Des Anciens aux Modernes ? Transmission des usages, des savoirs et des représentations du territoire en Amazonie (Brésil/Guyane) – USART
Les « populations traditionnelles » d?Amazonie recouvrent un certain nombre de groupes sociaux dont la caractéristique commune est de présenter un mode de vie qui entretient une grande connaissance de l?environnement, qu?il soit forestier ou agricole. Devant l?avancée de la déforestation et de ses conséquences négatives (changement climatique local et global, émissions de CO2 ou érosion de la biodiversité, etc.), le maintien de ces populations dans les espaces qu?elles habitent, par le biais de mécanismes juridiques leur assurant la propriété ou l?usufruit collectif de ces espaces, est apparu comme une solution séduisante, permettant d?allier la préservation environnementale, celle de la diversité biologique, et la conservation de la diversité culturelle. Aujourd?hui, les territoires alloués aux populations traditionnelles amazoniennes, érigées en « gardiennes de la forêt » représentent un ensemble spatial de dimensions tout à fait considérables : plus de 1 millions de kilomètres carrés pour les populations amérindiennes du Brésil, près de 240 000km² pour les populations « extractivistes » du même pays, et au moins 34 000 km² - la taille du parc national - en Guyane française. La pierre angulaire qui permet l?octroi de droits fonciers spécifiques et collectifs à ces communautés traditionnelles est la reconnaissance du lien particulier entre elles et leur environnement, dont elles tirent l?essentiel de leur subsistance. Ce lien recoupe un ensemble de connaissances et de représentations que nous désignons par le concept de « savoir territorial ». Celui-ci comporte des mécanismes socioculturels de gestion collective des ressources naturelles restreignant l'usage immodéré de celles-ci au même titre que l'accumulation individuelle. Il est normalement incorporé par les jeunes générations par des formes de transmission "traditionnelles". Or, la plupart des communautés concernées se trouvent confrontées à un changement social rapide lié à leur rapprochement du reste des sociétés dans lesquelles elles sont insérées. Même dans les régions les plus enclavées, les populations « traditionnelles » modifient leurs pratiques et leurs territorialités en fonction des contraintes et des opportunités qui se présentent à elles (marchés, opportunités d?emploi, etc.). Ce changement se manifeste particulièrement entre les générations les plus jeunes et leurs aînées. Mais il ne doit pas être interprété uniquement comme une perte de connaissance. Il doit aussi être compris comme une transformation des usages et des représentations, une ré-interprétation continuellement en cours. Ainsi l?évolution des savoirs territoriaux des populations traditionnelles d?Amazonie peut être envisagée en terme de résilience, c?est-à-dire, dans ce cas, à la capacité des systèmes territoriaux étudiés à intégrer une perturbation dans leur fonctionnement, sans changer de structure qualitative et de fonctions essentielles. Il faut alors se demander quelles sont les propriétés et fonctions essentielles des "savoirs territoriaux" qui sont préservées et quelles sont les pratiques/représentations qui traduisent une rupture dans les modes d?articulation à l?espace. Dans ce cadre, le projet USART se propose d?étudier comment le « savoir territorial », qui fait en grande partie l?originalité de ces sociétés traditionnelles, se transmet ? et se transforme - entre les générations les plus anciennes et les jeunes générations actuelles. Il s?attachera particulièrement à détecter un éventuel passage d?une représentation intériorisée du territoire à une perception plus pragmatique (ou « objectivée »), éventuellement sous l?effet de l?influence d?acteurs externes chargés « d?aider » les populations concernées à gérer leur espace. Pour les analyser, nous proposons une série d?enquêtes de terrain dans un échantillon de sites représentatif de la diversité des situations amazoniennes, destinées à inventorier, cartographier et comparer les « savoirs territoriaux » des jeunes adultes et des plus anciens. Ce faisant, le projet proposera une nouvelle approche de l?articulation entre anthropologie et géographie, de même qu?il élaborera un protocole d?étude pluridisciplinaire lui permettant d?aborder de manière cohérente et de comparer entre eux les six sites qui seront étudiés.
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Début et durée du projet scientifique :
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