Blanc SVSE 2 - Sciences de la vie, de la santé et des écosystèmes : Biologie cellulaire, développement

Evolution de la capacité des récepteurs nucléaires d’hormones à fixer leur ligand : apport du modèle amphioxus – AmphiNR

Comment les récepteurs nucléaires d’hormones fixent-ils leurs ligands ?

Comprendre de quelle façon l’affinité d’un récepteur nucléaire pour son/ses ligands s’est modifiée au cours de l’évolution est un pré requis à la mieux appréhender de la pharmacologie des récepteurs nucléaires d’hormones qui représentent actuellement des cibles thérapeutiques particulièrement intéressantes puisque 10% des médicaments vendus en pharmacie ciblent ces récepteurs.

Apport du modèle amphioxus dans la compréhension de l’évolution du couple récepteur/ligand

Les récepteurs nucléaires (NR) représentent une importante famille de facteurs de transcription dont l’activation dépend de la liaison de petites molécules comme certaines hormones. Un dysfonctionnement des voies intracellulaires dépendantes des NR induit des maladies prolifératives, reproductives ou métaboliques. Actuellement, les NR offrent de vastes perspectives dans l’élaboration de traitements ciblant ces maladies. Cependant la compréhension de la pharmacologie de ces récepteurs favoriserait l’élaboration de tels traitements. Notre projet a pour objectif d’étudier de quelle façon la liaison et l’affinité d’un ligand à son récepteur s’est modifiée au cours de l’évolution. Pour cela, nous utilisons un modèle original et pertinent pour ce type d’étude : l’amphioxus. Cet invertébré marin est l’organisme qui se rapproche le plus de l’ancêtre commun des vertébrés. Le génome de l’amphioxus offre trois exemples particulièrement intéressants pour l’étude de la plasticité des NR : 1) le récepteur de l’hormone thyroïdienne d’amphioxus est un cas d’adaptation d’un couple ligand-recepteur à une divergence de séquence ; 2) les 10 NR1H d’amphioxus permettent d’étudier l’impact d’une duplication massive sur la liaison des ligands et sur la fonction de récepteurs dupliqués ; 3) Le récepteur NR7 identifié récemment chez l’amphioxus serait, selon nos hypothèses, un représentant d’une ancienne famille de NR. Sa caractérisation nous permettra de mieux comprendre les premières étapes de la diversification des NR au cours de l’évolution.

Le projet a pour objectif de combiner des approches phylogénique, structurale, fonctionnelle, pharmacologique et développementale sur 3 groupes de NR chez l’amphioxus permettant de répondre à 3 questions distinctes :
1) De quelle façon le couple ligand-récepteur s’adapte à une divergence de séquence ?
2) Comment la spécificité des ligands et la fonction des récepteurs évoluent-t-elles suite à une duplication massive ?
3) Quelles sont les étapes précoces de la diversification fonctionnelle de la famille des NR ?
Analyses de séquences, modélisations, structures tridimensionnelles des NR d’intérêt, identifications de ligands, analyses des effets des ligands sur le développement des amphioxus, caractérisation spatio-temporelle de l’expression des gènes d’intérêt... chacun des partenaires de ce projet est spécialisé dans une ou plusieurs de ces approches.
Ces aspects complémentaires permettront de construire un modèle permettant de comprendre les bases fondamentales de l’évolution d’un couple ligand/récepteur.

Pour l'instant il n'y a pas de résultat qui puisse interesser le grand public. Des pistes interessantes notamment sur le récepteur des hormones thyroïdiennes et l'évolution de sa spécificité existent cependant. Il nous semble raisonable d'attendre que ces pistes se confirment avant de donner plus de détail.

A terme, cette analyse fondamentale permettra de mieux comprendre la pharmacologie des récepteurs nucléaires et de mieux appréhender l’élaboration de traitements plus efficaces et plus ciblés.

Pour l'instant ce projet a donné lieu à deux articles de revue faisant état des connaissances actuelles concernant le modèle amphioxus (S. Bertrand, H. Escriva, Development. 2011, 138(22):4819-30) et ses récepteurs nucléaires (C. Lecroisey, V. Laudet and M. Schubert. Brief Funct Genomics. 2012 Mar;11(2):156-66). De plus, l’obtention et l’analyse du transcriptome de l’amphioxus européen a donné lieu à un article (S. Oulion, S. Bertrand, M.R. Belgacem, Y. Le Petillon and H. Escriva. PLoS ONE, 2012, 7(5): e36554). Enfin, un chapitre sur l’amphioxus a été rédigé pour un ouvrage espagnol traitant d’évolution (Bertrand, H. Escriva. Cordados. In «El árbol de la vida: sistemática y evolución de los seres vivos«. 2012. Chapter 41. Ed. by Pablo Vargas and Rafael Zardoya. Madrid, p 372-379).

