos travaux récemment publiés dans Science (2009) montrent que le Colliculus Supérieur joue un rôle central dans ce continuum moteur. Ensuite, il apparait de plus en plus clairement que l'instabilité de fixation dépend de facteurs visuels et cognitifs. En particulier, en présence de stimuli bruits et ambigus, leurs distributions changes soulignant le lien possible entre fluctuations motrices et perceptives. D'autres travaux récents suggèrent que les microsaccades pourraient jouer un rôle significatif dans la perception mais un cadre psychophysique ou comportementale quantitatif précis reste à établir. Ensuite, il apparait que la dynamique corticale est modulée par ces saccades de fixation. Nos travaux antérieurs (Nature Neuroscience 2000; PNAS, 2002) avaient déjà montré qu'il existe une entrée visuelle prégnante durant les saccades. D'autres ont montré que les états dynamiques corticaux changent en fonction de l'instabilité de fixation. Ces relations restent cependant non élucidées au niveau de la population de neurones corticaux et des différences possibles entre différentes aires corticales visuelles. Enfin, la conséquence de ces fluctuations motrices sur les représentations corticales de l'information, au premier rang desquelles celle de la position visuelle, reste obscure.

VISAFIX est un projet interdisciplinaire conduit par une seule équipe CNRS, l'équipe DyVA de l'INCM. En regroupant les compétences de 5 chercheurs permanents (comportement et psychophysique; neurophysiologie et imagerie optique chez le singe vigile), nous nous proposons de porter un programme de recherche liant ces différentes questions. Quelles sont les bases neurales des microsaccades? Comment dépendent-elles des processus sensoriels et elles interagissent avec la perception ? Comment ces microsaccades influent la dynamique sensorielle corticales et les représentations de l'information ? VISAFIX offre une approche unique pour étudier ce phénomène captivant à différents niveaux du système nerveux chez le primate humain et non-human. Nous nous proposons d'utiliser ces petits mouvements oculaires pour étudier en détail comment les dynamiques sensorielles corticales et motrices sous-corticales interagissent pour contrôler en continu la position de l'oeil et donc du capteur visuel, la rétine.

VISAFIX est une version retravaillée du projet de recherche soumis l'année dernière à l'AAP Blanc et qui a été retenu en liste complémentaire, mais n'a finalement pas pu être financé. Nous avons pris en compte les critiques émisent l'année dernière pour aboutir à un projet toujours ambitieux mais plus ramassé et mieux organisé.

Coordination du projet

Guillaume MASSON (CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE - DELEGATION REGIONALE PROVENCE CORSE) – guillaume.masson@univ-amu.fr

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

INCM - CNRS CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE - DELEGATION REGIONALE PROVENCE CORSE

Aide de l'ANR 456 144 euros
Début et durée du projet scientifique : - 36 Mois

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