Les récepteurs nucléaires (RNs) sont des facteurs de transcription activés par un ligand impliqués dans des processus cellulaires comme la croissance et la différenciation, ou la régulation du métabolisme. Les RNs forment une superfamille de gènes très conservée chez les métazoaires. Certains membres de cette superfamille lient des hormones majeures (stéroïdes, hormones thyroïdiennes, rétinoïdes) qui régulent l’activité des gènes et ils forment donc un lien direct entre le ligand et les gènes cibles. Il existe aussi des récepteurs pour lesquels aucun ligand n'a pu être identifié et qui sont appelés "RNs orphelins".
Les analyses phylogéniques ont montré que les RNs sont apparus tôt chez les métazoaires, avant la séparation entre protostomes et deutérostomes, et qu'ils se sont diversifiés à travers de duplications et de pertes de gènes. L'histoire de cette famille de gènes est relativement bien comprise en termes d'évolution moléculaire, cependant les mécanismes impliqués dans leur évolution fonctionnelle sont beaucoup moins bien connus. En effet, il est difficile de retracer l'histoire évolutive des trois caractéristiques fonctionnelles des RNs: leur activité de liaison à l'ADN, leurs capacités d'interaction avec leurs co-régulateurs, et leur activité de liaison au ligand. Cette dernière caractéristique est celle qui a fait l'objet de plus de controverses, avec deux modèles publiés dans la littérature: le modèle "orphelin précoce" qui suggère que les RNs étaient premièrement orphelins puis qu'ils ont acquis leur capacité de liaison au ligand au cours de l'évolution, et le modèle "d'exploitation du ligand" qui au contraire suggère une acquisition précoce de la capacité de lier un ligand.Il demeure difficile de trancher entre ces deux hypothèses car les facteurs qui gouvernent l'évolution de la spécificité de liaison au ligand ne sont pas bien connus.
Dans ce projet, nous proposons d'utiliser un modèle original, l’amphioxus (Branchiostoma lanceolatum), un céphalochordé qui est considéré comme la meilleure approximation de ce qu'était l'ancêtre des chordés et donc des vertébrés.. En tirant partie des avantages du modèle amphioxus, et en concentrant nos efforts sur trois types de récepteurs, nous proposons de combiner des approches structurales, fonctionnelles et développementales dans le but de mieux identifier les tendances gouvernant l'évolution de la capacité de liaison au ligand des RNs et l'évolution du couple ligand/récepteur. Les trois récepteurs que nous avons choisis représentent trois exemples particulièrement intéressants d'évolution du couple ligand/récepteur:
- TR, avec un unique récepteur divergent chez l'amphioxus (AmphiTR) face à plusieurs duplicats chez les vertébrés (TRa et TRb)
- NR1H, avec une expansion massive spécifique de lignée chez l'amphioxus (10 gènes de NR1H chez l’amphioxus pour 2 chez les vertébrés)
- NR7, une sous-famille entièrement nouvelle probablement perdue secondairement chez les vertébrés mais présente chez d’autres invertébrés.
Ces trois exemples de RNs offre une opportunité unique d'étudier les conséquences de la duplication de gènes en termes d'évolution de la capacité de lier un ligand. Comme deux des récepteurs étudiés (TR et NR1H) sont des cibles pharmacologiques majeures, l’étude de leur plasticité évolutive au niveau de la fixation du ligand devrait apporter des connaissances nouvelles sur la poche de fixation du ligand, connaissances qui pourront être exploitées en terme de conception de molécules pharmacologiques Nous caractériserons ces évènements d'un point de vue fonctionnel et structural en combinant la détermination des structures 3D et les tests d'activité des récepteurs. Comme il est primordial de relier les résultats obtenus au rôle biologique des récepteurs, nous associerons à ces approches une analyse de la fonction développementale pour laquelle l'amphioxus est aussi un excellent modèle.

Coordination du projet

Vincent Laudet (CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE - DELEGATION REGIONALE RHONE-AUVERGNE) – Vincent.Laudet@ens-lyon.fr

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

CERBM - IGBMC CENTRE EUROPEEN DE RECHERCHE EN BIOLOGIE ET EN MEDECINE - CERBM
CNRS-IGFL CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE - DELEGATION REGIONALE RHONE-AUVERGNE
CNRS - OOB CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE - DELEGATION REGIONALE LANGUEDOC-ROUSSILLON

Aide de l'ANR 550 000 euros
Début et durée du projet scientifique : - 36 Mois

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